hum hum hum...
Bon ben alors comme en gros annoncé avant le débat, et confirmé après, Sarkozy et la droite ont nettement remporté les élections. Je reviens pas sur les chiffres, on doit pourvoir les lire dans les journaux si on ne les a pas entendu hier soir, mais c'est très large, le 53% venant historiquement dans les affrontements gauche/droite après les scores de De Gaulle, et de Mitterrand (1988). Pour Royal, c'est du coup bas, mais ça ne me semble pas tant la claque redoutée les derniers jours (55/45). En plus la forte participation donne à la l'un et à l'autre une sacrée densité, l'un pour sa future action présidentielle, l'autre dans son camp malgré son maigre 47. Enfin c'est ma vision, je suis pas militant PS mais c'est vrai que je suis devenu un peu groupie de Ségolène, donc j'ai peut-être tendance à dédramatiser son score dans la perspective interne au PS. Alors je reviens sur les deux côtés vus dans cette soirée.
DROITE
Et honneur au gagnant. Pour moi, bien évidemment, sa victoire n'est pas réjouissante. Et si je ne crois pas à sa politique, j'en crains les futurs applications, car il ne faut quand même lui reconnaître cela: il mettra en place le programme qu'il a assez clairement exposé (pas d'ambiguïté là-dessus pour moi, ni sur le contenu, ni sur sa mise en pratique).
Mais son discours, à deux trois trucs prêts, je lai trouvé bon et effectivement convenu. L'histoire de la repentance ne me plait pas du tout, mais là encore pas de quoi faire les étonnés. Il l'a répété sans cesse dans sa campagne. Ca fait partie des éléments qui me font m'opposer à son projet, mais pas de surprise. A la rigueur, en plus de l'arrière-fond idéologique, on peut voir une nouvelle marque de rupture avec Chirac (grand promoteur de la question de la Mémoire, que cela concerne la Décolonisation, l'Algérie ou encore la Collaboration).
Plus précisément sur cette victoire, on peut lui attribuer, selon moi, deux grandes causes.
- D'une part la nature du candidat. C'est une bête politique, il voulait la fonction, l'a montré, l'a assumé. Son caractère il l'a affiché, avec ses côtés sympathiques, d'autres moins. On peut juger cela populiste ou démagogue, mais je répète ce que j'ai dû déjà dire, qu'un homme politique exprime colère ou empathie ne me semble pas en soi répréhensible. L'usage qui peut être fait de ces sentiments oui, mis leurs expression non. De ce point de vue là Sarkozy a proposé un changement de pratique politique. Je viens d'en dire ce que j'apprécie, mais comme c'est aussi l'un des aspects que j'ai critiqué chez lui je mentionne quand même que j'ai souvent eu le sentiment qu'il faisait usage justement de cette nature, et de son caractère inédit en politique. Les collusions politiques/pouvoirs (financiers, médiatiques ou autres) sont courantes en politique, des deux côtés. Lui les a affiché. Il n'y a pas tromperie sur la question. Mais ce n'est pas la rupture avec la nature du système me semble-t-il néanmoins. La question qui se pose est de savoir si c'est si important ou inégal dans la compétition pour le pouvoir. On est en démocratie, je n'aime pas cela mais je ne crois pas une seconde à l'idée de la dérive autoritaire du pouvoir.
- d'autre part son discours politique. Il y a eu une vraie assise idéologique au discours de Sarkozy. Cela me semble vraiment bon pour la vie démocratique justement. Je l'avais dit il y a un moment, je crois à la politique à partir du moment où elle affiche son socle de pensée. De ce point de vue c'est net, et c'est bien. Les valeurs, leurs applications, les formes qu'elles vont prendre, tout cela a été annoncé. Après le contenu évidemment me déplait. Mais quant à ce contenu et son assise, je suis quand même un peu dans l'expectative sur quelques aspects. Il y a pour moi une différence énorme entre le Sarkozy qui intervient dans les grands média ou les déclarations nationales, et celui qui s'exprime en meeting. Autant je l'ai trouvé bon et correct sur le fond aussi bien dans le débat que hier soir, autant le dernier meeting m' hérissé, avec la reprise directe des termes polémiques (karscher et racaille), et surtout avec la charge anti-68 qui me paraît en terme de contenu de discours politique complètement folle. Mais j'ai quand même bon espoir qu'il ne s'agisse là que de support électoral, et que sa pratique sera autre. Car je lui fais crédit, maintenant que son ambition est satisfaite, de l'intention de mener simplement la politique pour laquelle il a été élu, sans les oripeaux de la mise en scène qui l'a amené là. Car il faut souligner que sa victoire est celle de la droite, et d'une droite qui a réduit à néant le FN. C'est un équilibre précaire, mais on ne peut encore dire si c'est un coup de génie ou un glissement dangereux. Je table plutôt sur le premier, même si la forme adoptée ne m'a pas plu.
En tout cas les gens de gauche entrent maintenant dans la phase de comptabilité (oui parce que l'opposition on y était déjà, mais on n'a pas eu le droit à la question du bilan, merci à son inimitié avec Chirac et à sa rivalité avec Villepin...). Je râlerai fréquemment sur ce qui va se mettre en place et que je n'aime pas, mais ce pour quoi une nette majorité a voté, mais ça c'est normal et le jeu de la vie démocratique, et je dénoncerai clairement ce qui pourra apparaître des écarts, en espérant, s'ils par malheur ils interviennent, que chacun sera prêts à les reconnaître.
GAUCHE
Comme beaucoup je crois, je suis sacrément énervé par le comportement des éléphants. Il a été globalement lamentable pendant la campagne, il a été médiocre hier soir. Le PS doit se réformer, mais il doit aussi commencer par réformer ses ego (vas-y Ségo !). Alors oui Royal est certainement complètement allumée. Elle aussi est dans l’expressivité et dans la conviction. Très franchement, auprès de moi, pour obtenir ma sympathie elle partait de loin : déclaration sur les 35heures au collège, encadrement militaire, litanies sur la famille, etc. Mais petit à petit je lui ai trouvé des qualités que je juge très rares et précieuses en politique. D’une part elle encaisse magistralement. La campagne interne au PS a été ignoble et elle en est sortie grandie. Et d’autre part elle fait pété les cadres dans lesquels on la place. Elle est profondément anti-système malgré un arrière-fond idéologique que moi je juge plutôt conservateur. Pour moi il y a là un paradoxe qui me fait mieux comprendre sa place à gauche et au PS. Elle reste par ailleurs sur bien des aspects très maladroite (élocution, gestuelle), mais à la rigueur j’apprécie finalement. Ca change du rodage politique. Et ses positions ont fait successivement bouger la structure du PS, la pensée de gauche, le jeu entre personnalités politiques (Eléphants et Besson comme exemples), et le rapport des politiques aux média. De ce point de vue comment ne pas du moins la saluer sans aller la soutenir tel une midinette comme je le fais par ailleurs.
Alors en face, j’aimerai assez qu’au PS on soit un poil plus profil bas. Evidemment la guerre est déclarée pour le pouvoir, mais Royal, si elle n’a pas de réseau d’élu avait réuni 65% des militants sur son nom, a réussi en 6 mois à faire davantage bouger les lignes que DSK en 5 ans, est parvenu à porter une voix de gauche claire, humaniste et sociale sans le dogmatisme que Fabius a tenté de lui donner espérant s’appuyer sur le non au referendum et sur l’extrême gauche (quand on sait que sous Jospin il tenait une ligne « droitière »…). C’est quand même fort. Elle a réussi assez simplement là où les stratégies des uns et des autres ont échoué. Je sais pas ce que cela va donner, mais pour moi sympathisant de gauche nombre de ces politiques sont discrédités (c’est un peu fort, mais je trouve pas de terme adéquat). Y compris Hollande qui a vouloir se faire le gardien du temple PS a torpillé plusieurs fois le discours de la candidate. Mais j’ai aimé sa déclaration immédiate hier soir, le fait qu’elle adopte une position dynamique et positive, et qu’elle aille parler directement au militants. Evidement on peut le voir comme stratégique et ça l’est, mais c’est une stratégie agréable et réconfortante pour ceux qui ont voté pour elle comme moi. J’espère même pour ceux qui ont voté au second tour pour elle sans l’avoir fait au premier (à eux de le dire). Alors même si je ne partage pas toutes ses idées, même si ses postures et ses maladresse me font souvent rire, ou m’irritent, je souhaiterais qu’elle prenne plus d’espace qu’elle n’en avait au PS auparavant.
J’ai été à Charléty mardi dernier. C’était le premier meeting dans lequel j’allais de ma vie. Je n’en ai pas parlé avant pour ne pas être lourd avant le second tour. Et très franchement c’était impressionnant. Et il faut reconnaître à cette femme la capacité à faire venir autant de monde, et surtout autant de monde inattendu. La foule dans laquelle j’étais était profondément métissée, et surtout peu rompu à l’exercice meeting. Les noyaux militants qui lançaient les slogans n’étaient pas très suivis, au contraire de mouvements plus spontanés, assez drôles et bizarres. Ca m’a beaucoup plu. En tout cas Royal m’avait donné envie d’y aller, et je me suis senti bien au milieu des gens qui étaient là-bas. Ni empruntés ni obtus comme je le craignais d’abord d’un meeting politique. J’ai vu des gens à qui je n’aurai jamais parlé autrement, et le brassage des populations était vraiment réconfortant. J’avais peur de ne trouver chez les vieux que des bobos et chez les jeunes que le quartier latin (bref de faire face à un miroir), et ce fut une très très heureuse surprise. Et cette surprise j’en accorde le crédit à Ségolène Royal. Et puis pour ceux qui n’ont pas voté Sarkozy, petite satisfaction mesquine mais vous me la passerez puisque l’on n’est pas prêt d’en avoir de pareil dans les 5 années à venir, elle restera quand même comme la seule qui dans un débat publique aura explosé Sarkozy, même si cela a joué en sa défaveur politiquement. Quand la politique de Sarkozy m’énervera et me déplaira, au moins je garderai ce souvenir qui ne laisse pas de me faire sourire…
Alors pour finir, petite adresse aux jeunes du forum qui voteront pour la première fois dans 5 ans. Je vais, à présent que l’élection est passée, utiliser des arguments que je gardais en réserve de peur de susciter de vaines polémiques. Mais sachez que s’ils peuvent faire hurler, ils sont néanmoins cruciaux et décisifs pour le déroulement d’une vie. On a beaucoup parlé des différences gauche/droite, mais les principales, celles taboues, sachez qu'on les a tues jusque là. Pour vous, aujourd'hui, en ce lendemain de victoire de la droite, les voici, en espérant qu’elles vous aident pour vous choix futurs
- D’abord les gens de gauche sont globalement plus beaux. C’est un fait, indéniable, et en voici la preuve par l’image, à catégorie professionnelle équivalente.
homme de droite:
homme de gauche:
Ca me paraît net, et encore, charitable, je ne fais pas entrer femmes et enfants dans la comparaison. De là à dire qu’être de gauche rend plus beau, c’est un palier que je franchis allégrement et sans vergogne. J’avais prévenu que ça allait être honteux, et ça ne fait que commencer.
- Car corollaire de ce premier point, les gens de gauche sont sexuellement plus épanouis. La nature de ce forum, ainsi qu’une forme de décence personnelle, m’empêchent de donner des exemples précis ; vous devez donc me croire sur parole. Mais bon, hein, ayez en tête la question de 68, le visage de Steevy Boulet, et regardez les jeunes que vous voyez parler au nom des deux côtés les soirs d’élections et vous pourrez vous faire une opinion… Bien que je reconnaisse l’extrême diversité des fantasmes possibles, heureusement d’ailleurs !
Bon je m’arrête là parce que je sens que mes arguments pourraient ne pas être appréciés. Mais sachez que j’en ai d’autres en réserve (je les garde pour les législatives car je sens que j’aurai encore besoin de sortir ce genre de choses). C’était donc l’ultime message à méditer pour nos quelques jeunes du forum dont j’ai pu voir que leur cœur balançait plutôt à droite, pour ceux qui ont pris la parole. Je me devais donc d’essayer de faire pencher la balance dans l’autre sens, au prix d’arguments certes limites, mais ô combien importants.
A vot’ bon cœur m’sieurs-dam’…