Titre original :
The Book with no nameAuteur :
AnonymeAnnée de parution originale :
2007Langue originale :
AnglaisAprès avoir gardé au fin fond de ma mémoire l’avis enthousiaste de Deu$ sur le bouquin, j’ai profité de sa parution en livre de poche pour en faire l’acquisition.
Sa particularité, outre un titre provocateur, est d’avoir été écrit par un auteur volontairement resté dans l’anonymat et jouant sur les rumeurs concernant son identité. Quentin Tarantino est suspecté d’avoir écrit ce bouquin à cause des références cinématographiques qui pullulent et un style très proche du western. Je suis étonné de le voir aussi régulièrement cité comme auteur potentiel, dans la mesure où les références du livre sont très populaires, là où QT cite plus volontiers des pans culturels inconnus du grand public. En revanche, il est vrai que le rythme du livre a quelque chose de très tarantinien dans l’âme, mais nous y reviendrons tout à l’heure. Pour ma part, je suis partisan de la théorie comme quoi l’auteur est un inconnu qui aime faire le buzz sur son identité, tout en prouvant son statut de bon écrivain.
-------
Santa Mondega est le fion de la Terre. Le Mal existerait qu’il éviterait soigneusement d’y mettre les pieds, de peur de se faire trouer au moindre faux pas. Ordures, raclures, fans d’Elvis, satanistes, shamanistes, barmen, psychopathes, sociopathes, assassins, voleurs, violeurs constituent l’essentiel de ce bled paumé dont il faut mieux oublier l’emplacement. La vie y suit son cours en essayant de ne pas être écourtée. Jusqu’à ce qu’arrive ce problème. Ce
putain de problème. Cinq ans après avoir massacré une bonne partie de Santa Mondega, le
Bourbon Kid est de retour, à la recherche de l’Œil de la Lune, talisman qui fait la convoitise de la moitié de la ville. L’autre moitié serre les miches et prie le Seigneur, le Malin ou n’importe quel imbécile inconscient qui voudra bien se mettre en travers de son chemin.
-------
Je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre en commençant ce livre et une pensée me traverse au moment de le refermer :
la claque.L’auteur a un style d’écriture génial : en quelques phrases, il pose son ambiance, burnée, puant la sueur, la cigarette, l’alcool et le vomi, où les protagonistes sont des masses de muscles impressionnantes et où la gâchette est facile. C’est un mélange fascinant de roman noir, d’enquête policière, de trip fantastique, de kung-fu et de western moderne, car aucun élément ne prend le dessus et tous se conjuguent pour donner au final quelque chose d’unique.
La narration est exceptionnelle : rapide et efficace, il suffit de quelques mots pour synthétiser l’essence d’une scène ou d’une action (la traduction est à ce titre remarquable), tout en offrant des descriptions démentes. Les références cinématographiques pas très subtiles permettent au moins de projeter dans l’esprit du lecteur une image nette de l’histoire sans pour autant avoir à tartiner des descriptions sur des pages et des pages.
La fluidité, la construction et le rythme de chaque chapitre, sont époustouflantes. Le premier chapitre réussit à nous accrocher dès les premiers mots et à monter en puissance malgré l’action qui se contient jusqu’au dernier instant (rythme tarantinien). L’auteur va régulièrement parvenir à reproduire ce sentiment exaltant en utilisant différents schémas narratifs qui évitent de tomber dans la lassitude malgré la répétition des évènements (combien de morts par langue arrachée racontés de manière différente ?). J’irais même jusqu’à parler de mise en scène tant la structure des phrases et des paragraphes réussit à me faire imaginer des plans de film. Les scènes d’action sont nombreuses et très claires, on ressent la position de chaque protagoniste dans l’espace et les moindres gestes de chacun et ce, avec une économie de mots sidérante qui donne un rythme soutenu et accrocheur.
La construction de l’histoire est admirable. La profusion de personnages n’empêche pas le récit d’être limpide à suivre. Les motivations, les actions de chacun sont résumées très brièvement et la cohérence de leurs actes (alors que certains pourraient paraître absurdes sans explication) renforce l’immersion dans le livre. L’histoire nous prend aux tripes dès les premiers instants, les éléments de l’intrigue arrivent au fur et à mesure mais tout s’emboîtent parfaitement, les personnages sont charismatiques, drôles, couillus (des hommes des vrais, la plupart du temps).
C’est un régal
pulp que je conseille à tout le monde. Ça se lit avec plaisir, c’est gras, crade et jouissif. Pour ne rien arranger, c’est de la bonne littérature, certainement amenée à passer à la postérité tellement c’est bien écrit.
J’en sors fan, à tel point que je ne sais pas si je vais pouvoir me contenir et attendre l’édition poche de la suite du livre.