Fini ce troisième tome de la
Symphonie des Siècles et je suis toujours sous le charme.
Au final le récit suit principalement les pérégrinations de Rhapsody et ne revient qu’épisodiquement à Ylorc et sur Achmed. Construction logique car Rhapsody est le personnage central de la série et son voyage initiatique est encore loin d’être fini - là où Achmed est tout de même bien plus avancé dans sa quête identitaire.
Côté Rhapsody nous avons donc eu sa rencontre très réussie avec la Dragonne Elynsynos puis celle avec Oelendra la championne légendaire qui la forme en tant que nouvelle Iliachenva'ar (porteuse de l'épée du Ciel – en gros). Devenue une véritable et complète Barde-Guerrière le tome se termine par le premier combat de Rhapsody en tant que Championne – combat qui tient toutes ses promesses.
Sinon une grande partie du tome est également consacrée à son rapprochement et à son amitié naissante, et forcément compliquée, avec Ashe – le tout assez bien traité à mon sens.
Côté Achmed ce fut plus léger avec essentiellement sa rencontre avec la Matriarche Dhracienne qui doit théoriquement terminer sa formation et lui enseigner la maîtrise de l’ultime arcane, nécessaire pour accomplir sa tâche.
Maintenant je vais aller un brin plus loin vu que j’en suis à mi-récit et qu’à ce point certaines choses sont devenues claires et évidentes et sont intéressantes à aborder dans leur forme.
Je pars du premier élément qui me semble évident mais aussi fortement structurant : le triangle « amoureux » Rhapsody-Ashe-Achmed. Trivial pour le lecteur même s'il n’a pas encore de réalité en soi – il n’y a qu’Ashe qui soit amoureux pour l’instant et joue directement sur ce thème.
Le contraste entre les deux potentiels « prétendants » de Rhapsody est assez net et marqué :
Ashe est le beau guerrier tragique qui porte une malédiction à la dimension très sacrificielle. Il est très avenant et doux envers Rhapsody, et joue clairement le registre du chevalier servant.
Achmed, avec son visage de cauchemar qu'il cache sous une capuche, dégoûte la plupart des gens d’abord par son apparence et ensuite par ses manières sans-gêne, son penchant pour le sarcasme et son caractère froid, impitoyable et dénué de tout sentimentalisme. Il est rarement tendre avec Rhapsody et bien qu’il la respecte (à sa manière) il la voit essentiellement à travers ses compétences et comme un « soldat ».
Rhapsody quant à elle ne conçoit plus d’aimer et d’ouvrir son cœur à un homme. De son premier amour disparu à sa vie dans la rue dont certains aspects ont été particulièrement sordides, son choix se comprend aisément.
Ses rapports avec Ashe sont chaleureux et agréables, et on peut dire sans se tromper qu’elle est plutôt sous le charme du Guerrier-Rôdeur. Sa relation avec Achmed est d’apparence beaucoup moins agréable et ils passent pas mal de temps tous les deux à se donner des noms d’oiseaux et à s’affronter autour de leurs divergences d'opinions. Néanmoins pour Rhapsody, Achmed est la personne en qui elle a le plus confiance au monde. Elle le considère comme son frère : ils se disputent souvent/toujours mais il existe entre eux une compréhension mutuelle qui s'est forgée avec le temps et elle sait qu’il sera toujours là en cas de besoin même s'il n'est pas doué côté expression des sentiments.
Ce qui m’intéresse ici n’est pas spécialement de savoir si Rhapsody va finalement ouvrir son cœur à l’un des deux (ou à tout autre personne), mais plutôt sur les modalités et la caractérisation de son évolution.
Rhapsody a un problème avec les hommes dont l'une des manifestations les plus caractéristiques tourne autour du contact physique (logique). Les contacts physiques amicaux et de la vie de tous les jours ne lui posent pas de problème, ce sont certains contacts particuliers qui sont sujets à difficulté, comme par exemple si on essaie de la porter (par exemple pour traverser une rivière) : cela va déclencher chez elle une crise de rage et de violence incontrôlable.
Bref dans certains cas ses traumatismes passés remontent à la surface et pour avancer – voire pour aimer un jour quelqu’un – elle doit reconstruire son sens du contact et se réapproprier la maîtrise de son corps (un autre élément pose problème avec son corps et s’ajoute à cette question de réappropriation du corps mais inutile de trop spoiler^^).
Le contact physique est un thème important du récit et se trouve investi également chez les autres deux personnages principaux masculins.
Ashe de par sa malédiction doit restreindre ses contacts physiques au strict minimum et il souffre physiquement lorsqu’il est en contact physique très rapproché (il rêve de prendre Rhapsody dans ses bras mais il sait que cela entraînera une terrible douleur et d'autres effets néfastes).
Au contraire Achmed de par sa nature ne recherche pas particulièrement le contact physique et ressent le monde avant tout via son Kirai (sens vibratoire spécifique à sa race). Son ascendance le remmène à la Race Primordiale du Vent et complété par son mauvais caractère et son apparence « immonde », cela entraîne qu’il préfère la solitude et ne recherche jamais le contact physique des autres (les seuls contacts physiques avec Rhapsody sont pour le moment provoqués par cette dernière, par exemple en lui prenant la main, qu’Achmed retire plus ou moins rapidement).
Le triangle fonctionne ainsi sur le thème du contact physique « impossible » avec pour chacun un type de barrière particulier :
- Rhapsody : barrière psychologique
- Ashe : barrière physique
- Achmed : barrière sociale/naturelle
En un sens il est logique qu’Ashe soit le premier à manifester le signe amoureux car sa barrière est purement physique : Rhapsody doit redécouvrir l’amour tandis qu’Achmed doit le découvrir tout court.
A partir de là revenons au fil de l’intrigue car nous disposons déjà de quelques éléments pour imaginer la chute de ces barrières par son intermédiaire.
En effet la forme du dernier combat du récit est déjà plus ou moins connue. Achmed devra utiliser son arcane ultime mais cet arcane l’immobilisant, il ne pourra pas se battre en même temps. Ainsi il aura forcément besoin d’un guerrier à ses côtés aussi bien pour le protéger que pour donner le coup ultime. Ce guerrier est clairement Rhapsody.
La fin du tome 2 propose un combat qui est une matrice et un avant-goût de cet ultime combat : le duo Achmed et Rhapsody y a malheureusement échoué et ils n’ont dû leur victoire qu’un à coup de pouce du destin.
Pour le grand final il est donc impératif que le duo Achmed et Rhapsody fonctionne à l’unisson et qu’une harmonie totale s’établisse entre les deux personnages.
La modalité de ce rapprochement ne pouvant être le contact physique, elle doit donc passer par autre chose. En effet le contact physique est à mon sens l’aboutissement (la fin) de leur rapprochement et non le moyen.
La race de Rhapsody descend de la Race Primordiale du Ciel/Ether et en tant que Barde elle est sensible et manipule les sons et les mélodies. Sa technique d’épée s’appuie sur ses talents de Barde et avec leurs aides elle a développé une forme de perception guerrière proche du Kirai d’Achmed.
Le rapprochement et l’union entre Achmed et Rhapsody devraient donc se tisser sur les motifs du son et des vibrations, un contact non-physique qui devra impérativement être parfaitement harmonieux et faire comprendre à ces deux-là qu’il est possible de s’abandonner complètement à un autre.
Ainsi cela devrait apprendre à Achmed la valeur du contact avec les autres et à Rhapsody qu’il est possible de nouveau aimer.
Quant à savoir si ces deux-là finiront ensemble ou pas, c’est une autre histoire.
Voilà pour le moment ma compréhension de ces éléments à mi-chemin et je suis évidemment impatient de découvrir comment cela se déroulera.
Anna Karénine - tome 2 (1877)de
Léon TolstoïRetour donc sur les destins de Levine et d'Anna. Sans surprise on retrouve un Levine sous extase à son mariage et qui découvre ensuite doucement la réalité concrète d'un ménage. Tandis que du côté Anna, un bonheur un brin artificiel et un retour en Russie inévitable.
Bientôt le dénouement.