Heures au format UTC + 1 heure [ Heure d’été ]




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 18 messages ]  Aller à la page [1], 2  Suivante
Auteur Message
 Sujet du message: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Sam 5 Mai 2012 14:48 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...
Image


Pirates des temps modernes
Il y a déjà eu un roi des pirates. Alors pourquoi pas une reine ? Mais que sont les pirates réellement ?




_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Dernière édition par Resha Tsubaki le Jeu 20 Sep 2012 10:45, édité 6 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Sam 5 Mai 2012 14:50 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...



    La nuit était déjà tombée depuis plusieurs heures sur la ville qui s'apaisait petit à petit. En raison de l'heure avancée, la plupart se trouvaient bien au chaud dans leur lit, alors que d'autres dansaient et ne comptaient pas s'arrêter avant les premières lueurs du jours, dans des bâtiments insonorisés d'où ils ne pouvaient pas apercevoir les étoiles qui peuplaient le ciel sombre en partie éclairé par une pleine lune lorsqu'un nuage daignait ne pas la cacher au monde, comme par jalousie.

    Les quartiers les plus aisés étaient réputés pour être les plus calmes, étant donné que les commerces ainsi que les activités nocturnes se situaient plus loin. Enfin, ce n'était qu'une idée préconçue. Il fallait prendre en compte tous les voleurs qui agissaient lorsque les lumières étaient éteintes, profitant de ce moment idéal pour subtiliser toutes sortes d'objets de valeur sans vergogne. Les policiers se devaient donc de patrouiller fréquemment, en arrêtant toute personne douteuse qui n'habitait pas dans les parages ni ne connaissait quelqu'un dans les environs.

    Ce fut ainsi qu'une course-poursuite se déclara dans les ruelles sombres du quartiers. Les forces de l'ordre ne cherchaient pas à enquêter avant de mettre les menottes ; s'ils voyaient quelqu'un flâner un peu trop au même endroit, ils concluaient immédiatement qu'il s'agissait d'un voleur potentiel. Cette théorie était toujours vraie. Sauf pour la pauvre personne qu'ils poursuivaient actuellement.

    Leur proie s'étant faufilée dans des petites rues trop étroites, les deux policiers descendirent de la voiture en prenant bien entendu soin de ne pas la laisser déverrouillée. Il pouvait s'agir d'un coup monté. C'était classique : l'un des membres de la bande attirait l'attention tandis que les autres en profitaient pour accomplir le reste du plan. C'était pour cette raison que le troisième policier retourna à l'endroit où ils l'avaient pris en chasse, afin de s'assurer qu'il ne se produise rien.

    Au même moment, la poursuivie détalait comme un lapin. Le vent avait fait tomber son chapeau de paille, qui, fort heureusement, était accroché à son cou avec une ficelle. Ses cheveux courts et noirs étaient tout-à-fait visibles, ou presque, puisqu'ils se fondaient dans l'obscurité de la nuit, notamment parce que ces ruelles n'avaient pas de lampadaires, à son avantage.

    Qu'avait-elle donc mérité pour en arriver là ? Elle se baladait avec son ami aux trois épées lorsqu'ils s'étaient séparés. Ce n'était pas de sa faute, en plus. Elle s'était juste mise à courir partout parce qu'elle ne connaissait pas cet endroit. Il n'avait qu'à la suivre, après tout. Ce n'était pourtant pas si difficile. Franchement, quel empoté, celui-là !

    Sans même comprendre pourquoi, des policiers s'étaient lancés à ses trousses. Elle n'avait rien fait de mal. Mais ces bâtiments étaient juste immenses ! Et beaux ! Et surtout impressionnants ! C'était complètement différent de la résidence où elle logeait. Dans son pays, il fallait rêver pour trouver de tels immeubles, tout simplement parce qu'il n'y en avait pas du tout, ou du moins était-ce le cas dans son village natal. C'était tout nouveau pour elle, alors que son ami avait paru totalement blasé. Tss. Il ne comprenait définitivement rien.

    « Eh, toi, là-bas, arrête-toi ! »

    La criminelle potentielle se mit à rire bien fort. Elle était en train de les semer ! En même temps, elle ne pouvait pas se permettre de se laisser prendre alors qu'elle avait encore tant de choses à accomplir. Sa vie commençait à peine et elle était encore loin d'avoir atteint son rêve, la raison pour laquelle elle était partie de chez elle.

    Puis, soudain, en tournant dans une autre rue, elle ne put que s'arrêter net lorsqu'elle s'aperçut qu'il s'agissait d'une impasse. Pas moyen de faire demi-tour, les deux policiers s'étaient déjà engagés là et avaient ralenti leur allure en s'apercevant qu'elle était coincée. Ceux-ci souriaient à présent, ravis de voir que la situation avait tourné à leur avantage, leurs pistolets pointés sur le fugitif qui les regardait sans faillir. Il leur avait donné du fil à retordre. Il fallait dire qu'il courait vite, ce gamin, alors qu'il paraissait si frêle.

    Déjà qu'ils préféreraient largement dormir à cette heure de la nuit, il fallait toujours que des petits rigolos les embêtent – et les empêchent de s'ennuyer en même temps. Il s'agissait toujours de jeunes qui s'imaginaient pouvoir cambrioler facilement toutes ces maisons et appartements de luxe alors qu'ils ne valaient rien. Il s'agissait généralement de personnes de classe moyenne, pourtant ils jureraient que la personne en face d'eux n'était qu'un pauvre.

    En effet, il portait une espèce de chemise rouge sans manche un peu trop longue, un simple bermuda, des sandales ainsi qu'un chapeau de paille. Se croyait-il à la plage ? N'avait-il pas froid ? L'hiver arrivait et les nuits se faisaient particulièrement fraîches. Même les policiers grelottaient dès qu'ils sortaient de la voiture chauffée avec leurs chemises à manches longues. Ce gamin devait être assez inconscient pour sortir dans une tenue pareille.

    Ils n'apercevaient d'ailleurs pas son visage, il avait baissé la tête et posé une main sur son chapeau qu'il avait remis. Avec l'obscurité, ils n'avaient pas pu l'apercevoir distinctement. Avec ses bras fins comme des brindilles, espérait-il les battre ? Ah ah. La bonne blague. Il ne leur paraissait pas avoir d'attitude offensive, et semblait attendre que le temps passât. Leur théorie de l'action en groupe était-elle véridique ? Était-il en train de les divertir ? Si leur collègue avait eu besoin de renfort, il les aurait appelés.

    « Toi ! Tu vas nous suivre gentiment jusqu'au commissariat ! »

    L'interpellé esquissa un grand sourire puis releva la tête, leur permettant d'apercevoir son visage souriant qui les troubla. Que mijotait-il ? Y avait-il des complices cachés, prêts à les abattre de sang froid ? Les deux policiers se regardèrent, inquiets : ils n'avaient pas envie de mourir, ils souhaitaient juste attraper les voyous, rien de plus. Ils reposèrent leur regard sur le jeune lorsqu'il se mit à rire.

    « Désolé, j'ai encore un rêve à accomplir ! »

    Sur ce, elle étendit son bras afin d'atteindre le toit du petit immeuble sous les yeux effarés des policiers qui ne pensaient pas que la situation prendrait une telle tournure. La soi-disant délinquante n'avait qu'à atteindre le haut du bâtiment où elle serait en sécurité. Il lui suffirait de sauter ensuite de toit en toit de manière à les semer pour de bon. De là-haut, elle pourrait plus facilement retrouver son ami perdu.

    « Tu as mangé un fruit du démon ! Tu es un pirate ! »

    Les policiers échangèrent un regard puis hochèrent la tête avant de se mettre à tirer sur la jeune personne. Ils n'avaient encore jamais vu un utilisateur de fruit du démon de leur vie, c'était la première fois. Il était dit que ces fruits rarissimes donnaient des pouvoirs surnaturels à celui qui l'avait mangé et que ce dernier se faisait par conséquent posséder. Le Gouvernement mondial en avait strictement interdit la consommation, les seuls à pouvoir les utiliser étaient les hauts-gradés. Les autres recevaient le statut de pirate qu'ils avaient pour ordre de tuer à vue.

    Les balles atteignirent le pirate qui se courba légèrement, toujours une main sur son chapeau et l'autre sur le toit. Ils l'avaient touché ! Ils obtiendraient à coup sûr une promotion pour avoir abattu quelqu'un qui avait mangé l'un de ces fruits interdits ! C'était tout de même assez impressionnant de voir une personne étirer ses membres. S'ils avaient attendu encore quelques secondes pour tirer, il aurait été hors de portée sur le toit et leur aurait échappé.

    Cependant, celui-ci mettait bien trop de temps pour s'écrouler par-terre. Ils s'aperçurent avec horreur et bien trop tard que les balles ne le transperçaient pas et ne faisaient que l'allonger. Avant même de pouvoir réagir, elles retournèrent vers eux avec la même puissance. Aucune ne les toucha, en revanche l'un d'entre eux tomba à genoux, ne les sentant plus. Voilà donc l'étendue du pouvoir d'un utilisateur de fruit du démon ? Leurs balles étaient-elles inefficaces ?

    L'autre policier, tremblant, porta la main à sa radio et demanda de l'aide en urgence à toutes les unités du secteur, en précisant bien l'importance de la mission, de même qu'il leur fallait apporter d'autres armes à part leurs pistolets, ou bien ils ne parviendraient jamais à le blesser. Sa voix trahissait sa nervosité ainsi que son choc, il n'aurait jamais cru être confronté à une telle situation. Allait-il les tuer avant l'arrivée des renforts ?

    « Shishishi, désolé, mais ça ne marche pas sur moi ! Je dois encore devenir la reine des pirates ! »

    Puis, dans un rire, le délinquant se laissa monter jusqu'au toit, sans laisser aux policiers l'opportunité de voir clairement son visage en raison de l'obscurité de la ruelle. Ils n'aperçurent que ses cheveux noirs ainsi que sa cicatrice sous l'œil gauche. Le policier qui tenait encore sur ses jambes pointa son pistolet sur ce pirate, sans succès. Il ne ferait qu'alerter plus de personnes résidant là et qui venaient d'être réveillées par les coups de feu.

    Les pouvoirs d'un fruit du démon étaient tout simplement terrifiants. Ils avaient été donnés par le démon lui-même, cela ne faisait aucun doute. Tant que les pirates vivraient, la paix n'existerait pas. Et qu'est-ce que ce gamin voulait dire par « reine des pirates » ? Une minute… Reine ? Il s'agissait d'une fille depuis le début ? Et qu'était une reine des pirates exactement ? Comptait-elle faire disparaître le Gouvernement mondial ? Était-elle possédée par le démon dont elle avait mangé le fruit ? Qu'étaient donc ces fruits en réalité ?

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Dernière édition par Resha Tsubaki le Sam 19 Mai 2012 21:41, édité 1 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Mar 8 Mai 2012 18:37 
15 000 000 Berrys
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 21 Mar 2012
Messages: 389
Localisation: Pourquoi cette question ?
Voilà, j'ai lu !

Alors que dire ? C'est assez ... spécial. Non pas la rédaction mais plutôt le contexte. Si j'ai bien compris, ce serait l'histoire de Luffy mais genre en féminin et avec la technologie actuelle combinée à celle de One Piece ? J'adore :Sanji amoureu: Hâte de voir ce que tu seras capable de faire avec ça !

Juste même si je trouve que la rédac est super (presque digne d'un livre, sans éxagérer), il y a quelques petits truc qui ne vont pas :

- Tes phrases sont un peu trop longues àmon goût, avec trop de virgules qui alourdissent un peu le texte (avis personel)
- A un moment, je sais plus où, je crois que tu mets : Passàt. Pourquoi ? Moi, j'aurai plutôt mis Passe, non ?

Je crois avoir oublié un truc mais je sais plus donc tant pis :Luffy hilare:

En tout cas, bravo !

_________________
Image



Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Mar 8 Mai 2012 18:48 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...
    Merci pour ton commentaire ;)
    Oui, en gros c'est ça. Mais je ne vais pas centrer la fic sur le fait que Luffy est une fille. Disons que c'est surtout un élément constitutif. Ce sera une fic très longue qui reprendra quelques points du manga, néanmoins je n'ai pas l'intention de faire la même chose qu'Oda. Ce serait terriblement ennuyeux de garder l'histoire originale en changeant simplement le sexe de Luffy ainsi que l'époque.
    Le temps que j'utilise pas mal et qui t'est peu familier est le subjonctif imparfait. Il est peu employé, c'est pour ça que ça a l'air bizarre ^^
    J'ai écrit ce prologue en septembre, et c'est vrai qu'avant j'utilisais des phrases plus longues. Je rétrécis avec le temps, mais comme quoi j'ai des restes. Désolé si ça te dérange.

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Mar 8 Mai 2012 19:04 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 24 Juin 2009
Messages: 20
J'ai lu et j'ai beaucoup aimé, ton style d'écriture passe très bien et permet une bonne immersion dans l'oeuvre.
Je trouve donc vraiment le sujet pas mal mais je pense que ce changement d'époque peut être dangereux et qu'il est difficile de le maîtriser. En effet on peut facilement tomber dans les incohérences à cause des technologie d'aujourd'hui par exemple. Mais si toutefois le sujet est bien maîtriser alors là l'effet produit sera très bon.

Concernant le prologue je pense que tu aurais du dévoiler le sexe de "Luffy" à la fin de manière à créer une chute. De cet manière le lecteur prenant le protagoniste pour Luffy serait surpris de voir que c'est une fille.

En tout cas je te souhaite une bonne continuation et compte sur moi pour lire tes prochaines fic :)


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Sam 19 Mai 2012 21:48 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...



    Le soleil venait à peine de se lever, le village était encore assoupi, préférant profiter encore de son lit, quand bien même il fallait débuter cette journée qui serait complète, comme les précédentes ainsi que les suivantes. La chaleur n'était pas encore étouffante, il fallait profiter de ces instants de fraîcheur, même si même les villageois y étaient habitués, ayant vécu ici depuis leur naissance.

    Si tous dormaient paisiblement pour au moins une bonne heure encore, l'un des habitants s'était levé très tôt afin de tout préparer. Son projet avait été planifié durant des mois, il ne restait plus qu'à faire les derniers préparatifs avant que quelqu'un l'arrêtât. C'était quelque chose qui lui était cher, dont elle rêvait depuis qu'elle était encore toute petite.

    Dès son plus jeune âge, on lui en avait parlé, lui permettant de laisser son imagination dériver à loisir. Ces histoires transmises de génération en génération l'avaient toujours fascinée, et elle comptait bien leur donner une forme réelle à présent qu'elle en avait les moyens. Nul ne l'arrêterait. Si ses proches étaient certains d'une chose, c'était qu'on ne pouvait jamais lui ôter les idées qu'elle avait dans la tête, une fois qu'elles s'y étaient bien gravées.

    Néanmoins, par précaution, elle préférait agir avant que le village ne se réveillât. Elle avait appris à être patiente, et s'était préparée durant des années, s'entraînant au combat et dégotant une bourse. Et, depuis les derniers mois, elle avait planifié son départ. Si ses voisins la voyaient, ils tenteraient de l'arrêter. Ils lui avaient sans cesse répété que ses rêves étaient futiles et qu'elle ferait bien de rester ici à se marier. Et puis quoi encore ? Elle avait dix-sept ans et entendait bien mener une vie de liberté.

    Devant le seul miroir de sa maison, elle se regardait, examinant son visage, son corps. Il s'agissait là de la dernière ligne droite, aucune erreur n'était permise. Il fallait que tout fût parfait ou bien elle se retrouverait à la case départ. Si elle souhaitait être partie avant le réveil des habitants, il lui fallait se dépêcher.

    Saisissant une paire de ciseaux, elle se mit à couper ses cheveux noirs qui lui arrivaient jusqu'aux omoplates. Les longues mèches tombèrent sur le sol sans le moindre bruit. Se refaire une petite beauté dans ce genre lui prit de nombreuses minutes, elle ne pouvait pas se permettre de faire un faux pas, pas maintenant. Elle devait vraiment donner l'illusion.

    Ses cheveux coupés très courts, comme un garçon, lui donnaient un nouveau visage. Elle ne regrettait rien, elle n'avait jamais apprécié avoir les cheveux longs, de toute façon. Sa tête lui parut bien plus légère, elle voulut rire un bon coup mais se retint, ne souhaitant pas réveiller les habitants de la maison qui étaient, elle l'espérait, encore assoupis. Se passant la main dans ses cheveux inhabituellement courts, elle s'observa encore plusieurs instants, tentant de se familiariser avec cette nouvelle apparence.

    Estimant avoir perdu assez de temps, celle-ci attrapa des bandes qu'elle avait cachées dans sa chambre durant plusieurs mois, avec l'espoir que sa grand-mère ne tomberait pas dessus, sous peine de graves conséquences. Si elle savait ce qu'elle était en train de faire… Elle ne l'avait pas mise au courant de tout, bien évidemment.

    Ôtant son vêtement de nuit, l'adolescente s'examina encore un moment avant d'enrouler les bandes autour de sa poitrine, tout en retenant sa respiration pour un meilleur effet. Elle serra de toutes ses forces, ne souhaitant pas être trahie dès ses premiers pas à l'extérieur, en lieu inconnu. L'illusion devait être absolument parfaite, elle ne s'autorisait aucune erreur.

    La nouvelle pression sur sa poitrine rendit sa respiration difficile, néanmoins elle estima qu'elle finirait par s'y habituer, puisqu'elle comptait bien porter ces bandes tous les jours, à chaque instant de la journée. Jusqu'au jour où elle accomplirait son rêve, elle devrait cacher sa féminité. Fort heureusement, elle avait une très faible poitrine, aussi fut-elle rapidement aplatie. Elle ne faisait pas partie de ces filles qui tenaient à tout prix à avoir de gros seins, elle n'en avait strictement rien à faire.

    Faisant quelques exercices de respiration, l'adolescente entreprit de s'habiller. Elle avait retrouvé de vieux vêtements de son frère qu'il avait laissés avant de partir gagner sa vie trois années plus tôt. Il s'agissait d'une chemise rouge ainsi que d'un bermuda en jean. Ils feraient l'affaire, elle se constituerait une garde-robe sur place.

    Une fois vêtue de ces vêtements assez nouveaux pour elle, Luffy se regarda une fois de plus dans le miroir. Elle n'avait jamais vraiment porté de boucles d'oreilles, malgré les plaintes de sa grand-mère qui y tenait, aussi ses trous s'étaient-ils rebouchés depuis fort longtemps et devenus en conséquence invisibles. Cela faisait une détail compromettant en moins.

    Cette nouvelle apparence la choqua. Elle ne s'était pas attendue à un tel résultat. Il lui fallut plusieurs minutes afin de comprendre qu'il s'agissait d'elle-même dans le miroir. D'un côté, elle ne s'était pas rendue compte que cela ne pouvait être personne d'autre, étant donné qu'elle était seule dans la pièce. Elle fixa ces yeux noirs qui étaient les siens puis dirigea son regard vers la cicatrice qu'elle avait depuis toute petite.

    Cela faisait maintenant dix ans que la blessure s'était refermée en laissant cette trace sous son œil. Elle se moquait bien de son physique, ce n'était pas ce qui l'intéressait. Cette cicatrice représentait un événement de son passé et prouvait qu'il avait bien eu lieu, qu'il ne s'agissait pas de son imagination. Pourtant, elle l'aurait bien voulu.

    L'adolescente soupira avant de couler un regard vers un objet qui lui était cher et dont elle ne comptait surtout pas se séparer. Il constituait son prétexte pour partir. Elle se doutait bien qu'on la croyait à moitié lorsqu'elle disait cela, pourtant il était vrai qu'elle comptait bien régler ce mystère une bonne fois pour toute, après cinq cents ans d'attente.

    Son fameux chapeau de paille. Elle en prenait soin depuis qu'elle était toute petite, plus précisément depuis qu'on le lui avait transmis. Elle le portait sans cesse et refusait toujours de s'en séparer. Elle avait toujours un pincement au cœur en songeant qu'un jour elle aurait à le rendre, alors qu'elle y portait un fort attachement affectif. Cependant, elle savait qu'elle n'avait pas le choix, c'était de même l'une des raisons pour lesquelles elle partait.

    Luffy s'empressa de le mettre sur sa tête puis de se regarder une dernière fois. Tout était prêt, elle n'avait plus qu'à partir. Elle n'avait pas envie d'assister à des scènes larmoyantes avec tout le monde, surtout qu'elle détestait les adieux et comptait bien les revoir tous bientôt, un fois qu'elle aurait accompli son rêve, et ils seraient tous fiers d'elle.

    Elle vivait dans un petit village de pêcheurs, Fuschia, sur la côte atlantique du Brésil. Un endroit perdu où elle serait incapable d'accomplir sa destinée qu'elle estimait plus prestigieuse qu'épouser un pêcheur ou un marine. Surtout qu'elle n'avait aucune intention de se marier et qu'aucun garçon ne voulait d'elle, puisqu'elle n'avait rien de féminin, et surtout pas maintenant.

    Un petit sac sur l'épaule, Luffy fila hors de la maison, un sourire aux lèvres, frémissant d'impatience à l'idée de cette aventure qui démarrait. Elle ne put se retenir plus longtemps et éclata de rire tout en se dirigeant vers une barque qu'elle avait cachée un peu plus loin dans des broussailles. Elle devait, d'une certaine façon, rejoindre la capitale. Et elle avait pensé qu'une barque serait l'idéal.

    Cependant, dans son élan, elle ne s'était pas aperçue que son rire avait attiré l'attention de plusieurs habitants qui venaient de se réveiller et l'avaient vue courir vers le fleuve. D'abord encore endormis, ils avaient mis un certain temps avant de reconnaître la personne qui avait causé tout ce vacarme. Mais comment ne pas reconnaître ce chapeau de paille ?

    « Luffy s'en va !! »



    Makino, encore assoupie, crut que cette exclamation provenait de son rêve. Elle avait travaillé tard la veille au bar étant donné qu'ils avaient eu plus de monde que d'habitude. Sa famille s'en occupait depuis des générations, ils étaient très aimés dans le village. Il n'allait pas sans dire que Makino était au courant des moindres rumeurs, dans la mesure où elle se trouvait toujours au centre des échanges.

    Âgée de vingt-cinq ans, elle avait toujours su que Luffy ne tenait pas en place. Elle s'était attachée à cette gamine qui était en quelque sorte devenue sa petite-sœur. Ou peut-être son petit-frère, elle ne savait pas trop. Ce qui était certain, c'était qu'elle occupait le rôle de grande-sœur, cherchant à la protéger, la réprimandant en cas de besoin. Bien entendu, elle était restée attentive à ses moindres soucis.

    Il n'était pas rare de voir la brune débarquer au bar pendant qu'elle nettoyait les verres, en train de raconter sa journée, son entraînement pour plus tard partir du village dans le but de devenir le seigneur des pirates. Au début, cela l'avait étonnée. Quel intérêt y trouvait-elle ? D'où avait-elle bien pu tirer une telle idée ? Et, surtout, qu'était un seigneur des pirates ?

    Quiconque mangeait un fruit du démon se retrouvait immédiatement considéré comme un pirate aux yeux du Gouvernement mondial, nul ne l'ignorait. Leur utilisation était interdite, seuls les hauts-gradés de la Justice y avaient droit. Néanmoins, un marché noir existait et parvenait à en transmettre à certaines personnes, qui devenaient automatiquement des ennemis du monde. En effet, d'après leur nom, un démon résiderait dans chaque fruit. Si une personne ne faisant pas partie de la Justice en avalait un, elle ne résisterait pas au démon et se retournerait contre eux.

    C'était ce que tous croyaient dur comme fer, ce que le Gouvernement mondial répétait depuis des centaines d'années. Cependant, Makino avait bien des raisons de douter. Un soir, en revenant de son entraînement quotidien, Luffy était bien évidemment passée au bar et lui avait parlé de ce fruit à l'allure étrange ainsi qu'au goût immonde. Quelques jours plus tard, elle était revenue la voir, affolée de voir ses bras s'allonger.

    Le village n'avait pas tardé à l'apprendre. D'abord horrifiés d'avoir un hors-la-loi parmi eux, ils avaient fini par se rendre compte que cette enfant n'avait pas du tout changé, si ce n'était pour ses capacités physiques. Elle restait cette gamine naïve et impressionnable, on ne notait aucune trace de mal en elle. En réalité, elle était tellement normale que cela les terrifiait. Comment cela était-il possible ?

    Malheureusement, les effets étaient irréversibles. Maintenant qu'elle avait avalé ce fruit, Luffy ne pourrait plus jamais être « normale ». Malgré sa stupidité qui ne s'arrangeait pas avec l'âge, les villageois étaient attachés à elle, et refusaient de voir des marines l'emporter pour l'exécuter. Elle n'avait que sept ans, voyons ! Elle n'avait commis aucun crime !

    Ils avaient longuement réfléchi, puis avaient décidé d'avoir une discussion sérieuse avec la petite fille, en compagnie de tous les habitants de Fuschia. Ils parvinrent à lui faire promettre de ne jamais montrer ses pouvoirs à qui que ce fût, lui faisant bien comprendre les conséquences : il suffisait d'un témoin étranger au village, et sa tête serait coupée avant qu'elle s'en rendît compte. L'idée de mourir l'inquiéta, aussi jura-t-elle de garder sa condition secrète. De leur côté, chaque villageois fit le serment de ne jamais l'évoquer.

    Dès ce jour, le sujet ne fut plus jamais abordé, sauf entre Luffy et Makino, si bien qu'on aurait cru qu'il avait été oublié. Elle ne cessait pourtant de clamer haut et fort son désir de prendre la mer et de voyager, tout en accomplissant son devoir familial, afin de devenir le seigneur des pirates. Tous avaient été bluffés d'apprendre qu'elle était parvenue à dégoter une bourse pour étudier à l'étranger. Elle, étudier ? C'était une plaisanterie.

    Pourtant, il s'avérait qu'il s'agissait là de la vérité. À peine un mois plus tôt, Luffy leur avait annoncé la nouvelle avec un grand sourire. Son grand-père avait dû tricher, imaginer qu'elle eût réussi ses examens était tout-à-fait impensable. C'était à peine si elle savait lire, quand bien même elle maîtrisait parfaitement plusieurs langues, dont le portugais. Son grand-père avait tenu à ce qu'elle pût communiquer avec plusieurs pays où elle risquerait de voyager.

    De plus, apprendre qu'elle partirait étudier en France les avait surpris. Pourquoi là-bas ? Pourquoi aussi loin ? En plus du portugais, elle savait certes parler français, mais pourquoi ce pays-là ? Celle-ci ne leur avait rien répondu, mis à part qu'elle souhaitait devenir un détective. Si on considérait son prétexte pour partir, cela paraissait évident. Mais en quoi cela l'aiderait-elle à devenir le « seigneur des pirates » ?

    Plus Makino réfléchissait, moins elle comprenait. Elle avait pensé que Luffy leur dirait au moins au revoir et ne s'enfuirait pas comme une voleuse. Qui saurait quand ils se reverraient, tous ? Elle allait lui manquer. Aussi, lorsqu'elle réalisa qu'il ne s'agissait pas d'un rêve, sauta-t-elle hors de son lit afin de s'apercevoir qu'une silhouette fuyait vers le fleuve. Ce qui la choqua surtout fut les habits de garçon ainsi que l'absence de cheveux noirs flottant derrière elle.

    En dépit de sa surprise, la tenancière ne put s'empêcher d'esquisser un petit sourire. Ainsi, c'était le chemin qu'elle avait décidé d'emprunter. Tenter de la retenir ne servirait à rien, dès qu'elle avait une idée en tête elle ne pouvait que l'accomplir. Les villageois en étaient parfaitement conscients, toutefois cela ne les empêchait pas de la poursuivre, lui hurlant de revenir.

    Parmi ces voix, on distinguait très clairement son rire, signe qu'elle ne prenait pas la situation au sérieux, comme d'habitude. Elle était heureuse et à la fois triste. Cette enfant était vraiment attachante, elle allait lui manquer. Néanmoins, elle se sentait joyeuse à l'idée qu'elle allait accomplir son rêve. Tandis que les villageois continuaient de courir derrière la fugitive, Makino éclata de rire.

    « Bonne chance, Luffy ! »



    « Hum… Et comment je vais à Brasília maintenant ? »

    Assise sur la barque, les jambes et les bras croisés, Luffy pencha la tête d'un côté, en pleine réflexion. Elle avait pensé qu'il suffisait de se laisser emporter par le fleuve. Après tout, on pouvait aller très loin en suivant le cours de l'eau. Pourtant, elle se retrouvait à présent dans un lac. Ce n'était pas logique.

    « J'aurais peut-être dû aller dans l'autre sens… »

    Levant les poings en l'air comme signe de léger énervement, l'adolescente scruta ensuite le rivage, à la recherche d'un endroit où elle pourrait se renseigner. Cela faisait une demi-journée qu'elle était partie, et toutes ses réserves de nourriture étaient épuisées. Il valait mieux trouver de quoi manger rapidement, ou elle ne survivrait pas jusqu'au soir. Déjà, elle commençait à avoir faim. Elle ne serait pas contre un bon morceau de viande… Elle sentait ses forces la quitter.

    Tout en maugréant, Luffy aperçut tout d'un coup des personnes en train de manger sur le rivage. Quelle chance ! Ne souhaitant pas gâcher cette opportunité, elle commença à ramer avec ses mains – elle n'avait pas pensé à prendre de rames -, attirée par l'odeur appétissante de la nourriture qu'elle pouvait sentir à plusieurs kilomètres. Déjà, elle s'imaginait en train de se remplir la panse.

    Si elle avait pu, elle aurait volontiers nagé, cependant son corps en caoutchouc l'en empêchait. Elle avait failli se noyer peu de temps après qu'elle avait mangé le fruit du caoutchoutier, et avait compris la leçon. Enfin, presque. Parfois, il faisait si chaud qu'elle avait envie de se rafraîchir un peu… Même si ce n'était pas de l'eau de mer, c'était aussi dangereux.

    Avant qu'elle atteignît le bord, les personnes qui avaient à présent fini de manger s'éclipsèrent, en laissant l'un d'entre eux qui était resté à l'écart pour ranger. Luffy ne perdit cependant pas espoir, il restait peut-être une grosse cuisse de bœuf ! Que c'était bon, la viande… Cette idée qu'elle estimait réelle la motivait suffisamment pour accélérer.

    Toutefois, à force de se pencher, l'adolescente sentit la barque commencer à retourner, à son grand malheur. Il fallait aller encore plus vite, sinon elle allait tomber dans l'eau ! Tout du moins était-ce ce qu'elle pensait. Or, ses calculs étaient rarement justes, aussi sa barque chavira-t-elle et se sentit-elle couler au fond de l'eau, à son grand malheur. Comment allait-elle rejoindre le bord de cette façon ? Elle se sentait horriblement faible tout d'un coup. Elle était si proche du rivage…

    À sa grande surprise, l'adolescente sentit tout d'un coup un bras autour de sa taille. Était-ce un monstre des mers qui voulait la manger ? Mais elle se trouvait dans un lac ! Enfin, en tout cas, l'eau n'était pas salée, de plus il n'y avait aucune vague. C'était donc un lac, n'est-ce pas ? Incapable d'ouvrir les yeux, elle se sentit transportée jusqu'à la surface où elle prit une grande bouffée d'air qui lui avait terriblement manqué.

    Après avoir toussé à quelques reprises, Luffy tourna la tête puis aperçut un garçon un peu plus petit qu'elle, et certainement plus jeune de deux ou trois ans, qui remettait ses lunettes et la regardait d'un air inquiet. La noyée le remercia puis remit en place son chapeau de paille qui était resté accroché grâce à une ficelle. Pour rien au monde elle ne le perdrait.

    « Qu'est-ce que tu fais ici ? Tu ne sais pas que c'est le repaire de Lady Arbyda, à la tête des pires bandits de la région ?
    - Jamais entendu parler. »

    Le gamin aux cheveux roses écarquilla les yeux. Comment n'avait-il jamais pu en entendre parler ? Elle sévissait partout, laissant entendre son nom. D'où sortait-il ? Ne ressentait-il aucune peur à l'idée que des brigands habitaient dans les environs ? À la place, l'inconnu lui demanda s'il avait de quoi manger. Coby hésita quelques instants, puis lui donna un petit morceau de viande qu'il avait réussi à subtiliser pour lui-même.

    « Mon seul vrai repas depuis des semaines… »

    Malheureusement, Luffy avait déjà avalé ce qu'il lui avait donné lorsqu'elle l'entendit se lamenter. Qu'entendait-il par son seul vrai repas ? Aurait-il gardé ce morceau pour lui-même ? Pourtant, elle avait aperçu de nombreux mets depuis sa barque, ce n'était pas normal qu'il ne pût aussi en profiter.

    « Où est le problème ? Il y avait plein à manger tout à l'heure, tu n'avais qu'à te servir ! »

    Coby fut étonné de la réaction de ce jeune garçon qui, contrairement à lui, débordait d'assurance. Il ne savait pas pourquoi, néanmoins il avait le sentiment qu'il pouvait lui faire confiance. Qu'il pouvait tout lui raconter, comme s'il n'avait rien à craindre. Il vivait dans la peur et la soumission depuis plus de deux ans, si bien qu'il avait depuis longtemps oublié ce à quoi ressemblait la liberté qu'il désirait toujours autant. Il avait renoncé à se battre. Pourtant, en voyant cet adolescent insouciant, il comprenait tout ce qu'il avait raté.

    « Je m'appelle Coby. En fait, ces bandits ont attaqué mon village il y a deux ans et ont tué mes parents. Depuis, je suis leur homme à tout faire, c'est ma seule garantie de survie… »

    Luffy pencha la tête sur le côté en regardant ce Coby d'un air vide. Ah, maintenant qu'elle y songeait, elle avait bien vu une personne à l'écart du groupe qui s'empiffrait. S'agissait-il de lui ? Il fallait dire qu'elle n'y avait pas non plus fait très attention. Il avait l'air totalement malheureux, les larmes lui montaient aux yeux et il peinait à les retenir.

    « Mais, depuis tout petit, je veux rejoindre la Marine du Gouvernement mondial. »

    À cette révélation, la jeune fille haussa un sourcil. Jusque là, elle n'avait jamais rencontré un membre du Gouvernement mondial, à l'exception d'une certaine personne. Elle ne considérait pas la Marine comme son ennemi, malgré ses capacités surnaturelles. En vérité, elle s'en moquait bien. Elle n'avait jamais utilisé ses pouvoirs en public parce qu'elle en avait fait la promesse, c'était tout. Ce n'était pas comme si elle avait peur ou quoi que ce fût. Un pirate n'avait peur de rien. Comment pourrait-elle devenir le seigneur des pirates si elle était effrayée par ces gens ?

    « Bah pourquoi tu n'y vas pas, alors ? »

    À sa question, Coby se crispa et le regarda d'un air empli de rage et de frustration. Il serra les poings, à genoux sur le sol.

    « Tu ne comprends rien ! Si j'avais pu, je l'aurais fait depuis longtemps ! Mais je suis prisonnier ici, si je m'échappe, ils me tueront !
    - Tu n'as jamais essayé. Et si tu as un rêve, il faut tout faire pour le réaliser. Moi, par exemple, je veux devenir le seigneur des pirates ! Si ça me coûte la vie, alors c'est mon destin. »

    À peine Coby eut-il entendu ces mots qu'il le regarda d'un air effaré, incapable de prononcer le moindre mot. Sa voix se coinçait dans sa gorge, il était tellement surpris qu'il ne savait pas comment réagir. Luffy, de son côté, souriait à pleines dents en ricanant, sa bonne humeur ne la quittant jamais. Maintenant qu'elle ne vivait plus au village, elle pouvait agir comme bon lui semblait, elle estimait que sa promesse n'était plus valable. Après tout, elle ne les mettrait pas en danger en se dévoilant.

    Elle ne comprenait tout de même pas pourquoi ce garçon n'avait jamais essayé d'accomplir son rêve. S'il y tenait à ce point, il serait prêt à mettre sa vie en jeu, comme elle. Elle estimait que c'était un risque équitable pour ce qu'elle comptait atteindre. Sa route serait pleine d'obstacles, beaucoup s'opposeraient à son rêve, pourtant elle le réaliserait. Il lui manquait juste des alliés, des compagnons. Elle ne pouvait pas atteindre ce titre toute seule.

    Bien que surpris, Coby finit par rassembler ses esprits puis regarder ce garçon d'un air sérieux. Quel genre d'idiot était-il ? Le seigneur des pirates ? Quelle bêtise allait-il encore sortir ? Sa stupidité le dépassait totalement, pourtant son assurance le déstabilisait. Il semblait y croire si fort, comme s'il était persuadé qu'il y parviendrait. Comme si la volonté suffisait. Et lui, possédait-il cette volonté d'aller à l'encontre d'Arbyda afin de se libérer de son emprise ?

    Même s'il s'opposait à cette femme, ses subalternes le découperaient en morceaux. Contrairement à cet inconnu, il avait peur de la mort. Même si sa vie semblait misérable, il n'avait pas envie de mourir en se disant qu'il aurait pu devenir un marine capable d'arrêter des bandits telle qu'Arbyda. En fait, il avait peur de regretter, mais aussi d'oser en même temps. Avant d'avoir l'occasion de répliquer, une grosse voix résonna derrière les arbres d'un air autoritaire.

    « Coby, ne me dis pas que tu n'as pas fini de débarrasser ! Va me chercher mon thé ! »

    En l'entendant, Coby se tendit. Cet inconnu avait-il été repéré ? Si elle le voyait, elle le massacrerait ! Il refusait de voir de nouvelles personnes mourir sous ses yeux, comme ce qui s'était produit ce jour-là. Ses parents avaient tenté de le protéger, or ils avaient péri. À l'époque, il n'avait que douze ans. Il avait sangloté, juré qu'il ferait n'importe quoi pour elle, pourvu qu'elle l'épargnât. Cela l'avait intéressée et il s'était retrouvé à son service.

    Avec ses mains, il tenta de faire signe à l'adolescent au chapeau de paille de s'en aller, toutefois celui-ci hocha la tête d'un air interrogateur. Cet abruti ne comprenait pas ce qu'il tentait de lui dire ! Il lui sauvait la vie, enfin ! S'il ne s'éclipsait pas tout de suite, il se ferait tuer ! Des bruits de pas se firent entendre, et bientôt une grosse femme entourée de plusieurs hommes armés surgirent de la petite forêt. À leur vue, Coby mit les mains sur la tête, apeuré, tandis que Luffy les regardait.

    « Eh, Coby, c'est qui cette grosse dinde ? »

    À sa question, tout le monde laissa s'échapper un petit cri de surprise et d'inquiétude. L'inconscient ! N'avait-il pas vu la massue recouverte de piquants qu'elle tenait entre ses mains ? Cette femme était la plus redoutable des environs ! À en juger à quel point il était frêle, ce gamin sorti de nulle part ne ferait pas long feu. C'était inutile de supplier son pardon, elle ne le lui accorderait jamais.

    « Coby, puis-je savoir ce que tu fais ? »

    Sa grosse voix autoritaire le figea sur place. Que faire ? À qui devait-il répondre ? S'il choisissait l'adolescent, Arbyda les tuerait. S'il la choisissait, elle le tuerait. Dans les deux cas, il y aurait au moins un mort. Il refusait de voir à nouveau quelqu'un mourir devant lui, cependant il n'avait pas envie non plus de se sacrifier. Cela paraissait égoïste, pourtant il se retrouvait à présent coincé. Cet adolescent se ferait de toute manière découper en morceaux pour ce qu'il venait de dire, alors il pouvait tenter de survivre.

    Au moment où il s'apprêta à répondre à Lady Arbyda, il repensa à ce que ce jeune garçon lui avait dit quelques minutes plus tôt sur les rêves. Pouvait-il devenir un marine s'il continuait à se comporter de manière aussi lâche ? Un membre du Gouvernement mondial se devait de défendre les plus faibles, de s'opposer aux plus forts. Même si cela leur coûtait leur vie. Ils vivaient pour la Justice.

    À cette pensée, sa décision fut prise. Coby serra les poings puis regarda celle qui était responsable de la mort de ses parents puis qui l'avait exploité dans les yeux. Il ne la laisserait pas continuer, il se battrait pour son rêve. Il refusait d'avoir plus de regrets qu'il n'en avait déjà. Il en avait accumulé suffisamment durant ces deux dernières années.

    « Cette femme… Est un gros monstre qui ne pense qu'à elle ! »

    Coby avait hurlé ses paroles, comme s'il donnait libre cours à la colère qu'il avait accumulée durant tout ce temps. Sous le choc, le groupe de bandits ne put réagir, ne s'étant jamais douté que ce gamin aussi soumis oserait un jour aller à l'encontre de leur effrayant chef qui ne reçut pas cette déclaration avec grand plaisir. Le silence fut brisé par le rire de Luffy dont tout le monde avait oublié l'existence en l'espace de quelques instants.

    « Comment oses-tu… Je vais te montrer de quoi est capable ce monstre ! »

    Coby commença à hurler, ferma les yeux puis mit ses mains sur sa tête en guise de protection, attendant le coup de massue piquante. Ça y est, il allait mourir. Il n'avait que quatorze ans, et sa vie touchait déjà à sa fin. Il allait revoir ses parents qui lui manquaient terriblement. Ce n'était pas si mal…

    Je me suis battu pour mon rêve, je me suis battu pour mon rêve, je me suis battu pour mon rêve…

    Cependant, le coup de grâce n'arriva pas. Lady Arbyda n'était pourtant jamais longue à attaquer. Ouvrant lentement un œil, Coby remarqua que l'adolescent se tenait juste devant lui. Il écarquilla les yeux en remarquant qu'il avait reçu le coup de massue à sa place. Un innocent s'était sacrifié pour lui. Il était responsable de sa mort. Non, ce n'était pas possible… Il ne put retenir un cri et tomba à terre, horrifié. Il le fut encore plus lorsqu'il remarqua que ce garçon bougeait encore et ricanait.
    «
    Ça picote un peu. »

    Luffy se dégagea de l'endroit où elle se trouvait puis jeta un coup d'œil au garçon aux cheveux roses avec un grand sourire. Elle l'avait protégé car il s'était battu pour son rêve, même s'il était conscient qu'il ne faisait pas le poids face à cette femme. Il pouvait en être fier, peu étaient capables de mettre leur vie en jeu, et il venait de le faire.

    Lady Arbyda, perplexe en voyant que sa massue n'avait eu aucun effet, donna l'ordre de tirer, refusant de laisser cet insolent garçon s'en tirer vivant. Comment osait-il l'appeler de la sorte, alors qu'elle était la beauté même ? Elle ne le laisserait pas la déshonorer. Elle regarda avec satisfaction les balles l'atteindre tandis que Coby criait. Il serait le prochain, inutile d'être jaloux.

    « Dommage, mais ça ne marche pas ! »

    Les balles rebondirent puis touchèrent quelques bandits, pétrifiant les autres à la suite de ce spectacle. Qu'était ce garçon ? Comment avait-il pu leur renvoyer les balles ? Pourquoi n'était-il pas blessé ? Était-ce… Impossible…

    « Je vois, tu as mangé un fruit du démon…
    - Q… Qui es-tu ? »

    Coby avait parlé d'une petite voix, se demandant si ses yeux ne l'avait pas trahi. Jamais jusqu'à maintenant il n'avait vu quelqu'un d'aussi… Invincible. C'était le mot. Et fort. Il n'avait pas hésité à aller à l'encontre d'Arbyda, quand bien même cela pouvait aussi être dû à sa stupidité. Son courage rayonnait, il n'avait absolument peur de rien.

    « Je suis Luffy, un pirate ! »

    De nouveau pris de court, Coby ne put réagir. Ce garçon à l'air si sympathique n'était en réalité qu'un pirate sanguinaire qui ne valait pas mieux que Lady Arbyda, et était même pire encore. Il avait passé un pacte avec le Démon en mangeant l'un de ses fruits. Son attitude naïve et déterminée n'était en réalité qu'une façade. Il avait été trahi. Et dire qu'il avait souhaité le protéger...

    Les hors-la-loi régnaient partout dans le monde, il s'en rendait bien compte à présent. Son vœu de devenir un marine s'en retrouva renforcé. Il ne pouvait pas mourir maintenant. Il devait encore se débarrasser de la vermine qui polluait ce monde. Voilà en quoi consisterait sa mission jusqu'à son dernier souffle. Il entendait bien faire régner la Justice partout, afin que tous pussent vivre heureux.

    La scène passa bien trop vite devant ses yeux. Lorsqu'il les reposa sur les hors-la-loi, il vit Lady Arbyda à terre, manifestement après avoir reçu un coup de poing dans la joue. Ses subalternes, sous le choc, ne surent comment réagir, puis tentèrent de s'enfuir, jusqu'à ce que Luffy en rattrapa deux d'entre eux à l'aide de ses bras en les regardant d'un air dur.

    « Emmenez-nous jusqu'à la capitale. Coby veut devenir un marine et j'ai un avion à prendre. »

    Trop terrorisés, les deux hommes hochèrent lentement la tête en tremblant puis furent relâchés. Le garçon aux cheveux roses, de son côté, ne cessait d'être surpris. Ce... Pirate allait l'aider à devenir un marine ? Il allait réellement l'emmener jusqu'à Brasília ? Il avait l'air si sérieux qu'il ne parvenait pas à s'imaginer qu'il plaisantait ou bien cherchait à le tromper. Comment ce délinquant pouvait-il être aussi gentil et dévoué ?

    Rencontrerait-il de pareilles gens sur son chemin de marine ? Des criminels qui en combattaient d'autres ? Cela ne ressemblait pas du tout à ce qu'un malfaiteur ferait. Pourtant, Luffy en était réellement un, dans la mesure où il avait commis le crime de manger un fruit du démon. Où avait-il bien pu en trouver un, d'ailleurs ? Leur vente était strictement prohibée et contrôlée, de plus on ne savait même pas d'où ils provenaient : s'agissait-il réellement d'un arbre ? Ou bien était-ce l’œuvre d'un démon ?

    S'il gravissait les échelons de la Marine, serait-il amené à en manger un ? Seuls les défenseurs de la Justice y étaient autorisés. Il s'agissait d'ailleurs de la première fois que Coby assistait à un spectacle de l'un de ces pouvoirs. C'était tout bonnement impressionnant, imaginer son corps s'étendre de cette manière. Étant donné que ce fruit-là avait été mangé, nul autre ne profiterait de ce pouvoir d'élasticité.

    Le but ultime de Coby était en réalité de devenir amiral. Il n'existait que trois postes, néanmoins il entendait bien s'emparer de l'un d'entre eux. Un amiral était l'une des personnes les plus puissantes au monde, de cette manière il parviendrait à faire régner la Justice. Il s'assurerait qu'aucun enfant ne subisse ce qu'il avait vécu durant deux années. Voir ses parents mourir sous ses yeux puis devoir travailler pour leurs assassins était ce qu'il y avait de pire.

    Comment réagirait-il si son chemin croisait à nouveau celui de Luffy une fois devenu marine ? Il avait une énorme dette à payer puisqu'il l'avait sauvé. Le laisserait-il partir ou bien oserait-il le capturer, si seulement il en était capable ? En effet, sous ce corps frêle se cachait une puissance phénoménale. La preuve, il s'était débarrassé d'Arbyda d'un seul coup de poing et sans même broncher. À présent, ses subalternes n'osaient pas le contrarier.

    L'un d'entre eux apporta une grosse moto, celle de leur chef qui gisait, inconsciente, sur le sol. Elle les tuerait une fois réveillée, néanmoins cela prouvait que Luffy leur faisait encore plus peur. Celle-ci regarda ce moyen de transport avec des étoiles dans les yeux. Elle avait rarement vu de moto dans son village, tout se faisait à pied. Elle monta dessus, essaya de la démarrer puis tomba sur le sol. Ce n'était pas facile à conduire...

    Les bandits n'osèrent pas rire, craignant des représailles. Coby s'approcha doucement, puis examina l'engin. On lui avait appris à conduire, déjà. Il suffisait juste de se réhabituer et...

    Luffy, remarquant que le garçon pouvait servir de conducteur, le mit sur la moto en lui demandant de démarrer, enjouée. Elle avait hâte, elle se demandait ce que cela faisait de se trouver sur une moto à pleine vitesse. Coby, pris de court, hocha doucement la tête puis mit le véhicule en marche, prêt à filer loin de cet endroit rempli de mauvais souvenirs...



    ____

    Merci pour vos commentaires, j'en tiens compte.

    Le fait que l'intrigue se déroule en France vous dérange sans doute. Sachez que j'ai énormément hésité, ce n'était pas mon intention au départ. Je ne voulais déjà pas faire les États-Unis (il n'y a pas qu'eux dans le monde, vous savez ?) et j'avais besoin de l'Europe pour des raisons géographiques. Le Japon se situait en conséquence bien trop loin. Finalement, j'ai choisi la France, qui reçoit énormément d'étudiants étrangers. De plus, je connais mieux le système. Je tâcherai de ne pas vous décevoir.

    Concernant le sexe de Luffy, rassurez-vous, je n'ai pas l'intention de faire du cliché ni de concentrer ma fic dessus. Ce n'est pas une histoire pour les adolescentes bourrées d'hormones. D'ailleurs, on peut voir sur tous les fanarts ou fanfics avec une Luffy fille que cette dernière a une poitrine énorme. Faut pas exagérer non plus. Personnellement, je l'imagine plutôt plate. Vous savez, si vous regardez autour de vous, vous remarquerez que toutes les filles ne portent pas du 100F. Faut arrêter cette fixation sur les grosses poitrines.

    Malgré le manque d'originalité de ce chapitre, j'espère que vous l'avez lu. J'aimerais faire comme dans le manga : débuter doucement et gentiment pour finalement découvrir qu'il y a beaucoup de choses en-dessous de la surface. Dans le prochain chapitre entrera en scène un certain épéiste et l'histoire va commencer à devenir personnelle.

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Dim 20 Mai 2012 18:59 
1 000 Berrys
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 02 Mar 2012
Messages: 28
Localisation: Derrière toi.... BOUH !!
Ouah !!!
J'adore ta fic, originale, j’espère en effet qu'elle ne soit pas basée sur le fait que luffy soit une fille
et j'ai hâte de voir les autres membres d’équipage. Seront-ils les mêmes que dans le manga ?
Vivement le suite !!!

_________________
Personne ne prêche mieux que la fourmi, et elle ne parle pas. »
Benjamin Franklin

« La taille ne fait pas tout. La baleine est en voie d’extinction alors que la fourmi se porte bien. »
Bill Vaughan

« Une armée de fourmis peut triompher d’un serpent venimeux. »
Vient de chine

« Les rois peuvent voir tomber leur palais, les fourmis auront toujours leur demeure. »
Eugénie de Guérin

Bref.
J'aime les fourmis...


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Dim 20 Mai 2012 19:04 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...
    Rassure-toi, la fic n'est absolument pas basée sur le sexe de Luffy. Ce n'est qu'un détail, même si dans ces deux chapitres ça a eu une place assez importante. Ça n'en aura plus à partir du prochain chapitre et pendant très longtemps.

    Comme je l'ai dit à la fin de mon précédent message, Zoro entrera en scène juste après =) C'est là que mon histoire va commencer à s'éloigner du manga.

    En tout cas, merci beaucoup pour ton commentaire.

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Ven 15 Juin 2012 19:14 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...



    Une foule interminable de gens défilait dans ces couloirs souterrains. En occupant le poste d'observateur, on se rendait bien compte que cet afflux d'êtres vivants ne cessait pas la moindre seconde afin de laisser le sol souffler un peu. C'en était presque triste pour lui. Le stress, l'angoisse, la fatigue, l'énervement étaient maîtres de ce lieu. Les personnes se bousculaient, accentuaient leur mauvaise humeur.

    Adossé contre un mur, un homme regardait ce spectacle, pensif. Ces humains blasés par ce défilé étaient focalisés sur leur seul intérêt : rentrer chez soi, en ignorant les autres, même les pauvres musiciens qui peinaient à se faire entendre dans ce vacarme dans le but de gagner quelques pièces qui leur permettraient de manger ce soir.

    Si nul ne l'avait pas encore bousculé, c'était pour une raison bien précise : ils l'évitaient inconsciemment. Leur instinct de survie leur indiquait que, s'ils souhaitaient rentrer tranquillement dans leur logis, mieux valait ne pas se frotter à cet homme à l'accoutrement étrange. Il dégageait une telle aura meurtrière que même la pire des racailles fuyait la queue entre les jambes.

    Les bras croisés, l'homme semblait attendre que le temps passe, tout simplement. Il n'avait nulle part en particulier où aller, ou plutôt il n'avait aucune idée d'où il se trouvait. Par hasard, il avait pris n'importe quel métro, persuadé qu'il s'agissait du bon, puis s'était endormi. Lorsqu'il s'était réveillé, des policiers l'avaient entouré et il avait dû s'éclipser s'il n'avait pas envie de se faire arrêter. Dans cette foule, il ne risquait rien.

    Il soupira tout en se frottant la nuque. Il aurait cent fois préféré rester au Japon, à la recherche de cet homme. Cependant, son maître lui avait ordonné de voyager loin, car il ne s'était pas encore trouvé lui-même. Se trouver soi-même… Il s'agissait là d'une notion qui lui échappait. Néanmoins, il savait parfaitement ce qu'il devait faire : retrouver cet homme et lui faire payer pour ses crimes.

    Zoro était arrivé en France, seul pays dont il connaissait la langue, un mois plus tôt. S'il savait parler français, c'était là tout ce qu'il connaissait de cet endroit. Cette culture différente de la sienne le repoussait. Il n'avait pas envie de s'adapter et d'oublier ce que ses parents ainsi que son maître lui avaient appris. Il trouvait les gens égoïstes et était sans cesse poursuivi par la police.

    Jetant un coup d'œil à ses trois sabres, il soupira une nouvelle fois. Il ne faisait pourtant rien de mal. Son seul crime était de les porter à sa ceinture, ce n'était pas comme s'il avait l'intention d'attaquer des passants ou bien de braquer des banques. Mais ils ne voulaient rien entendre. Zoro refusait de leur donner ces sabres qui lui étaient chers, ou du moins l'un d'entre eux, juste parce qu'ils le lui ordonnaient. Les assommer restait toujours son seul choix puisqu'ils n'écoutaient jamais. Ce n'était pas comme si c'était de sa faute.

    Des gens possédaient des pistolets, alors pourquoi n'était-il pas autorisé à avoir ses sabres ? C'étaient des armes nobles, alors que les pistolets n'étaient que des armes lâches, qui ne touchaient l'ennemi que de loin, sans sentir sa douleur. Bien sûr que c'était plus facile de se battre avec une arme à feu, il s'agissait de l'arme du faible incapable de suivre un entraînement physique afin de combattre au corps à corps.

    De cette façon, un épéiste recevait une plus grande fierté qu'un tireur d'élite. Il mettait sa vie en danger alors que l'autre restait à l'écart des moindres risques. Il était sûr que tous préféraient se battre sans se salir les mains. Néanmoins, les plus valeureux osaient aller au devant du danger et regarder la mort en face sans faillir.

    Zoro connaissait aussi une autre catégorie de lâches. Les pirates, ou plus précisément les utilisateurs de fruit du démon. Ceux-ci abusaient toujours de leurs pouvoirs qui leur donnaient un avantage sur leur adversaire. Souvent, ils pouvaient ôter la vie d'un individu en claquant des doigts. Aucun effort pour se battre. C'était totalement injuste. Même les plus entraînés avaient un taux élevé de défaite face à l'un de ces pirates.

    Bien entendu, cela dépendait du pouvoir obtenu. Certains étaient moins avantageux, alors que d'autres ne laissaient aucune chance de réussite. À cette pensée, Zoro serra Wadô Ichimonji, le katana qu'il mettait habituellement dans sa bouche, dans sa main. Depuis plusieurs années, depuis cet incident, plus précisément, il tuait tous les pirates qu'il croisait. Ils ne méritaient pas de vivre.

    Il avait développé une haine certaine envers ces utilisateurs de fruit du démon depuis un événement qui s'était produit alors qu'il n'avait que dix ans, soit neuf années plus tôt. Il avait toujours été doué pour manier les sabres ; à cet âge-là il parvenait même à vaincre des adultes qui s'entraînaient depuis des dizaines d'années. Il s'était toujours senti plus fort en compagnie de ses sabres. Leur présence le rassurait.

    Néanmoins, malgré ses efforts, il y avait toujours eu cette personne qu'il n'arrivait jamais à battre. Peu importait le nombre d'heures passées à s'entraîner, il ne parvenait jamais à lui asséner le moindre un coup. C'était à peine s'il parvenait à prolonger le duel. Elle était plus âgée que lui, pourtant elle était son modèle de même que sa principale et seule rivale, ou du moins l'était-elle à l'époque.

    Leur village avait été attaqué par une bande de bandits menée par un pirate. Alors que tous les samouraïs se battaient contre les subalternes, Zoro s'était chargé de l'un des seconds qui faisait des pirouettes avec une épée sur un monocycle alors que son maître s'était occupé d'un dompteur d'animaux. Ce dernier se servait d'un lion gigantesque pour ses combats, ce qui avait compliqué la tâche de celui qui dirigeait le dojo, quand bien même il y était évidemment parvenu.

    Tandis que les deux hommes avaient été occupés par les seconds du chef, sa rivale s'était précipitée sur celui-ci, un véritable katana à la main, qui était transmis dans sa famille de génération en génération : Wadô Ichimonji. Zoro, alors trop occupé par son propre adversaire, n'avait pas pu lui venir en aide. Cet homme bougeait dans tous les sens mais était en réalité très faible. Il l'aurait abattu depuis bien longtemps s'il ne s'était pas trouvé sur ce monocycle.

    Au moment où il avait terminé son combat, Zoro avait tourné la tête afin de la retrouver. Il l'avait aperçue quelques dizaines de mètres plus loin, complètement dominée par son adversaire. Ce dernier avait mangé un fruit maudit et ses pouvoirs rendaient les attaques d'un épéiste inutiles. En voyant à quel point elle était déstabilisée de ne pas pouvoir lui infliger la moindre blessure et ainsi l'empêcher de causer plus de dégâts dans le village, il avait couru vers elle afin de lui prêter main forte.

    Néanmoins, il était arrivé trop tard. Il n'avait pu que voir que la pointe d'un poignard ressortir dans son dos tandis que les mouvements de sa rivale cessaient. Lui-même se figea devant ce spectacle, incapable de réagir. Celle qu'il n'était jamais parvenu à toucher lorsqu'il la combattait avait perdu aussi facilement ? Pourquoi n'avait-elle pas paré le poignard ? Pourquoi n'avait-elle pas fait de son mieux pour le battre ? Comment la meilleure épéiste du village n'était-elle pas parvenue à lui infliger la moindre égratignure ?

    Son monde s'effondra à cet instant précis. Il n'avait jamais cru en un Dieu, or il avait cru en elle. Elle était son modèle, son objectif à atteindre et même à dépasser. Sa vie entière tournait autour de la fille de son maître qui l'avait recueilli lorsqu'il avait perdu ses parents. Il existait entre les deux rivaux une relation particulière que nul autre à part les deux concernés ne pouvait comprendre. Ils s'étaient lancé un défi un soir, après un énième combat : l'un des deux devrait devenir le meilleur épéiste du monde.

    Au moment où ils avaient fait ce pari, Zoro avait été heureux : elle le reconnaissait réellement comme son rival. Même s'il n'arrivait jamais à la battre, elle avait reconnu sa force. Bien entendu, la dépasser ne serait pas chose facile, cependant il entendait bien y parvenir. Devenir le meilleur bretteur était le minimum à viser s'il comptait la surpasser.

    Et elle était morte trois jours plus tard. Au moment où le poignard l'avait transpercée, il avait hurlé son nom tandis que le chef riait à gorge déployée. Avec haine, il avait tenté d'atteindre cet homme, de le blesser, même de le tuer, cependant sa lame ne lui avait apporté aucune blessure. Il était resté indemne. Ce dernier lui avait donné un coup de poing au bout de quelques minutes, lassé de voir la tête de ce gamin.

    Il s'était senti si faible à ce moment-là. Il s'était détesté. Lui qui n'avait jamais pu la vaincre ne pouvait évidemment pas toucher celui qui l'avait battue. Son rire strident résonnait encore dans ses oreilles, il se détestait pour cela. Il le haïssait de tout son être. Après l'avoir envoyé au tapis, il avait appelé ses hommes, signifiant que la bataille était finie.

    « On n'a pas plus rien à faire ici, les gars. »

    Depuis tout ce temps, Zoro ne s'était jamais demandé ce qu'il avait voulu dire par cela. Seule sa haine l'aveuglait. Sa soif de vengeance ne l'avait jamais quitté depuis cet incident. Il avait demandé à recevoir le sabre de la défunte qu'il gardait toujours auprès de lui, depuis : Wadô Ichimonji. À l'époque, il se battait avec avec deux katanas et avait décidé après cet incident de développer une autre technique qui lui permettrait d'abattre ses ennemis à coup sûr.

    Du niitoryû, il était passé au santoryû. Wadô Ichimonji était devenu son arme secrète. Il en avait surpris plus d'un en le mettant dans sa bouche, créant une technique de combat à trois sabres. Durant trois années, il s'était entraîné comme un forcené, déterminé à la venger. Wadô Ichimonji ferait couler le sang de cet ennemi mortel. Ainsi, elle se vengerait elle-même d'une certaine façon. Il devenait l'arme qui lui permettrait d'accomplir cette vengeance.

    Un jour, alors qu'il s'entraînait, un villageois était venu à leur rencontre, affolé, hurlant qu'un pirate semait le trouble non loin et se rapprochait d'eux. En l'entendant, Zoro s'était précipité à l'encontre de cet homme, tandis que le village n'osait faire le moindre geste : la mort de la fille du maître du dojo les avait lourdement choqués, ils avaient pris peur des pirates. Zoro, lui, ne ressentait aucune crainte. Seule la haine triomphait parmi tous les sentiments qui l'envahissaient.

    Il n'avait aucun souvenir précis de ce qui s'était passé ensuite. Il s'était jeté sur l'ennemi, rempli de haine, et ne lui avait laissé aucune occasion d'utiliser ses pouvoirs. Lorsqu'il avait repris conscience du monde qui l'entourait, il se trouvait debout, face à un cadavre impossible à reconnaître. Le sang avait éclaboussé partout : sur le sol, sur lui. Le rouge était la couleur largement dominante dans ce spectacle.

    Autour de lui, les villageois effrayés s'étaient mis à murmurer le mot de démon. Mais Zoro s'en moquait bien. Il avait tué un pirate, mais il ne s'agissait pas du bon. Il n'avait toujours pas vengé sa mort. Elle ne pouvait toujours pas reposer en paix. Malgré ces trois années d'entraînement, il n'était parvenu à rien, mis à part le fait qu'il venait de tuer pour la première fois. Et certainement pas pour la dernière.

    Elle aurait eu seize ans si elle avait encore vécu. Pourquoi avait-il fallu qu'elle tombât sur le seul adversaire qu'elle ne pouvait pas vaincre ? Ses pouvoirs l'empêchaient de le toucher. À présent, l'unique moyen de la surpasser était de descendre celui qui lui avait ôté la vie. Cela signifierait qu'il était plus puissant qu'elle. Il aurait alors vraisemblablement le droit de se prétendre concurrent au titre de meilleur bretteur du monde.

    S'inscrire dans des compétitions ne l'intéressait pas. Il existait bien trop de règles, il sentait qu'il ne pouvait pas faire ressortir son véritable potentiel, ni celui de son concurrent. On ne l'autoriserait jamais à exploiter son santoryû. Seule la vraie bataille comptait, le reste était totalement futile. Il cherchait le véritable sens de se battre à l'épée.

    Peu après son premier meurtre, les villageois étaient devenus distants, des murmures se faisaient entendre où qu'il allât, le surnom de démon résonnait dans la plupart des conversations. Le fils adoptif du maître du dojo, autrefois aimé et respecté pour sa force, était à présent craint alors qu'il n'avait que treize ans. Seul celui qui l'avait recueilli osait lui parler normalement, comme si rien ne s'était produit. Il était l'unique personne à ne pas avoir peur de lui.

    Zoro était devenu très seul. Il avait commencé à s'isoler peu après la mort de sa rivale qui était en quelque sorte devenue sa sœur adoptive. Puis, à partir de la mort de ce pirate, ce fut le village qui commença à l'isoler. Il ne savait pas s'il en avait souffert, il n'en avait pas vraiment gardé de souvenirs. Dans sa tête, seule la vengeance comptait. Et cela déplaisait fortement à son maître.

    Ce dernier ne l'avait pas jugé sur son premier meurtre, car cela n'aurait absolument rien arrangé. Il se serait encore plus enfoncé dans les ténèbres. D'un meurtre, il en passa à deux. Puis trois. Le nombre crût tellement qu'il en perdit le compte. Dès que le mot pirate se faisait entendre quelque part, il courait à sa rencontre pour l'abattre. Plus il tuait, plus il devenait fort et il serait ainsi en mesure d'abattre cet homme.

    Le Gouvernement mondial avait eu vent de ses assassinats, or celui-ci ne réagit pas. Une personne, quelque part, tuait les pirates qu'ils traquaient. Que demander de plus ? Cette situation les arrangeait, pourvu qu'il ne touchât pas aux capitaines corsaires. Aucune mise à prix ne fut publiée contre lui, or des rumeurs commencèrent à circuler dans le Japon, surtout lorsqu'il commença parcourir le pays : un démon sous la forme d'un humain chassait le moindre pirate se trouvant près de lui.

    Vers quinze ans, il se mit à voyager fréquemment, traquant des pirates de plus en plus puissants, puisque peu s'aventuraient près de son village natal. Il partait parfois des mois sans donner la moindre nouvelle puis revenait comme si de rien n'était, repartant dès qu'il en sentait le besoin. Son absence ne dérangeait absolument pas les villageois qui se sentaient soulagés. Ils avaient le sentiment de vivre avec un véritable démon.

    Voyager n'adoucissait absolument pas sa haine qui s'accentuait, au contraire. Peu après ses dix-neuf ans, son maître décida d'agir. Il avait espéré que son disciple retrouverait petit à petit la raison, or il n'en fut rien. La haine était fortement nuisible à un épéiste qui devait chercher un chemin dans la sérénité. Zoro s'éloignait de sa voie qu'il traçait dans la mauvaise direction. Il ne pouvait pas se permettre de perdre un autre enfant, même s'ils ne partageait aucun lien de sang.

    N'ayant aucune influence sur lui, il avait décidé de l'exiler. Il lui avait ordonné de partir le plus loin possible du Japon dans le but de trouver sa propre voie. Il ne donna aucune autre précision, souhaitant le laisser méditer sur ces paroles. S'il était un réel épéiste, il finirait par comprendre le sens de ces mots tôt ou tard. Malgré toute cette colère qu'il portait en lui, il lui faisait confiance. Il réussirait à retrouver ce chemin duquel il s'était éloigné.

    Zoro avait perdu ses parents très jeune en raison d'une épidémie. Lui-même avait été bon ami avec eux, aussi avait-il récupéré leur fils qui était encore trop petit pour se souvenir du visage de ses parents. Sa fille avait été atteinte de ce mal, cependant elle y avait survécu, ce qui l'avait soulagé : il s'agissait là du seul souvenir qu'avait laissé cette femme en partant à sa naissance.

    Lui aussi pleurait la mort de sa fille, il ne laisserait pas Zoro penser le contraire. Néanmoins, un épéiste ne devait pas chercher la vengeance. En dépit de son talent pour manier les épées, le garçon aux cheveux verts était encore bien jeune et immature. Il ne connaissait pas le monde. Il ne comprenait pas la véritable signification d'être un épéiste. Il avait encore bien des choses à apprendre et son enseignement ne pouvait plus rien lui apporter. Il restait fermé sur lui-même. S'éloigner pourrait soit le sauver, soit le faire sombrer définitivement dans les ténèbres.

    Toutefois, il savait que Zoro réussirait. Il trouverait la bonne voie et se dirigerait vers la lumière. Il conservait néanmoins un pressentiment : son chemin serait très particulier, complètement hors du commun, et il ne serait pas exempt de surprises. Il ne laisserait aucun de ses disciples faillir et succomber aux ténèbres. Zoro était son ultime défi. Il portait en lui tout ce savoir qu'il lui avait transmis, ainsi que ce démon, comme les autres le nommaient si bien. Il s'agissait d'un pari pour voir lequel l'emporterait sur l'autre.

    Le jeune homme de dix-neuf ans avait pris cette nouvelle d'un air assez choqué : son maître s'était tu durant neuf années et décidait tout d'un coup d'intervenir dans son mode de vie. Cependant, il lui portait un trop grand respect pour remettre ses ordres en question. Lors de l'un de ses voyages, il avait rencontré un jeune Français qui lui avait appris sa langue et parlé de son pays. Même s'il n'osait pas l'admettre, cela lui avait donné envie de s'y rendre, aussi choisit-il la France. Il se rendait suffisamment loin du Japon.

    Il partit le lendemain, manquant presque de louper son avion. Il fallait se rendre dans trop d'endroits différents dans les aéroports. C'était de leur faute, les panneaux indiquaient mal la direction à suivre. C'était difficile aussi de trouver son siège, les emplacements ne suivaient aucun ordre logique à son goût.

    Il arriva à Paris sans n'avoir rien préparé : il n'avait aucun logement, pas de travail, juste un peu d'argent pour tenir quelques temps. S'il croisait quelques pirates, il pourrait toujours profiter de leurs primes. Dormir à la belle étoile ne le dérangeait pas, sinon. Pourquoi s'embêter à chercher un appartement ainsi qu'un travail qui ne lui permettrait pas de le payer ? Ce n'était ni logique, ni le mode de vie qu'il comptait suivre.

    Il vécut ainsi durant un mois : fuyant les policiers ou leur apportant la dépouille des pirates qu'il croisait en réclamant leurs primes. Ce rythme de vie ne le dérangeait pas particulièrement, cela lui permettait de continuer à se battre. Il deviendrait plus fort que tous, puis vengerait une bonne fois pour toute Kuina en tuant cet homme qui avait bouleversé sa vie neuf années auparavant. Baggy le Clown.



    Perdu dans ses pensées, Zoro mit du temps à remarquer un autre adolescent dans la foule qui le regardait depuis un moment. Mince, comment avait-il pu baisser sa garde à ce point ? Il ne l'avait pas remarqué ! Il posa sa main sur Wadô Ichimonji d'un air menaçant. Il avait l'air frêle, il suffisait de lui faire peur, puisqu'il ne pourrait même pas lui tenir tête une seule seconde dans un combat.

    Cependant, Zoro remarqua soudain que ce jeune garçon ne le regardait pas lui, mais ses sabres, les yeux brillants d'excitation. Pour une personne qui n'en avait jamais vu auparavant, cela pouvait paraître impressionnant. L'adolescent au chapeau de paille s'approcha et regarda les trois sabres de plus près en poussant des cris d'admiration. Encore un parasite. L'épéiste fit une grimace d'ennui, or celui-ci ne le regardait pas, trop obnubilé par ses armes.

    Les minutes passaient, et il continuait à regarder ses katanas en poussant des cris d'admiration de plus en plus fort. Encore un simple d'esprit. S'il s'extasiait de la sorte devant ses sabres, il n'irait pas loin dans la vie. Encore quelqu'un d'ennuyeux qui passerait son existence dans un bureau derrière un ordinateur. Zoro regarda quand même sa tenue vestimentaire, et remarqua qu'il sortait du lot, dans la mesure où il portait une simple chemise avec un bermuda, en plus d'un chapeau de paille.

    Celui-ci se mit subitement à rire en se relevant et le regardant enfin, une main sur le ventre et l'autre sur son chapeau. Gamin étrange. Zoro roula des yeux puis regarda ailleurs, guettant l'arrivée potentielle d'un policier. Il devait se tenir prêt pour s'enfuir à tout moment. Il avait l'impression d'être un criminel alors qu'il les chassait. Cela n'avait rien de logique.

    « Eh, dis, tu veux faire partie de mon équipage ? »

    Le bretteur haussa un sourcil en tournant à nouveau son regard sur l'inconnu qui souriait d'un air idiot. Faire partie de son équipage ? Était-il une sorte de navigateur ? Zoro leva les yeux au ciel, décidant de l'ignorer une fois de plus. Il avait repéré un accent dans sa voix, de plus il ne semblait pas être d'ici. Il avait dû se tromper en parlant. Une faute fréquente chez les étrangers, lui-même s'était parfois embrouillé. Il lui suffisait de faire comme s'il n'avait pas entendu et il s'en irait.

    Pourtant, les minutes passèrent encore, et l'adolescent se trouvait encore devant lui, l'air imperturbable. Sa présence l'énervait considérablement : ne pouvait-il pas s'en aller ? S'il était perdu, il pouvait toujours demander à quelqu'un d'autre. S'il recrutait réellement un équipage, il n'avait qu'à aller voir ailleurs aussi. Quelle utilité y avait-il à avoir un épéiste dans son équipage ? Ce n'était pas comme si les marins avaient besoin de se battre... Et il n'avait de toute façon aucune envie d'en devenir un.

    « Tu ne veux pas devenir un pirate avec moi ? »

    A ces mots, Zoro se tendit, et porta son regard vers cet inconscient qui continuait de sourire alors qu'il avait commencé à sortir Wadô Ichimonji de son fourreau. Que venait-il de dire ? Un pirate ? Ce gamin était un pirate ? Comme quoi, les monstres se trouvaient là où on s'y attendait le moins. Après tout, quiconque mangeait l'un de ces fruits devenait possédé par un démon, tout le monde le savait.

    Que voulait-il dire par devenir lui aussi un pirate ? Possédait-il des fruits du démon ? Sous cet air innocent se cachait donc un esprit machiavélique. Et qu'entendait-il par équipage ? Attirait-il les personnes sur son bateau pour les forcer à avaler l'un de ces fruits maudits ? Les noyait-il ensuite ? Il sentit son sang bouillonner, comme à chaque fois qu'il était sur le point d'affronter un pirate, lorsqu'il entendit tout à coup la voix d'un policier résonner dans les couloirs bruyants.

    « On l'a trouvé, il est là ! »

    Zoro jura en japonais, regarda l'étranger du coin de l'œil, puis rangea le sabre qu'il avait commencé à sortir. Il n'avait pas le temps de le tuer et de s'enfuir en même temps. Si la police l'attrapait, il ne reverrait jamais ses katanas. S'il en attaquait un devant tous ces témoins, il deviendrait un criminel et ne pourrait plus vivre de son « métier » de chasseur de pirates. Il se mit à courir, en soufflant au garçon qu'il lui réglerait son compte la prochaine fois. Il avait retenu son visage, il ne lui échapperait pas si leurs chemins se recroisaient.

    Courant, bousculant des personnes dans cette foule, Zoro cherchait désespérément une sortie, sans remarquer que le pirate machiavélique le suivait en riant à gorge déployée, une main sur la tête, lui permettant en conséquence de garder son chapeau en place. Il s'agissait là du cadet de ses soucis. Il tenait à sa soi-disant vie paisible, et il ne comptait rien y changer ; il devait encore tuer cet homme. Il s'agissait de la raison pour laquelle il était devenu plus fort.

    Zoro arriva devant des escaliers qu'il emprunta, puis sortit à l'extérieur, rencontrant à nouveau du monde qui gêna sa route. Ses pulsions meurtrières contre lesquelles il se battait depuis des années le poussaient à sortir ses katanas et se frayer un chemin, or il savait qu'il ne gagnerait absolument rien en agissant de la sorte. Il récolterait le titre de malfaiteur, ce qui ne l'arrangerait pas du tout. Surtout qu'il ne tuait que les pirates.

    Du coin de l'œil, l'épéiste aperçut une ruelle plus tranquille dans laquelle il s'engouffra. Il pouvait courir à la vitesse qu'il souhaitait avec le peu de personnes lui barrant la route. Son instinct lui indiqua au bout de plusieurs minutes que plus personne ne le suivait, aussi s'arrêta-t-il afin de regarder autour de lui. Il ne connaissait pas cet endroit. Il n'était jamais venu ici. Il n'était jamais passé deux fois au même endroit depuis qu'il se trouvait dans cette ville.

    « Je te tiens ! »

    D'un air las, Zoro tourna la tête vers l'origine de la voix, puis aperçut un jeune policier, sans doute un débutant, qui le tenait en joue. Il tremblait, mais semblait déterminé à tirer s'il faisait le moindre geste suspect. Zoro soupira. Quand allaient-ils enfin le laisser en paix ? Il ne leur posait aucun problème, il diminuait même leur travail en leur livrant des pirates recherchés par le Gouvernement. Pourquoi étaient-ils aussi ingrats ?

    À la vitesse de l'éclair, le bretteur dégaina l'une de ses armes puis fila comme le vent jusqu'au policier, tranchant son revolver au passage. Le bleu, terrorisé, tomba en arrière puis le regarda, les yeux brillants de peur, avant de détaler comme un lapin sans demander son reste. Au moins, cette affaire était réglée. Il rangea son sabre lorsqu'une voix retentit derrière lui.

    « Wahou ! Je ne m'étais pas trompé, tu es fort ! C'est décidé, tu fais partie de mon équipage ! »

    Le gamin pirate se tenait sur un muret et souriait à pleines dents. Zoro n'avait pas senti sa présence cette fois non plus. Quel était son pouvoir, exactement ? D'être capable de masquer son aura ? Non, il sentait qu'il ne s'agissait pas vraiment de cela.

    Ne laissant pas le temps à ce pirate d'en dire plus, Zoro se jeta sur lui, deux sabres sortis. Il sentait son sang bouillonner, ses sens s'embrouiller, comme pour laisser place à ceux d'un autre. Il ne se contrôlait jamais lors d'un combat contre un utilisateur de fruit du démon. Aucun pirate ne lui avait échappé jusqu'à maintenant, ce garçon au chapeau de paille ne serait pas une exception.

    Avant que Zoro pût le toucher, son adversaire bondit puis atterrit sur le sol, toujours une main sur son chapeau, comme s'il avait peur de le perdre. Sous l'effet de la surprise, il se dépêcha quand même d'attaquer de nouveau, pour subir une nouvelle esquive de la part de sa victime. Jamais personne encore n'était parvenu à échapper à ses coups. Personne, sauf Kuina. Qui était ce garçon ? N'était-il donc pas assez fort ? La puissance qu'il avait accumulée au fur et à mesure des années ne lui servait-elle donc à rien ?

    « Qui es-tu ?
    - Moi ? Je suis Luffy, un pirate ! »

    Désabusé par le manque de précision dans sa réponse qui ne répondait pas à ses attentes, Zoro décida d'attaquer à nouveau, en misant sur sa vitesse, Wadô Ichimonji dans sa bouche. Cette fois-ci, Luffy évita l'attaque de justesse, gagnant une éraflure au niveau du bras. Néanmoins, il ne parut pas s'en soucier réellement.

    « Sache, petit, que je tue les pirates. Tu peux rêver pour que j'en devienne un.
    - J'ai décidé que tu ferais partie de mon équipage, alors tu fais partie de mon équipage ! J'en ai besoin d'un pour devenir le seigneur des pirates !
    - Le seigneur des pirates ? »

    Zoro s'arrêta dans sa course, intrigué. C'était la première fois qu'il entendait une chose pareille. Que pouvait-il bien vouloir dire par seigneur des pirates ? Parlait-il de la mafia ? S'il comptait devenir l'un des grands patrons, il devrait mettre les bouchées doubles. Un simplet tel que lui n'avait quasiment aucune chance d'y parvenir. Il n'avait pas l'air d'un escroc ni d'un assassin. Ou bien faisait-il en réalité partie d'un certain milieu favorable ?

    Ce qui l'embrouilla aussi fut le fait qu'il ait besoin d'un équipage. Il ne voyait absolument pas le rapport. La mafia et la mer étaient deux choses complètement distinctes. Comptait-il créer une mafia sur la mer ? La bonne blague. Que se passait-il dans la tête de ce garçon ?

    Zoro ne pouvait pas s'empêcher d'être intrigué par ce pirate à l'allure si innocente. Il avait beau l'examiner, il ne voyait aucune once de machiavélisme, ni même de mal dans ses yeux. Même le meilleur des assassins ne pouvait pas être aussi bon pour masquer ses intentions. Serait-ce possible que cet adolescent eût résisté au démon du fruit qu'il avait avalé ? C'était la première fois qu'il « discutait » réellement avec un pirate. Il n'avait jamais laissé ses précédentes victimes s'exprimer, les achevant d'un seul coup, sans leur laisser demander leur reste.

    Tout le monde savait qu'une personne qui avait mangé un fruit du démon se faisait immédiatement posséder. Le Gouvernement mondial leur en avait parlé depuis des siècles, si bien que cela leur était devenu logique. Seuls les membres de la Justice y résistaient, justement parce qu'ils La servaient. Le démon perdait inévitablement face à la Justice.

    Ce gamin ne faisait pas partie du Gouvernement, alors comment pouvait-il y résister ? Possédait-il un esprit supérieur ? Non, aucune chance. Ça crevait les yeux qu'il était un simple d'esprit. Zoro ne se souciait guère du Gouvernement et tout s'y rapportant, toutefois il subissait leur influence, comme tous les habitants de cette Terre. L'idée qu'ils auraient pu mentir au sujet de ces fruits ne traversait l'esprit de personne. Sauf de l'épéiste, à cet instant précis.

    Il refusait de se laisser berner par un ennemi, cependant il avait beau chercher dans tous les recoins de cette âme, il ne trouvait absolument rien de mal. Ce n'était pas logique. La seule raison qui pourrait expliquer cette soi-disant résistance au démon dont il avait mangé le fruit serait alors que tout n'avait été que tissus de mensonges. Les hommes se seraient sans doute corrompus eux-mêmes, entraînés dans la folie par leurs pouvoirs qui les plaçaient au-dessus des autres ?

    Zoro ne savait même pas pourquoi il pensait ainsi. Il avait l'impression que ce garçon influençait ses pensées. C'était comme s'il ne pouvait pas le détester. Quel genre de fruit possédait-il ? À cet instant précis, il se rendit compte qu'il s'en moquait bien. Comme surgi de nulle part, les paroles de son maître résonnèrent dans sa tête : « trouve-toi toi-même, Zoro ». Haussant un sourcil, l'épéiste se demanda pourquoi il y pensait soudainement.

    Son maître ne lui avait jamais précisé ce qu'il entendait par là, ni comment il était censé se trouver lui-même. Mais, face à ce Luffy, Zoro se sentait comme frémissant d'excitation. Pour la première fois depuis des années, quelque chose avait retenu son attention. Il avait envie d'en savoir plus. Il voulait voir en réalité ce qu'il entendait par seigneur des pirates, et voir l'influence cela aurait sur le monde. Il se surprit lui-même à penser ainsi.

    Zoro rangea ses épées en esquissant un petit sourire. Il était en train de sympathiser avec un pirate, pourtant il n'y faisait pas attention. Sa haine pour eux n'avait bien entendu pas disparu en l'espace de quelques secondes ; néanmoins c'était comme si cet adolescent était une exception, qu'il était le seul pirate qu'il ne pouvait pas tuer ni haïr comme les autres.

    « Tout ça me paraît intéressant... Mais qu'est-ce que tu veux dire par seigneur des pirates ? »

    Luffy, à ces paroles, sourit à nouveau à pleines dents. Elle n'aurait jamais pensé qu'elle tomberait sur la personne idéale pour devenir son second en arrivant. Son instinct ne l'avait pas trompée. Ses trois sabres l'avaient fascinée, toutefois elle avait senti son aura dans le métro. C'était celui d'un homme déterminé, prêt à tout pour atteindre son objectif. Il s'agissait là du genre de gens qu'elle recherchait.

    « As-tu déjà entendu parler de Gold Roger ? »

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Ven 15 Juin 2012 20:01 
1 000 Berrys
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 07 Juin 2012
Messages: 33
Super idée de ramener les FDD a notre époque !!
En lisant ta fic des questions sont apparues dans mon esprit:
-Seigneur des pirates, dans ce monde, c'est quoi ? Et qui était Gol D. Roger ?
-Il y aura t'il un nouveau monde ?
-Tous les personnages du manga, seront-il représentes ?
-Que va faire l’équipage ? Et que sera t-il ?
-Pourquoi les bananes n'ont pas d'ailes ?
Toutes ces questions, auxquelles j’espère que tu répondras au cours de cette aventure !!!

Edit:Bien sur !!! L' Amérique serait-ce le nouveau monde ?


Dernière édition par Lignum le Sam 16 Juin 2012 01:38, édité 2 fois.

Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Ven 15 Juin 2012 20:13 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...
    Merci pour ton commentaire =)

    - Va savoir, c'est vrai que ça paraît bizarre =P
    - Hm... Je ne sais pas, on a un nouveau monde ?
    - Le manga est beaucoup trop vaste, je ne peux malheureusement pas tout traiter. Il y aura en tout quatre gros arcs à compter de l'équivalent d'Alabasta. Avant ça, il y aura juste deux ou trois petits arcs.
    - Eh bien... Ils vont former une famille ! =D Je crois...
    - Je me posais la question, justement.

    Oh, mince, je t'ai révélé des informations majeures...

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Mar 3 Juil 2012 18:06 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...



    Ce n'était pas comme si c'était volontaire. Ce n'était pas comme si c'était ce qu'ils avaient souhaité. C'était juste arrivé, sans leur laisser l'occasion d'anticiper cette situation. Ils avaient cru que tout irait bien, que cette histoire se déroulerait sans problème. Comme quoi, c'était inutile de nourrir des espoirs, puisqu'ils finissaient forcément par être vains.

    « C'est la dernière fois que je te fais confiance ! »

    Zoro était énervé. Ils avaient marché durant des heures, uniquement pour se rendre compte qu'ils tournaient en rond depuis le début. Il avait pensé que Luffy saurait les guider dans cette immense ville, or cela s'était avéré faux. Pourquoi cet abruti avait-il dit qu'il avait un sens de l'orientation si c'était de toute évidence totalement faux ? Ils cherchaient un endroit où dormir, et, avec un peu de chance, de la nourriture. Comment cet idiot avait-il pu éviter tous les magasins dans son chemin ?

    S'il avait su que la vie de pirate était aussi ennuyeuse et dénuée d'intérêt, il n'aurait jamais accepté. Ce que lui avait raconté Luffy sur ces histoires dont nul n'avait jamais entendu parler l'avait fortement intéressé. Malgré ses protestations contre son « capitaine » - il n'arrivait pas à croire qu'il devait l'appeler de la sorte -, Zoro savait pertinemment qu'il n'en ferait rien. Il sentait qu'une fois engagé dans cette histoire, il était impossible d'en sortir.

    De même, il le regretterait s'il venait à se séparer de ce garçon. Il n'avait aucun endroit où se rendre et vivait en solitaire. Son maître et père adoptif lui avait dit de trouver son chemin, et ce n'était pas en continuant cette vie de chasseur de primes seul dans cette ville qu'il le trouverait. Bien que cela fût difficile à admettre, le bretteur sentait que leur rencontre n'était pas fortuite. Comme si elle était volontaire, provoquée par quelque chose...

    Et le voilà qui parlait de choses totalement absurdes. Il se trouvait en compagnie de Luffy depuis seulement quelques jours et il commençait déjà à penser de manière étrange. Il avait l'impression de s'adoucir et cela l'effrayait. Il se moquait éperdument de sa réputation de démon incarné en humain, néanmoins il ne devait absolument pas perdre son objectif de vue : tuer cet homme. Baggy le Clown.

    Comment aurait été sa vie si Kuina avait survécu ? Aurait-il finalement réussi à la surpasser ? Aurait-il trouvé des adversaires au Japon ou aurait-il voyagé, comme il le faisait actuellement ? Zoro n'était pas homme à ressasser le passé, il détestait la nostalgie et le regret. C'était pour cela qu'il tuerait cet homme. Kuina se vengerait elle-même au travers de son sabre qui boirait le sang de cet assassin qui avait osé lui retirer l'une des personnes auxquelles il tenait le plus.

    Jetant un coup d'œil vers Luffy qui regardait autour de lui, comme s'il avait aperçu une auberge, Zoro soupira. Il y avait de moins en moins de maisons, les rues se faisaient de plus en plus désertes. Pas besoin d'être un génie pour se rendre compte qu'ils quittaient la ville et s'enfonçaient dans la campagne. Ils trouveraient difficilement un endroit pour la nuit dans ces conditions. Il ne savait pas pourquoi Luffy avait tellement besoin d'intimité, lui avait l'habitude de dormir à la belle étoile. Les nuits, cependant, se rafraîchissaient au fur et à mesure que l'hiver approchait.

    Pour l'instant, ils étaient parvenus à trouver des petits parcs où dormir, toutefois l'adolescent avait subitement décidé qu'ils dormiraient dans un hôtel ce soir. Il n'était pas faux qu'une douche ne leur ferait aucun mal.

    Mis à part explorer la ville, ils n'avaient absolument rien fait de particulier, ce qui décevait énormément l'épéiste. Il avait espéré plus de rebondissements dans sa vie en acceptant de faire équipe avec ce pirate. Il n'en revenait toujours pas qu'il ne l'avait pas encore tué. Comment était-il parvenu à réprimer ses pulsions meurtrières ? D'habitude, son sang s'enflammait dès qu'un pirate s'approchait de lui, et il ne se contrôlait plus jusqu'à la vue de son cadavre ensanglanté. Pourtant, ce gamin s'en était sorti indemne.

    Ils n'avaient pas vraiment parlé d'eux-mêmes, néanmoins Luffy lui avait vaguement dit qu'il était originaire du Brésil et qu'il était venu ici pour étudier. Vraisemblablement, son souhait était de devenir détective. Pourquoi, il n'en avait pas la moindre idée. Il parlait couramment le français comme s'il s'agissait de sa langue maternelle, mis à part un léger accent. Il avait sans doute un parent français. Enfin, ce n'était pas comme si c'était son problème.

    Toutefois, si Luffy était venu étudier, pourquoi n'avait-il aucun logement ? Il avait dû y penser, n'est-ce pas ? Zoro s'arrêta et lui posa soudainement la question. Plutôt que d'errer dans les rues, ils auraient pu se retrouver dans un appartement depuis le début. Comment cet idiot avait-il pu oublier ? Enfin, il fallait déjà qu'il eût un endroit où habiter...

    À sa question, Luffy se retourna et le fixa de son air dénué d'expression, les yeux grand ouverts. Oh non. Tout mais pas ça. Était-il possible d'être idiot à ce point ? Non seulement il n'avait aucun bagage, mais en plus il n'avait même pas songé un seul instant à trouver un logement ? Qu'avait-il fait pour mériter un sort pareil ?

    « Aaah... T'es super intelligent, Zoro ! Pourquoi j'y ai pas pensé plus tôt ? »

    Le voilà qui parlait avec sa voix d'abruti, une fois encore. C'était à se demander comment il était parvenu à être reçu pour faire ses études en France. Il avait probablement été pistonné, il n'y avait pas d'autre explication. L'épéiste ne croyait pas en Dieu, sinon il l'aurait maudit depuis longtemps. Que faisait-il en compagnie de ce gamin ? Il aurait dû le tuer depuis le début.

    Aussi étrange que cela puisse paraître, le « démon » qu'il avait en lui, puisque c'était l'avis de tous, ne se manifestait pas lorsqu'il se trouvait en compagnie de Luffy. Au contraire, il restait calme, comme s'il s'agissait d'un simple humain, ce qu'il n'était, en toute évidence, pas du tout. Il ne comprenait pas pourquoi il ne l'avait pas tué dès leur première rencontre. Il aurait pu, même s'il aurait demandé plus d'efforts que les pirates précédents.

    Malgré son attitude innocente, ce gamin savait parfaitement éviter ses coups, ce que nul n'était parvenu à faire jusque là. S'ils avaient continué leur combat, il aurait été fortement intéressant et enrichissant. Zoro avait l'impression de stagner depuis quelques temps, étant donné que les pirates n'étaient en général pas très coriaces. Luffy, au contraire, était plutôt un défi qu'il n'avait pas relevé. Pourquoi ?

    Le jeune adolescent utilisait fréquemment ses pouvoirs, d'ailleurs, comme s'il cherchait à être tué. En général, il étendait son corps lorsqu'ils n'étaient que tous les deux, étant donné que Zoro ne le dénoncerait pas. Il avait un pouvoir plutôt banal, mais qui s'avérait rudement pratique. Par exemple, il résistait aux balles de pistolet. Néanmoins, il restait vulnérable aux lames. On ne pouvait pas tout avoir.

    Zoro ne savait que peu de choses sur les fruits du démon, or il connaissait les trois types principaux : paramecia, zoan et logia. Son « capitaine » était lui-même un paramecia, même s'il s'apparentait avec un logia, dans le sens où son corps entier était en caoutchouc. Le bretteur n'avait jamais eu affaire à un logia, cependant il devrait s'y préparer, trouver un moyen pour le toucher. Il refusait de perdre contre quiconque.

    Luffy était véritablement quelqu'un d'étrange. Déjà, il n'avait absolument, mais vraiment rien à voir avec un démon, bien qu'il eût mangé l'un de ces fruits maudits. Il était pourtant dit que quiconque avalait l'un de ces fruits perdait toute conscience et laissait un démon prendre possession de son corps. Or, il avait beau regarder dans tous les sens, il était impossible de trouver la moindre de trace de malice en lui. Il était terriblement normal. Peut-être que son idiotie l'avait sauvé ? Ou bien cette histoire de démon n'était qu'un mensonge depuis le début.

    Une fois dotés de pouvoirs, les humains étaient capables de tout. Il suffisait d'un être maléfique de naissance pour obtenir quelqu'un de pire en ajoutant la puissance. Dans ce cas, pourquoi le Gouvernement mondial laissait-il les peuples croire de telles choses ? Était-ce pour les éloigner de ces fruits ? Après tout, il ne fallait pas oublier qu'il les utilisait sur ses propres hommes... Le Gouvernement mondial souhaitait-il monopoliser le pouvoir ?

    En rencontrant Luffy, Zoro avait comme l'impression d'avoir été plongé dans un nouveau monde rempli de questions sans réponse. Pour le moment. Viendrait-il à en apprendre plus sur ces secrets cachés en restant en sa compagnie ? Le seul moyen de le savoir était de rester à ses côtés le temps de l'apprendre. Si on regardait la situation sous cet angle, ce n'était pas trop mal, finalement.

    Malgré tout, cela ne réglait pas cette histoire de logement pour la nuit. Après lui avoir posé la question, Luffy avait pris une direction différente, comme s'il avait su où se diriger. N'ayant de toute manière pas d'autre choix, Zoro le suivit, ses épées se balançant sur son côté. S'il ne les portait pas, il se sentait mal à l'aise. Tout comme les samouraïs, il dormait avec elles, assis. Le manque de confort ne le dérangeait absolument pas, ce qui était bien pratique étant donné les endroits où il s'assoupissait.

    Les deux membres de l'équipage, quand bien même Zoro ne savait pas ce que cela signifiait réellement, marchèrent silencieusement dans la nuit qui tombait rapidement. Tandis que le capitaine sautillait et paraissait s'extasier devant tout et n'importe quoi, le second conservait un air blasé, en se demandant où ils allaient passer la nuit, ce qui n'était pas une question à ignorer.

    Soudain, un coup de canon les sortit de leurs rêveries. Zoro, par instinct, posa une main sur Wadô Ichimonji, prêt à répliquer. Ils se trouvaient apparemment non loin d'une zone commerçante qu'ils avaient manquée et qui se faisait détruire. Néanmoins, ce n'était pas la raison pour laquelle l'épéiste était tout à coup immobile. Il avait déjà entendu ce coup de canon si particulier. Il avait déjà entendu ces cris de détresse.

    Les yeux écarquillés, il se mit à courir en direction du lieu de l'attentat, le cœur battant, le sang bouillonnant comme à son habitude dans ces moments-là. Durant ces périodes où un pirate se trouvait non loin. Il avait juste besoin de ses yeux pour confirmer ce que ses oreilles avaient déjà reconnu. S'il avait raison, alors... Zoro se sentait prêt pour ce combat. Cette fois, il ne perdrait pas.

    Des flammes consumaient les maisons ainsi que les commerces. Une foule de gens tentait de s'enfuir, craignant d'être attaquée. Zoro se frayait un chemin parmi eux, ne souhaitant pas être entraîné et remis à son point de départ. Il lui fallait atteindre ces êtres qui terrorisaient la ville. Un autre boulet de canon s'abattit sur une rangée de maisons à sa droite, pétrifiant tout le monde au passage, dont lui.

    Il n'y avait aucun doute. Il s'agissait des mêmes boulets de canon avec le même dessin stupide. Et qui provoquaient les mêmes dégâts. Enfin, après toutes ces années, il l'avait retrouvé. Il allait pouvoir l'affronter et lui faire payer. Kuina se vengerait ce soir même. Wadô Ichimonji boirait le sang de cet assassin. Elle pourrait reposer en paix, après toutes ces années d'errance.

    Déjà, il ne contrôlait plus son corps qui agissait de lui-même. Il retournait dans ces phases si familières où son seul objectif était d'abattre le pirate en face de lui. Zoro ne le voyait pas encore, mais il s'approchait un peu plus de lui à chaque seconde qui passait. Son sang bouillonnait et s'activait dans ses veines, lui donnant l'adrénaline nécessaire lui permettant d'aller plus vite. Luffy, les personnes qui l'entouraient ne comptaient plus ; il était plongé dans son monde où n'existait que lui-même ainsi que sa future victime.

    Un rire strident résonna dans ses oreilles. Plus de doute possible, il s'agissait bien de lui. Baggy le clown. D'ici quelques minutes, il n'y aurait plus que son sang éclaboussé sur le sol. Nul ne le pleurerait de toute manière, il n'était que l'un de ces maudits pirates. Zoro l'aperçut soudain : il se tenait quelques mètres plus loin, un grand sourire aux lèvres. Il ordonnait à ses hommes de charger un autre boulet de canon et de tirer vers ce qu'il restait de bâtiments indemnes.

    « Nul ne peut s'opposer à Baggy le clown ! J'ai autant d'influence et de force que les capitaines corsaires ! »

    Ces paroles l'enflammèrent encore plus. Comment osait-il se mettre au même plan que les capitaines corsaires ? Et quel était le rapport ? Zoro ne cherchait aucune réponse, seule la vue du sang de cet assassin le calmerait. Un sabre dans la bouche, les deux autres sortis, il se jeta vers le groupe de criminels qui obéissait à ce meurtrier, prêt à en finir.

    Aucun d'entre eux ne l'avait vu arriver. L'épéiste, dans sa rage, trancha Baggy, pris lui aussi au dépourvu. Néanmoins, il savait que ce coup ne lui ferait rien du tout, il ne faisait que simplement l'avertir de sa présence. Ses subalternes eurent le souffle coupé quelques instants, avant de se rendre compte que cet adversaire se battait avec des épées : inutile de s'inquiéter. Leur chef ne serait jamais vaincu avec des lames.

    Baggy se retrouva coupé en deux au niveau de l'abdomen. Ce coup l'avait surpris, il n'avait pas songé un instant que quelqu'un aurait le courage de l'attaquer. Posant son regard sur son attaquant, il remarqua que celui-ci n'était nullement surpris par ses pouvoirs : il était donc au courant. Se seraient-ils croisés quelque part ?

    « Après toutes ces années, je te retrouve enfin, Baggy le clown. »

    Reprenant sa forme originale, il fit signe à ses subalternes de rester sur le côté : il avait envie de s'amuser. Cet épéiste avait l'air de le connaître. S'agissait-il d'un chasseur de primes ? Sans aucun doute, puisqu'il avait vraisemblablement déjà vu ses pouvoirs. Toutefois, il avait l'air d'avoir autre chose derrière la tête, comme une vengeance personnelle. Avait-il été l'une de ses précédentes victimes ? Il les avait pourtant toutes tuées. Un témoin, alors ?

    Ce garçon lui semblait vaguement familier. Et le sabre qu'il portait dans sa bouche aussi. Quelle technique étrange, qui aurait idée de se battre avec trois épées ? De même, celle dans sa bouche ne devait pas servir à grand-chose, comment pouvait-il la manier avec force et précision ? Il était décidément totalement stupide. La haine l'aurait-il rendu aveugle à ce point ?

    Le clown fut interrompu dans ses pensées par une autre attaque. Son adversaire agitait ses sabres dans tous les sens, néanmoins cela était totalement inutile, puisqu'il pouvait se diviser et ainsi éviter la moindre blessure. Il continua à agir de la sorte pendant plusieurs minutes, sans se fatiguer. Pourquoi persistait-il à l'attaquer de cette façon, tout en sachant que cela ne servait absolument à rien ?

    Une minute. Et si son but était justement de le diviser le plus possible ? Baggy eut des sueurs froides. C'était très mauvais signe. Il devait vite se rassembler, avant de...

    « Eh, Zoro, je t'ai cherché partout ! Qu'est-ce que tu fais ? »

    Un garçon avec un chapeau de paille se tenait à quelques mètres d'eux. Nul ne l'avait remarqué jusque là, tous avaient focalisé leur attention sur le combat. Luffy les regarda d'un air dénué d'expression : elle ne comprenait pas vraiment ce qui se passait. Cependant, en apercevant Zoro, son regard changea : pourquoi se battait-il ? Qui était son adversaire ?

    L'équipage de Baggy détourna vite son attention du nouveau venu qui avait l'air totalement inoffensif et regarda à nouveau la bataille que se livrait les deux hommes. Luffy posa son regard sur l'adversaire de Zoro : il était bizarre, il était en plein de morceaux ! Mais pourquoi s'en prenait-il à son second ? Avait-il osé l'attaquer ?

    Le capitaine aperçut tout d'un coup des pieds à quelques mètres d'elle. Pourquoi des pieds ? Riant un bon coup, elle sautilla jusqu'à eux puis les regarda sous chaque angle. Elle n'avait encore jamais vu cela ! Elle en toucha un du bout du doigt, comme pour s'assurer qu'il était réel et qu'il ne s'agissait pas d'une illusion. Lorsqu'elle entra en contact avec la peau du pied, son sourire s'élargit. C'était génial !

    Luffy en saisit un qu'elle examina dans tous les sens : elle ne savait pas comment cela était possible, mais en tout cas elle était curieuse. Elle commença à le frapper contre le sol, tel un bébé avec un jouet. Elle ne remarquait pas les cris de douleur qui retentissaient plus loin, trop absorbée par son nouveau jeu. Ce n'était pas tous les jours qu'elle trouvait des pieds par-terre.

    Jetant celui qu'elle avait en main, elle porta cette fois son attention sur l'autre pied qui semblait trembler, appréhendant son châtiment. En plus, il était vivant ! Est-ce qu'il craignait les chatouilles ? Impatiente de le découvrir, elle ôta la chaussure puis se mit à chatouiller le pied qui frémit. Luffy continua, ravie de ses nouveaux jouets. Néanmoins, une voix énervée qui tentait de retenir un fou rire attira vaguement son attention.

    « Abrutis, arrêtez de nous regarder et allez récupérer mes pieds ! »

    Baggy avait cru être tombé sur un opposant peu différent des précédents. En temps normal, ils essayaient tous de le découper, sans grand succès, et il n'avait aucun mal à les mettre au tapis au final. Toutefois, l'attitude de cet épéiste était différente. Tout d'abord, il y avait sa haine. Il avait dû être lié à l'une de ses précédentes victimes et était venu réclamer vengeance.

    Ensuite, sa technique prouvait qu'il connaissait l'un des points faibles de ses pouvoirs : plus il se divisait, moins il pouvait prêter attention à ses parties du corps. Il ne pouvait après tout pas être à plusieurs endroits à la fois. Il ne se découpait pas par instinct, il fallait qu'il le fît lui-même. En clair, il ne pouvait pas surveiller chaque parcelle de son corps et ainsi éviter chaque blessure. De plus, avec ses trois sabres, son adversaire pouvait toucher divers endroits en même temps.

    Juste après s'être rendu compte de sa tactique, Baggy essaya de se rassembler tant bien que mal et saisit ses petits couteaux qu'il coinça entre chacun de ses doigts. Néanmoins, lorsqu'il chargea vers l'épéiste, celui-ci les para sans le moindre problème, comme s'il ne s'agissait que de misérables insectes. Aucun ne pouvait blesser l'autre, ce combat était destiné à continuer jusqu'à ce que l'un d'entre eux fatigue.

    Baggy aurait pu continuer éternellement, ce qu'il faisait n'avait rien d'épuisant. Or, une douleur vive le déconcentra et il ne put prévenir l'un des coups de son adversaire. Ses pieds ! Le bretteur avait un complice qui s'attaquait à ses pieds ! Ils avaient mis au point un sacré plan. Si ses subalternes continuaient à les regarder sans rien faire, il finirait par perdre. Devant eux. Quelle honte. Il ne souhaitait pas subir un tel déshonneur.

    Alors que la douleur s'estompait, autre chose vint le déconcentrer : des chatouilles. Jamais il n'avouerait qu'il était extrêmement chatouilleux, cela pourrait être utilisé à son encontre. Ne pouvant s'en empêcher, il commença à éclater de rire, provoquant un regard d'incompréhension de la part de son adversaire qui continuait malgré tout à l'attaquer.

    Une nouvelle coupure au visage cette fois le força à se calmer. Il était très énervé. Il refusait de perdre, il avait encore du chemin à faire s'il souhaitait devenir plus puissant et influent encore. Rien ne pouvait l'arrêter, et certainement pas ce gamin. Il hurla à ses subalternes d'aller régler le compte de cet importun une bonne fois pour toute. Il n'avait pas l'air coriace et ne tiendrait pas le coup face à une vingtaine d'hommes.

    Enfin, les chatouilles cessèrent et le combat reprit de plus belle. Il était le seul blessé. Pour l'instant. Il avait bien l'intention de changer la donne. L'une de ses mains pleine de couteaux alla derrière son adversaire et chargea. Les lames étaient sur le point de le toucher lorsqu'il fit un bond sur le côté au dernier moment. Pourquoi les épéistes sentaient-ils tous les coups venir ? Ce n'était pas normal.

    Il lui était très vaguement familier, or il ne parvenait pas du tout à se remémorer où il avait bien pu le rencontrer. Il avait brisé les vies de tellement de gens qu'il en avait perdu le compte, pas comme s'il s'en souciait ne serait-ce qu'un petit peu. Ils n'avaient qu'à être plus forts et le vaincre. De toute manière, il ne faisait qu'obéir aux ordres. Si on lui demandait d'abattre quelqu'un, il était bien obligé de le faire, sinon on le condamnerait à mort.

    Cela ne le dérangeait pas de devenir un tueur à gages, pourvu qu'il pût éviter la sentence. Baggy n'avait pas envie de mourir, il valait bien mieux. Et travailler pour eux n'était pas désagréable, ils passaient outre nombre de ses délits et continuaient à le payer grassement après chacune de ses missions. Décidément, ce fruit du démon qu'il avait mangé étant jeune par accident était devenu un don du ciel.

    En effet, sa capacité à se diviser lui avait évité nombre de blessures et était idéale pour déstabiliser l'ennemi. De plus, étant un paramecia et non un logia, son pouvoir ne pouvait pas être annulé, à moins de se retrouver en contact avec du kairôseki. Il frissonnait rien qu'en songeant à cette pierre aussi redoutable que l'eau de mer. Le Gouvernement mondial s'en était servi lorsqu'il avait été capturé. Être privé de ses pouvoirs était une humiliation extrême.

    On lui avait toujours dit qu'un démon résidait dans le fruit qu'il avait avalé (et non pas mangé) étant plus jeune. Pourtant, il ne s'en serait pas aperçu si on ne l'avait pas mis au courant, il ne s'était à vrai dire pas senti changé. Mais si on le disait, alors c'était vrai. Il n'avait aucune raison de douter de ces vérités, après tout.

    Avec toutes ces distractions, Baggy se retrouva en désavantage dans ce combat. Il avait beau tenter de limiter la division de son corps, cet épéiste le dominait. Se battre avec trois sabres était redoutable, il ne parvenait pas à rassembler les morceaux de son corps sans risquer une blessure mortelle. Toutefois, il ne pouvait pas passer son temps à reculer, puisque son adversaire n'allait de toute évidence jamais se fatiguer.

    C'était un démon, il n'y avait absolument aucun autre terme pour le désigner. Il était bien trop puissant pour être un véritable être humain, de plus il dégageait une aura terriblement maléfique qui le faisait presque trembler. Son regard était celui d'un monstre habité par une haine qu'un humain ne saurait jamais supporter.

    Le clown commençait à paniquer sérieusement. Il était en désavantage. Il ne voulait pas perdre. Il ne perdrait pas. Jamais. Il avait encore de nombreuses choses à vivre, d'endroits à piller, d'individus à tuer. Ce gamin ne le vaincrait pas. Mais puisqu'il ne pourrait pas gagner à la loyale, il lui fallait trouver un autre moyen d'accéder à la victoire. Ce fut à ce moment-là qu'il repensa à ce garçon.

    « Quel dommage, ton ami doit être mort à présent, il n'aurait jamais pu survivre face à ce groupe que j'ai envoyé après lui. »

    Toutefois, l'épéiste ne parut même pas l'entendre, il continuait à se battre comme si de rien n'était. N'étaient-ils donc pas amis ? Dans ce cas, pourquoi ce garçon était-il arrivé juste après et semblait-il le connaître ? Même s'ils n'étaient que des connaissances, ne se souciait-il pas de lui ? Ou bien était-il réellement un démon, comme il l'avait pensé ?

    « Si cet abruti meurt à cause de ça, alors il n'est pas qualifié pour être mon capitaine. »

    Baggy, surpris par la réponse, perdit une seconde d'attention qui lui fut fatale. Le dos de la lame que l'homme aux cheveux verts portait dans sa bouche percuta sa tête qui tomba au sol et sur laquelle il posa son pied. Ses deux mains, qui auraient pu le sortir de cette situation, furent transpercées par les deux autres épées et clouées au sol. Le bretteur se retrouvait à présent au-dessus de lui, un pied sur sa tête et ses deux mains sur ses sabres qui maintenaient les siennes.

    Sous la douleur, le clown hurla. Il avait éliminé les seules parties de son corps qui auraient pu le sauver, le reste lui était totalement inutile. Désespéré, il essaya d'agiter la tête afin de se défaire de son emprise, or il ne pouvait pas la diviser. Le pied de l'épéiste se trouvait sur sa joue. Celui-ci le regardait d'un air haineux, son sabre dans la main. Dans son esprit, il hurlait une phrase en boucle : il allait le tuer. Sa vie allait se terminer ce soir même.

    Désespéré, Baggy poussa des gémissements en tentant vainement de dégager sa tête, ignorant du mieux qu'il pouvait la douleur qui traversait ses mains. Son adversaire semblait apprécier de le voir souffrir ; malgré son air meurtrier, il décelait une lueur de satisfaction dans son regard. Qu'avait-il donc fait pour mériter un tel sort ? Il ne se rappelait pas l'avoir eu comme victime, alors pourquoi tenait-il tant à le tuer ? Il baissa sa dernière lame lorsqu'une voix l'interrompit.

    « Zoro, arrête ! »

    Baggy écarquilla les yeux en entendant ces paroles. On le sauvait ! Quelqu'un allait l'empêcher de mettre fin à ses jours ! Une minute... Mais qui ?

    Face à lui se trouvait le jeune garçon de tout à l'heure qui avait osé s'amuser avec ses pieds. S'il avait paru naïf et illuminé lorsqu'il était arrivé, à présent il avait un regard sérieux et dur, ce qui s'était reflété dans le son de sa voix. Qui était-il pour donner un tel ordre à ce démon ? Un instant... S'il se tenait là, alors qu'en était-il de ses subalternes ?

    Coulant un regard derrière le garçon au chapeau de paille, le pirate découvrit avec horreur que chacun de ses hommes se trouvait à terre. Les avait-il tous battus ? Comment cette crevette possédait-elle une puissance pareille ? Il avait dû être aidé, c'était tout bonnement impossible... Quoiqu'il était parvenu à stopper le mouvement de ce fameux « Zoro ». Mais... Par Zoro, entendait-il le célèbre chasseur de pirates ?

    Sa terreur grandit à nouveau. Voilà qui expliquait tout. Était-il après sa prime ? Le Gouvernement mondial ne la lui donnerait pas, puisqu'il travaillait pour eux... Si ? Allait-il être trahi par ses employeurs ? Ne pouvait-il donc faire confiance à personne ? Il n'avait rien fait de mal... Enfin, presque. Mais ça ne comptait pas !

    Baggy reporta son attention sur le jeune garçon qui avait interrompu la lame de son adversaire. Pourquoi se faisait-il appeler capitaine par celui-ci ? Qu'est-ce que cela signifiait, exactement ? S'agissait-il de la mafia ? Non, ils n'utilisaient pas de termes pareils. Et, Zoro, faire partie de la mafia ? Et puis quoi encore ! Il était réputé pour tuer les pirates, pas s'allier à eux. Alors, dans ce cas, que se passait-il réellement ?

    En fait, le clown ne s'en souciait pas tellement. Il souhaitait surtout s'enfuir de là le plus vite possible. Pourtant, ses mains étaient meurtries et il était dans l'incapacité de bouger tellement la douleur se répandait dans son corps divisé en mille morceaux. Il avait sans doute une chance, étant donné que Zoro avait arrêté son geste en entendant son « capitaine ».

    Le bretteur regardait Luffy d'un air dur, meurtrier. Comment osait-il l'interrompre ? Il était sur le point de venger Kuina. Wadô Ichimonji était sur le point de goûter le sang de ce meurtrier jusqu'à plus soif. Il allait enfin payer pour ses crimes, après toutes ces années de recherche. Néanmoins, en entendant sa voix, il s'était arrêté dans sa lancée. Il ne l'avait pas tué. Pourquoi l'avait-il écouté ?

    « Il doit payer pour le meurtre de Kuina.
    - En tant que ton capitaine, je t'ordonne d'arrêter. Je ne veux pas d'un compagnon qui est guidé par la haine. »

    Ce gamin pouvait dire des choses intelligentes lorsqu'il le voulait. Zoro ne savait pas pourquoi il s'était embêté à répondre, ni même pourquoi il n'avait toujours pas transpercé la tête de cet assassin. Il aurait pu le faire depuis déjà de nombreuses minutes. Pourquoi écoutait-il Luffy ? Cela ne le concernait pas le moins du monde. Il s'agissait de son problème, pas du sien. Alors pourquoi intervenait-il ?

    Son capitaine était un pirate. Dès que l'un d'entre eux se trouvait non loin de lui, il entrait dans un état second où il était dominé par la haine, l'envie de tuer. Auprès de Luffy, il échappait à cet état d'esprit. Il parvenait à rester calme, son sang ne bouillonnait pas. Dès qu'il avait su que Baggy se trouvait loin de lui, il était devenu absolument incontrôlable, à un point comme il n'avait jamais été auparavant. Autant de colère en lui aurait dû lui faire peur.

    Cependant, depuis l'intervention de Luffy, Zoro sentait qu'il se calmait. Pourquoi ? Encore un mystère. Quel pouvoir ce jeune garçon exerçait-il sur lui ? Comment parvenait-il à le maîtriser, alors qu'il était lui-même un pirate ? Ce n'était pas normal. Il n'était pas normal. Lui non plus n'était pas normal, d'ailleurs. Ils étaient tous les deux différents, il s'agissait peut-être là l'explication.

    Le capitaine et le second se regardaient les yeux dans les yeux sans faillir. Aucun des deux n'avait l'intention d'abandonner. Plus les minutes passaient, plus le sang dans les veines de l'épéiste reprenait une allure ainsi qu'une température normales. Ce jeune Brésilien avait un impact sur lui qu'aucun n'avait jamais exercé jusqu'alors. Il l'intriguait de plus en plus, il cachait de nombreux secrets qu'il entendait trouver.

    Kuina, Kuina... Baggy cherchait dans sa tête où il avait déjà entendu ce nom. L'épéiste était-il le petit-ami de cette fille ? Le nom semblait plutôt asiatique, d'ailleurs il avait les yeux bridés et ressemblait à un... Japonais ! Mais oui ! Il se souvenait, à présent. Neuf années plus tôt, le Gouvernement mondial l'avait arrêté lorsqu'il se cachait dans un cirque. Il avait été condamné à mort, or on lui avait offert une alternative : il resterait en vie tant qu'il travaillerait dans l'ombre pour eux.

    Sa première mission lui avait été donnée tout de suite après son approbation : il s'agissait en effet de mettre fin aux jours d'une fille au Japon. Apparemment, elle était la fille d'une certaine personne, et était recherchée depuis quelques années déjà. On ne lui avait pas donné le nom de Kuina, mais un autre. Néanmoins, cela ne changeant rien puisque le sang de cette personne coulait dans ses veines.

    Cette gamine avait montré un certain talent au kendo, il ne pouvait pas le nier, pourtant cela n'avait pas été suffisant. Il avait laissé ses subalternes de l'époque saccager le village afin de leur faire croire qu'il s'agissait d'une simple attaque de pirates et non pas d'un ordre du Gouvernement. Il l'avait abattue de sang froid et un misérable moustique l'avait attaqué. S'agissait-il de Zoro ?

    « Il a tué nombre de personnes. Tu veux le laisser s'enfuir ?
    - Peu importe si tu me tues, chasseur de pirates ! Ta petite-amie est morte ! Même si on s'est trompé de cible, elle reste la fille de cette personne ! »

    Luffy regardait les deux hommes face à elle. Elle avait à peu près saisi la situation : Zoro voulait tuer ce clown bizarre qui se découpait tout seul parce qu'il avait tué sa petite-amie. La cause paraissait noble. Or, elle ne souhaitait pas le voir ainsi dans cet état. Cela lui faisait de la peine. De même, elle refusait l'idée qu'il se laissât habiter par la haine. Elle savait par expérience que cela ne donnait jamais rien de bon. Elle ne voulait pas voir Zoro mal tourner.

    Les dernières paroles du vaincu lui firent écarquiller les yeux : il s'agissait d'une erreur ? Zoro avait souffert de la sorte à cause d'une erreur ? Elle se moquait bien de la raison pour laquelle cette Kuina avait été tuée, mais si sa survie avait évité à Zoro toute cette peine et cette colère, alors elle ne lui pardonnerait jamais. Elle avait bien senti depuis ces quelques jours qu'il portait un lourd fardeau, comme elle.

    « Je n'ai pas dit que tu ne pouvais pas le tuer. Je veux juste que tu chasses cette haine. Je ne veux plus jamais te voir comme ça. »

    Zoro écarquilla les yeux puis les ferma quelques instants. Lorsqu'il les rouvrit, son regard avait changé : la colère semblait l'avoir quitté. Il ne savait pas comment cela était possible, surtout après la révélation que Baggy venait de faire : Kuina avait été tuée par accident. Il ne savait pas ce qu'il voulait dire lorsqu'il affirmait qu'elle était la fille d'une « certaine personne », cependant cela ne l'intéressait pas. Il s'agissait du passé dont il devait apprendre à s'affranchir.

    L'épéiste retira les deux sabres qui transperçaient les mains de son adversaire et les rangea après avoir essuyé le sang. Il ne voulait pas abîmer les lames. Baggy ne s'enfuirait pas, déjà parce qu'il tenait toujours sa tête et parce que la douleur était intenable. De plus, il était pétrifié en raison des dernières paroles de Luffy. Il avait toutes les raisons de l'être.

    Zoro sortit Wadô Ichimonji de sa bouche et le tint d'une main, en coulant un regard vers le visage de Baggy déformé par la terreur. Il n'avait aucune raison d'être habité par la haine, ce n'était pas lui qui se vengeait, mais Kuina. C'était elle qui devrait porter cette colère qui allait s'éteindre d'ici quelques secondes. Elle allait se venger, enfin, après neuf ans. Elle allait pouvoir reposer en paix.

    Zoro abaissa la lame qui transperça le front de Baggy, lequel n'eut pas le temps de réagir. Il ne put que conserver cet air horrifié avant de regarder dans le vide pour toujours.



    ____

    Voilà un chapitre pour fêter l'anniversaire de Nami, même si elle n'apparaît pas.

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Mer 4 Juil 2012 15:37 
15 000 000 Berrys
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 21 Mar 2012
Messages: 389
Localisation: Pourquoi cette question ?
J'ai bien aimé ce chapitre, avec un bon et beau combat de Zoro contre Baggy où l'on voit de plus en plus que tu ne feras pas comme dans le manga (mort de Baggy, meurtre de Kuina, Baggy subalterne du Gouvernement Mondial...), cependant, je dois avouer que le fait que tout ou presque se passe dans la tête des personnages me déplait quelque peu parce que la du coup, ça ne fait pas assez One Piece. Il n'y a pas beaucoup de dialogues également mais ça, c'est toi qui décide.
Sinon, je suis assez perplexe sur le fait que Baggy (qui est un pirate) s'interroge ainsi sur la signification du mot "capitaine" (si j'ai bien compris), alors comment l'appellent-ils ses hommes ? Pareil pour Zoro. Tout est-il issu de la tête de Luffy ?

_________________
Image



Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Mer 4 Juil 2012 17:03 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...
    Bah disons que le mot pirate n'évoque pas la même chose que nous. Dans ma fic, ce sont ceux qui ont mangé un fruit du démon, à l'exception des membres du Gouvernement mondial. Par conséquent, quand on parle d'équipage, on pense plutôt au milieu marin. Le terme capitaine n'a pas vraiment sa place ici, d'autant plus que la nature de la relation entre Luffy et Zoro n'est connue de personne. Le mot capitaine vient effectivement de la tête de Luffy, mais je ne t'en dirai pas plus.
    Je n'ai pas réfléchi au "nom" de Baggy, mais j'imagine qu'il se ferait plutôt appeler chef ou quelque chose du genre.
    Concernant ma façon d'écrire, eh bien je ne changerai pas le fait que je fais un point de vue interne qui change de personnage de temps en temps. J'ai toujours fonctionné de cette manière. Pour les dialogues, ils se multiplient au fur et à mesure des chapitres.

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Pirates des temps modernes
MessagePosté: Dim 29 Juil 2012 20:49 
1 Berry
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 23 Avr 2012
Messages: 21
Localisation: Вам хотелось бы знать...



    « Vous pouvez tirer. »

    Plongé dans son monde, le jeune étudiant banda son arc puis pointa le viseur en direction du centre de la cible avant de lâcher la corde. La flèche en carbone vola à vive allure avant de se planter au milieu de la cible, tout comme les précédentes, abîmant encore plus le polystyrène. Sans s'en soucier réellement, il renouvela l'opération jusqu'à ce que son carquois se retrouva vide, l'obligeant à terminer ainsi sa volée.

    Comme toujours, les cinq flèches avaient atteint le centre de la cible, provoquant l'admiration des autres membres du club de tir à l'arc qui venaient ici pour se détendre entre deux cours. Usopp ne se préoccupait pas des comportements qu'il pouvait provoquer en agissant de la sorte, il venait là simplement pour se détendre. Il avait souhaité s'initier au tir à l'arc étant donné qu'il n'en avait encore jamais fait avant.

    Depuis son enfance, il avait toujours eu une excellente vision qui lui avait permis de tirer à chaque fois dans le mille avec son lance-pierres. Ce don exceptionnel avait toujours provoqué de l'admiration auprès des plus jeunes aussi bien que des plus vieux. Il pensait notamment à Carotte, Oignon et Piment qui le suivaient partout à l'époque où il habitait encore au Sénégal. Cela faisait à peine deux mois qu'il était parti et ces garnements lui manquaient déjà.

    « Flèches. »

    Machinalement, Usopp se dirigea vers la cible tout comme les autres tireurs puis retira soigneusement les flèches comme on lui avait appris en prenant soin de ne pas les abîmer. Il faudrait un centre plus grand, les flèches qu'il envoyait allaient finir par se détériorer à force de se battre pour une place. Le jeune Africain aimait prendre soin des choses et détestait les voir maltraitées.

    La séance de tir à l'arc continua encore une bonne demi-heure, puis ils durent tous ranger le matériel avant de retourner en cours. Il avait de la chance d'étudier dans une université où il pouvait pratiquer ce sport, cela faisait des économies d'argent et de temps dans les transports. Il n'avait pas à s'embêter à aller à l'autre bout de Paris juste pour tirer des flèches.

    Usopp n'avait plus cours de la journée, or il devait se préparer pour aller à son travail. Malgré ses bonnes notes lorsqu'il se trouvait au Sénégal, la bourse qu'il avait obtenue lui avait été soutirée à cause de la corruption. Quelqu'un de riche la lui avait prise pour la donner à son enfant qui en avait déjà cinq ou six. Il avait bénéficié d'une opportunité pour étudier à l'étranger et il ne comptait pas la laisser passer en raison d'une question d'argent.

    Quand bien même son emploi du temps était devenu chargé, le jeune sniper avait la volonté de s'en sortir. Il en avait fait la promesse à Kaya qui se trouvait à Dakar. Il lui avait dit qu'il deviendrait un grand inventeur et qu'il créerait une machine qui exaucerait tous ses souhaits. Il avait préféré choisir ce genre de filière plutôt que la médecine qui l'attirait moins et était bien moins originale.

    Kaya était une jeune Française chez qui son père adoptif travaillait en temps que domestique. En raison de son corps fragile, ses parents l'avaient éloignée de la métropole et envoyée dans un pays chaud où ils avaient estimé qu'elle pourrait se reposer plus facilement. Usopp ne les avait rencontrés qu'une fois de loin durant toutes ces années où il l'avait fréquentée. En un sens, ils étaient tous les deux orphelins puisqu'ils ne s'occupaient de leur fille que financièrement.

    Son père, Yasopp, était parti alors qu'il n'était qu'un bébé pour travailler et ils n'avaient plus jamais entendu parler de lui. Sa mère, Bankina, avait fini par se dire qu'il était mort en raison des dures conditions de travail plutôt que de l'imaginer remarié avec d'autres enfants. Cela lui aurait brisé le cœur, en plus du fait qu'elle mourût lorsqu'il était bien jeune. Mais Usopp, lui, avait toujours cru que son père reviendrait un jour.

    Une épidémie de peste avait ravagé Syrup, son village, alors qu'il n'avait que dix ans. Tout le monde autour de lui se faisait petit à petit contaminer. Par peur que le mal se répande, les villages des environs avaient décidé de mettre le feu à Syrup afin d'exterminer la maladie et qu'elle ne les contamine pas. La peste commençait à atteindre le bétail, la famine menaçait.

    Usopp n'avait jamais été infecté. Il avait fait partie des seuls encore sains à ce moment-là. Il avait tout fait pour créer une pierre magique qu'il aurait pu tous les guérir, en particulier sa mère, et qu'il aurait lancé sur les habitants du village. Or, il n'y était jamais parvenu. Les vies s'étaient progressivement éteintes jusqu'à l'incendie. Cela avait pris tout le monde de court, nombreux avaient été ceux qui avaient tenté de s'enfuir, cependant des hommes avec des matraques les attendaient à la sortie du village.

    Lorsque l'incendie s'était déclaré, sa mère pouvait à peine bouger et ne quittait plus son lit. Usopp se débrouillait seul pour trouver à manger et survivre parmi cette population malade. Le feu avait débuté le soir, alors que le soleil était déjà couché. Il se rappelait encore de la peur, la terreur qu'il avait éprouvées lorsque les flammes avaient commencé à brûler leur toit. Il était resté auprès de sa mère dont les forces s'épuisaient un peu plus à chaque minute qui passait.

    Bankina lui avait ordonné de s'enfuir, de la laisser derrière. Paralysé par la peur, cet ordre n'avait rien arrangé à la situation. Il l'avait suppliée de venir avec lui, or elle avait persisté dans son idée, incapable de se mouvoir. Son père allait les secourir et ils pourraient vivre à nouveau comme une famille !

    « Tu as toujours eu beaucoup d'imagination, Usopp. Mais ton père ne reviendra pas, et si tu restes ici tu vas mourir. Je refuse de laisser mon fils mourir, alors va-t-en. »

    Il ne savait pas pourquoi il avait obéi. Il n'avait aucune idée de ce qui avait bien pu pousser son corps à bouger. Sans doute était-ce parce qu'il avait toujours été incapable de désobéir à sa mère. Malgré son amour profond pour elle, il avait peur de la mort, comme n'importe quel être humain. Peut-être était-ce son instinct de survie qui lui avait permis de sortir de leur modeste maison et de s'enfuir en courant dans la nuit illuminée par le feu menaçant.

    Malgré la présence des hommes des villages voisins qui traquaient ceux qui tentaient de s'enfuir, Usopp connaissait un petit chemin entouré par la végétation qui lui permit de s'éloigner de ce lieu de mort sans être repéré. Il courut longtemps, probablement des heures, en pleurant. Il avait du mal à croire que sa mère était morte, tout comme son père. Il refusait de le croire. Aucun des deux ne pouvait avoir perdu la vie.

    Son père avait promis qu'il reviendrait, sa mère le lui avait raconté. Il était forcément un homme de parole, alors il tiendrait inévitablement sa promesse, n'est-ce pas ? Quand bien même il était parti pendant près de dix ans, il finirait immanquablement par revenir à la maison. Mais il n'avait plus de maison où rentrer, dorénavant. Bankina était morte. Usopp avait disparu de Syrup, présumé mort. Son père serait triste en rentrant.

    Après plusieurs heures à errer, le jeune garçon essuya ses larmes. Il était un homme, à présent. Il ne pouvait pas pleurer comme un enfant ou bien il ferait honte à ses parents. À présent, il serait fort. Il affronterait les dangers et vaincrait. Il rendrait sa mère et son père fiers d'avoir un tel fils.

    Sa mère ne l'avait pas quitté sans lui donner des indications quant à l'endroit où il allait résider à partir de maintenant. Elle lui avait parlé d'un ami de son père résidant à Dakar qui prendrait soin de lui s'il lui révélait leurs liens de parenté. Aux dernières nouvelles, il travaillait chez de riches Français. Il le reconnaîtrait facilement dans la mesure où il possédait de nombreuses caractéristiques physiques.

    Ne possédant qu'un nom et une description quelque peu sommaire, Usopp marcha vers le nord en direction de la capitale qui se trouvait à environ une journée de marche. Il n'avait avec lui que ses habits ainsi que son fidèle lance-pierres qui ne le quittait jamais. Si on le menaçait pour une raison quelconque, il serait capable de se défendre, même si ses jambes tremblaient à cette supposition de danger.

    Le jeune garçon ne possédait que quelques souvenirs de cet épisode de sa vie. Il n'avait pas retenu tous les détails, il se rappelait simplement qu'il avait eu atrocement peur jusqu'à sa rencontre avec l'homme qui l'avait pris sous son aile. Il s'était attendu aux pires dangers, persuadé que des hommes s'étaient aperçus de sa disparition dans le village et en conséquence lancés à sa poursuite. Il avait toujours gardé une main sur son lance-pierres, tous ses sens en alerte.

    À présent, il ne saurait dire combien de temps avait duré son voyage jusqu'à Dakar. Il n'avait conservé que quelques images et sensations de cette période de son existence. Il ne saurait dire s'il avait rapidement trouvé l'ami de son père, cependant il lui semblait bien que ses recherches n'avaient pas été bien longues. Ce n'était pas si dur de trouver un homme roux avec une cicatrice sur un œil ainsi qu'un bras manquant. Et tout le monde semblait connaître Shanks le Roux.

    Usopp l'avait trouvé dans une taverne un soir. Il avait erré, demandé aux passants s'ils le connaissaient puis était finalement tombé sur une piste. Cela avait dû se passer à peu près ainsi, il n'en était pas absolument sûr. L'essentiel était qu'il avait finalement trouvé l'homme qui avait remarqué une ressemblance avec son père. Sans rechigner, il l'avait pris sous son aile et l'avait élevé.

    Shanks travaillait comme majordome chez la jeune Kaya depuis que la famille s'était installée à Dakar. Malgré son handicap, c'est-à-dire son bras manquant, il était respecté là-bas en raison de son intelligence et de sa capacité à raisonner. Dans la hiérarchie, il se trouvait juste en-dessous de Merry, le maître de maison lorsque les parents de la jeune fille n'étaient pas là, autrement dit tout le temps.

    D'un naturel ouvert et sympathique, nombreux étaient ceux qui le connaissaient en ville. Il semblait avoir familiarisé avec tout le monde, étant donné qu'il se souvenait de chaque prénom. Lorsqu'il allait à l'extérieur après son service ou bien pour faire quelques courses, on le trouvait à chaque fois avec un sourire et en train de bavarder avec des passants comme s'ils étaient ses amis depuis des années.

    Shanks était devenu son image paternelle. Yasopp n'ayant jamais été là, l'entrée de cet homme dans sa vie avait totalement bouleversé ses habitudes. Sa mère l'avait élevé du mieux qu'elle avait pu, cependant cela n'avait jamais remplacé la présence d'un père. En y réfléchissant, à présent, Usopp était content d'avoir eu un tel père adoptif. Grâce à lui, il n'avait jamais manqué de rien et il avait toujours été attentif à ses moindres demandes.

    Ils avaient vécu avec la plupart des domestiques au sein du manoir dans une chambre modeste. Merry n'avait vu aucun inconvénient à ce que Shanks ramenât un petit garçon, dans la mesure où il savait que cet homme ne provoquerait jamais de problèmes. En général, Usopp avait été plutôt bien accueilli par tous les habitants du domaine qui l'avait mis mal à l'aise, ayant habité toute sa vie dans une petite maison de pauvres.

    Les premiers mois avaient été consacrés à son adaptation dans ce nouveau milieu. Shanks l'avait laissé lui parler de lui-même afin de mieux connaître ce petit garçon qu'il allait élever dorénavant. Il avait grandi avec Yasopp qu'il n'avait pas revu depuis près de dix ans. Il avait vu Usopp alors qu'il venait de naître lorsqu'il était de passage à Syrup. Yasopp lui avait parlé de son projet de partir à la recherche de travail afin d'envoyer de l'argent à sa femme et son fils qui était sa fierté.

    La naissance d'Usopp l'avait totalement bouleversé, il avait souhaité le meilleur pour son fils. Il était prêt à abandonner la femme qu'il aimait juste pour s'assurer qu'il grandisse dans les meilleures conditions sans manquer de rien. Shanks ne savait pas ce qu'il était devenu après cela, ni où il avait bien pu aller. Il avait pensé le retrouver à Dakar, or il ne l'avait jamais croisé en dix ans.

    Tout comme Bankina, le Roux se disait aussi qu'il avait dû mourir depuis tout ce temps. Il avait voulu envoyer de l'argent à sa famille, or cette dernière n'avait pas touché un rond depuis son départ. Yasopp n'aurait pas été le premier à mourir dans sa quête pour un travail rapportant suffisamment pour mettre sa famille hors du besoin. À présent, seul Usopp restait persuadé que son père reviendrait un jour.

    Lorsque le garçon fut suffisamment en forme et remis des émotions qu'il avaient éprouvées depuis l'incendie, Shanks l'envoya à l'école. Il refusait de voir le fils de son meilleur ami illettré toute sa vie et incapable de trouver un travail respectable. Peu importaient les sacrifices, il tâcherait de faire ce que Yasopp avait souhaité lui donner lorsqu'il se trouvait encore en vie.

    Malgré le fait qu'il n'était encore jamais allé à l'école auparavant, Usopp s'était révélé très doué pour travailler. Petit déjà, il s'amusait à inventer des outils, des objets pour améliorer la vie de tous les jours. Son cerveau parvenait à comprendre des mécanismes compliqués assez rapidement et à les adapter selon ses besoins. À côté de cela, l'école était du gâteau.

    Le jeune garçon avait été fier de ses nouvelles connaissances et aimait les raconter pendant des heures le soir à son père adoptif qui l'écoutait avec un grand sourire. Sa vie avait ainsi duré de cette façon durant plusieurs mois, jusqu'à sa rencontre avec Kaya.

    Même s'il vivait dans le manoir avec son père, Usopp ne s'était jamais aventuré bien loin et était resté dans les quartiers des domestiques qui comportaient des chambres, des salles de bain ainsi qu'une cuisine où ils mangeaient tous plus ou moins ensemble. Shanks lui avait dit qu'il était déconseillé d'aller au-delà, car il y avait une jeune fille malade qui devait se reposer sans être dérangée.

    Le jeune garçon avait trouvé cela triste qu'on laissât cette fille toute seule toute la journée. Elle devait s'ennuyer. Et si elle était malade, alors c'était encore pire. Il s'était un jour promené dans le jardin en chantant des chansons populaires que sa mère lui avait apprises autrefois. Perdu dans ses pensées, il ne s'était pas rendu compte qu'il avait une spectatrice qui l'écoutait un sourire aux lèvres. Ce fut une fois sa chanson terminée qu'il la remarqua.

    « Je ne connaissais pas cette chanson, tu en as d'autres ? »

    Surpris, Usopp se retourna, puis aperçut à une fenêtre du premier étage une fille d'à peu près son âge, mais a priori un peu plus vieille d'un ou deux ans. Ce qui l'avait choqué furent ses cheveux blond platine ainsi que sa peau monstrueusement blanche. Lui-même était foncé étant donné qu'il était sénégalais. Il n'avait encore jamais vu quelqu'un à la peau aussi claire, voire blanche. Seuls ses yeux marrons lui donnaient de la couleur.

    Malgré son sourire, elle paraissait bien triste. Elle lui rappelait sa mère décédée, d'une certaine façon, à sa façon de sourire : prétendant que tout allait bien alors qu'elles portaient un poids. De même, elles possédaient toutes les deux cette aura de douceur. Sans même l'avoir rencontrée avant, Usopp s'enticha de cette jeune fille malade. Si elle était seule, alors il serait son ami. Parce que rester tout seul était triste...

    « Bien sûr ! Je suis Usopp, le grand aventurier ! J'ai voyagé sur tous les continents et ai appris de nombreuses chansons ! Et vous, gente demoiselle ? »

    Le sourire de la demoiselle s'élargit, ce qui lui fit chaud au cœur. Elle pouffa, cachant sa bouche dans l'une de ses mains avant de montrer des yeux pétillants. C'était bien ce qui lui semblait, au fond elle avait juste besoin d'un ami. Elle devait se sentir isolée dans cette grande maison, entourée d'adultes. Il allait à l'école tous les jours, aussi fréquentait-il des jeunes de son âge et entretenait-il une vie sociale. Shanks lui avait dit que les parents de la maîtresse de maison venaient parfois, or il ne les avait toujours pas croisés depuis qu'il vivait ici.

    « Je m'appelle Kaya. »

    Usopp aimait la voir sourire. Il avait pris l'habitude de venir la voir tous les jours après l'école ou tôt le matin lorsqu'elle ne dormait pas. Par chance, un arbre se trouvait juste devant sa fenêtre, aussi grimpait-il aux branches afin d'être à son niveau et de pouvoir lui parler sans avoir à hurler et ainsi attirer l'attention des domestiques qui le chasseraient. Shanks cautionnait ses escapades pour aller voir la jeune fille, à condition qu'il la laissât se reposer si elle était fatiguée.

    En terme général, le petit Sénégalais était plutôt apprécié par les habitants du manoir, pourvu qu'il ne leur fît pas de farces. Son père adoptif l'avait bien réprimandé pour ces raisons, cependant il n'agissait que dans le bien de Kaya. Tant qu'elle souriait, il était satisfait. Elle était sa meilleure amie, ils se disaient tout. Chaque jour, il inventait une nouvelle histoire qui les faisait tous les deux rêver.

    Globalement, il avait passé sept années tranquilles, sans le moindre problème, ne serait-ce que le mois qu'il avait passé loin de son amie. Lorsqu'il avait quatorze ans et elle seize, ses parents étaient venus passer un mois dans le manoir. L'ambiance chaleureuse qui régnait d'habitude s'était bien vite assombrie. Kaya considérait les employés comme de la famille, or ce n'était pas le cas de ses parents qui estimaient que les domestiques devaient apprendre leur place.

    Malgré les avertissements de Shanks, Usopp avait tenté de voir Kaya en montant à l'arbre. Il en avait payé le prix, y repenser le faisait frissonner. Heureusement, ce n'était que du passé. Ses parents étaient repartis et l'atmosphère familiale était peu à peu revenue, comme si rien ne s'était passé. Cela l'avait rassuré, ne pas voir sa meilleure amie pendant près d'un mois alors qu'ils habitaient sous le même toit avait été une véritable épreuve.

    Lorsqu'on lui avait parlé de la possibilité d'étudier en France, il avait d'abord hésité. Et Kaya ? Il se sentirait mal de la laisser toute seule. Elle était sa meilleure amie, elle se sentirait seule s'il partait et inversement. Elle sourirait probablement moins. Il n'avait pas osé lui en parler, or elle avait finalement remarqué assez rapidement que quelque chose le dérangeait. Incapable de lui mentir, il lui avait avoué ce qu'il avait sur le cœur.

    Sa réaction l'avait plutôt surpris : elle avait l'air heureux qu'on lui offrît l'opportunité d'étudier en France. Il était un bon élève, cela lui permettrait d'avoir des possibilités uniques dans la vie. Il ne devait pas s'embêter avec ce qui pouvait le retenir, il devait regarder droit devant lui pour avancer. Cependant, elle ne le laisserait partir qu'à condition qu'il lui écrive tous les jours sans faute. Ce serait une façon plus indirecte pour la faire sourire. Il pourrait lui raconter ses aventures d'étudiant dans un nouveau pays.

    Ce fut à ce moment-là qu'il lui donne sa parole de faire de son mieux et de devenir le meilleur inventeur qu'il fût. Au fond de lui-même, il espérait trouver un moyen de la guérir, puisque la médecine ne pouvait rien pour elle. Malgré la perte de sa bourse, il refusait de lui demander quoi que ce fût, pareil pour son père. Il devait apprendre à devenir indépendant et n'en serait capable que s'il ne se reposait sur personne.

    Il lui avait fallu un certain temps pour s'adapter à sa nouvelle vie, néanmoins il y était parvenu comme n'importe qui. Il bénéficiait d'une chambre d'étudiant sur le campus de son université, ce qui lui permettait de limiter les transports. Par chance, il avait aussi trouvé un travail non loin, lui permettant d'économiser du temps, déjà que ses journées étaient suffisamment chargées ainsi. En deux mois, sa vie était devenue parfaitement programmée, ne laissant plus autant de place qu'il le souhaiterait pour se détendre. Cependant, pour Kaya, il ferait n'importe quoi.

    Il ne manquait jamais de lui écrire chaque soir avant de dormir. Il lui relatait ses journées, ses pensées. Elle lui écrivait de son côté environ une fois par semaine. Ses lettres lui faisaient chaud au cœur, il les attendait à chaque fois avec impatience. C'était sa lumière dans cette vie qui devenait monotone. De même, il écrivait à Oignon, Carotte et Piment à peu près chaque semaine. Lorsque Kaya se reposait, il avait passé son temps avec ces gamins qui le considéraient comme un grand-frère.

    Son cœur était resté au Sénégal mais sa vie se trouvait dorénavant à Paris. D'ici quelques années, lorsqu'il pourrait se le permettre, il les inviterait tous à venir chez lui. Ce projet attendrait un long moment, le temps qu'il finît ses études et s'installât quelque part, toutefois il était prêt à attendre. Shanks et ses parents au Paradis seraient heureux de le voir réussir.

    Une fois le cour de tir à l'arc terminé, Usopp rangea le matériel avec les autres puis se dirigea vers la sortie du gymnase lorsqu'il remarqua un garçon d'à peu près son âge avec un chapeau de paille qui le regardait d'un air ébahi, des étoiles dans les yeux. Encore un autre ? Cela faisait d'ailleurs un moment qu'il ne s'était pas vanté de ses capacités, tellement sa tête était envahie des choses à faire. Étrange, pourquoi la vue de cet adolescent lui rappelait-il tout cela, alors que des tas d'autres l'admiraient à chaque séance ?

    « Je vois, toi aussi tu as été ébloui par la prestation du grand Usopp ? Puisque tu m'as l'air sympathique, tu peux avoir mon autographe !
    - Ouah, tu es génial !! Eh, ça te dit de faire partie de mon équipage ? »

    L’Africain haussa un sourcil. De quoi parlait-il ? Un équipage ? Était-ce une autre façon de demander un autographe ? À le regarder de plus près, il n'avait pas l'air d'être du coin, il avait dû faire une erreur dans la langue. Oui, probablement. Les membres du groupe de tir à l'arc ainsi que le professeur étaient tous partis, ils étaient en conséquence seuls dans le gymnase.

    « Est-ce que tu peux répéter s'il te plaît ? Je ne suis pas sûr d'avoir saisi.
    - Ah ! Je voulais te demander si tu voulais être un pirate avec moi ! »

    Au mot pirate, ses yeux s'écarquillèrent de stupeur et de terreur. Sa mère lui avait toujours dit de s'enfuir s'il croisait un jour un pirate. Les pirates étaient des êtres maléfiques possédés par un démon et possédant des pouvoirs leur permettant de tout détruire sur leur passage. Il fallait les fuir car les tuer était quasiment impossible, il fallait faire partie du Gouvernement mondial pour cela. Eux seuls étaient suffisamment puissants pour les combattre. Incapable de réagir, ses jambes se mirent à trembler violemment.

    « T-T-Tu es u-un p-pirate ?!! »

    A sa question, le Brésilien hocha la tête avec un grand sourire, comme s'il n'avait rien dit de mal. Usopp voulait fuir, or ses jambes ne lui répondaient pas. Il ne parvenait pas à faire le moindre mouvement. Ce pirate allait froidement l'assassiner. Il ne pouvait pas mourir maintenant, il devait encore inventer une machine qui soignerait Kaya. Quoique... Il lui avait demandé s'il voulait être un pirate avec lui. Cela signifiait-il qu'il avait un fruit du démon avec lui et qu'il comptait le lui faire manger ? Hors de question, il refusait d'être possédé !

    Sans savoir comment, Usopp trouva en lui une force cachée avec laquelle il attrapa son lance-pierres qu'il utilisa à la vitesse de l'éclair. Il avait agi si vite que lui-même n'avait pas vu le coup venir. Par conséquent, il était impossible que le pirate eût pu éviter le tir. Cependant, à sa terreur, il se trouvait toujours devant lui. Était-il parvenu à esquiver le tir du Grand Aventurier Usopp ? Des sueurs froides coulèrent le long de son dos. Il était fichu. Il n'aurait jamais l'occasion de créer cette machine.

    Le pirate éclata de rire. Un rire malsain, il n'en doutait pas. Pourtant, il ne parvenait apparemment pas à s'arrêter, se tordant dans tous les sens. Encore trop pétrifié, Usopp ne bougea pas et se contenta de le regarder, les yeux écarquillés depuis tout à l'heure. Enfin, au bout de quelques minutes, il sembla se calmer puis reprit son souffle avant de se tenir droit, une main sur son chapeau et toujours ce grand sourire aux lèvres. Adieu, Kaya, Shanks, les trois gamins...

    « T'es vraiment marrant ! T'es comme Zoro ! Chais pas pourquoi vous avez tous les deux voulu me tuer quand j'ai dit ça ! »

    Usopp ne comprenait pas. Haussant un sourcil, il continua de le fixer, stupéfait cette fois. De... De quoi parlait-il ? C'était comme s'il... N'avait pas l'intention de l'attaquer. Existerait-il des pirates gentils ? Non, impossible, ou bien sa mère lui en aurait parlé du temps où elle était encore en vie. Sa mère ne lui aurait jamais menti. C'était sûrement une feinte de l'ennemi, il n'y avait pas d'autre explication.

    Néanmoins, il avait beau le regarder, il ne parvenait pas à voir la moindre trace de malice dans ses yeux ni dans ses actions. À le voir, il s'agissait simplement d'un gamin innocent... Comment pouvait-il utiliser de telles expressions, alors qu'il avait dû tuer moult gens implorant pitié pour leurs vies ? Il devait se méfier, il se préparait forcément à le poignarder dans le dos. Quelle mort idiote pour un homme tel que lui.

    Malgré sa lâcheté, Usopp s'estimait être un homme de parole. Il comptait à tout prix sauver Kaya, peu importait le prix. Il ferait les sacrifices nécessaires pour la guérir, même s'il devait vendre son âme au démon. Si se joindre à cet homme au chapeau de paille allait prolonger sa vie malgré le fait qu'il doive manger un fruit du démon, alors il acceptait. Il ne laisserait pas Kaya tomber.

    « D-D'accord, j-j'accepte d'être un pirate avec toi. »

    À ces mots, le pirate poussa des hurlements de joie et sauta partout, laissant le tireur d'élite perplexe. Il ne s'était pas attendu à une telle réaction de la part du chapeau de paille. En tout point, il ressemblait totalement à un gamin. C'était le mot pour le désigner, il avait l'air si puéril dans sa façon de se comporter... Il ne comprenait décidément pas. C'était totalement déstabilisant, il ne savait même plus à quoi s'attendre de sa part.

    Alors qu'il commençait à baisser sa garde, le pirate lui saisit le poignet et commença à courir. Où l'emmenait-il ? Dans sa planque ? Là où il avait entreposé le fameux fruit du démon qu'il comptait lui faire manger ? Mais pourquoi voulait-il lui en donner un ? Quel intérêt y avait-il à se joindre à lui ? Il n'était qu'un Sénégalais avec une bonne vue venu étudier à l'étranger. C'était tout, il n'y avait rien à rajouter. Il ne voyait pas ce qui avait pu retenir l'attention de cet adolescent.

    Quel fruit comptait-il lui faire manger ? Était-ce douloureux ? Allait-il souffrir au moment où le démon allait prendre possession de son corps ? Aurait-il encore toute sa conscience ? Et surtout... Se souviendrait-il de Kaya ? Il était terrifié. Et s'il l'oubliait et en venait à lui faire du mal ? Si c'était le cas, il ne se le pardonnerait jamais. Il ne voulait pas disparaître et laisser un maudit démon le posséder. Il voulait rester lui-même.

    Pourtant, Usopp ne parvenait pas à se défaire de l'emprise de son kidnappeur qui courait à vive allure en riant. Qu'y avait-il de si amusant ? Était-ce si jouissif de détruire la vie d'un individu en l'obligeant à devenir un pirate ? Pourquoi lui... Il voulait juste être un étudiant normal. Était-ce trop demander ? Posséder des pouvoirs surnaturels ne l'intéressait pas, surtout qu'il allait être traqué par le Gouvernement mondial sitôt qu'ils auraient découvert ses nouvelles capacités.

    Perdu dans ses lamentations, Usopp remarqua lorsqu'ils eurent atteint leur destination qu'ils se trouvaient dans l'une des résidences universitaires du campus. Ce pirate habiterait-il là ? Question stupide. Bien sûr, puisqu'ils se trouvaient devant la porte et qu'il venait de sortir la clé pour ouvrir. Un repaire de pirates se trouvait au sein de cette université et personne n'était au courant ! Il fallait qu'il le dénonce rapidement, ou bien...

    Avant d'avoir l'occasion de s'enfuir, le pirate au chapeau de paille le fit rentrer dans la petite chambre d'étudiant où il aperçut un homme assis contre un mur, qui apparemment était endormi jusqu'à leur arrivée. Ce dernier lança aux nouveaux arrivants un regard meurtrier qui le fit se figer sur place. Il était encore plus terrifiant que celui qui l'avait traîné ici ! Quel sort lui réservaient-ils ? Pourquoi avait-il accepté l'offre de ce type ? Peut-être qu'il l'aurait laissé vivre même s'il avait refusé... Qui sait, il n'avait pas essayé après tout.

    Soudain, Usopp remarqua un léger détail qui le troubla encore plus : à côté de l'homme aux cheveux verts se trouvaient trois épées. Il avait entendu les rumeurs concernant un chasseur de pirates dont le physique correspondait exactement à ce qu'on disait ainsi que des trois sabres. Il n'y avait pas de doute, il s'agissait là de Zoro Roronoa, le chasseur de pirates ! Que faisait-il ici en compagnie de l'étudiant au chapeau de paille ? L'avait-il vaincu, lui aussi ? Lui avait-il fait manger un fruit du démon ?

    Incapable de faire quoi que ce fût, le jeune Sénégalais attendit que le jugement fût prononcé. Il ne pouvait rien faire face à deux pirates, surtout si l'un d'entre eux était armé de trois épées. Il ne faisait absolument pas le poids avec son lance-pierres. D'ailleurs, en y repensant, l'inconnu avait dit que Zoro avait tenté de le tuer en le rencontrant. N'y serait-il pas parvenu, lui, le démon incarné ? Et pourquoi était-il passé dans le camp adverse ? Quelle puissance monstrueuse cet adolescent au chapeau de paille possédait-il ?

    « Luffy, qu'est-ce que t'as encore fait ? Tu ne vois pas qu'il tremble ? »

    Ah, ainsi celui qui l'avait abordé après le tir à l'arc se dénommait Luffy. Au moins il avait un nom à attribuer à cette tête. Zoro essayait-il de fraterniser afin de baisser sa garde et mieux le poignarder dans le dos ? Quel plan mijotaient-ils tous les deux ? L'épéiste se leva, s'étira pour chasser les crampes causées par sa sieste puis regarda Luffy d'un air meurtrier tout en lui tirant la joue avant de poser ses yeux sur le nouveau venu.

    « Je ne sais pas ce que cet abruti t'a raconté, mais ce type est inoffensif et il n'y a aucun démon en lui. »

    Usopp écarquilla les yeux puis regarda Zoro avant de reporter son regard sur Luffy. Maintenant qu'il le disait, c'était vrai qu'il n'avait pas l'air si méchant... Le Japonais n'avait pas l'air de mentir en disant cela. Cela pouvait paraître stupide, mais il le voyait dans ses yeux. D'une certaine façon, maintenant qu'il y pensait, ce Luffy lui rappelait d'une certaine façon Kaya par sa bonne humeur et son innocence. Sans savoir pourquoi, sa méfiance diminua.

    Il ne se rendit même pas compte qu'il serait en retard pour son travail, tellement la situation actuelle occupait la totalité de ses pensées. Or il s'en moquait bien. Son emploi était pour le moment le cadet de ses soucis. Il ressentait quelque chose de nouveau, qu'il n'avait pas éprouvé depuis deux mois, depuis son arrivée ici. Sa vie n'avait rien eu de passionnant depuis qu'il avait quitté Dakar. Néanmoins, il le sentait, elle était là. L'excitation.

    Finalement, peut-être que sa vie monotone allait cesser de l'être.

_________________
« Я хотел показать ему душу карт, но я терял ! Это уже не легко показать душу человека, тогда душу карта... »
© Joueur du Grenier
Image
Spoiler: Montrer
Image


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 18 messages ]  Aller à la page [1], 2  Suivante

Heures au format UTC + 1 heure [ Heure d’été ]


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 41 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Rechercher:
Aller à:  
Powered by phpBB © 2000, 2002, 2005, 2007 phpBB Group
Traduction par: phpBB-fr.com