Ça transparait dans ce qu'évoque Ange Bleu mais il faut, je pense, le formaliser : la réalisation de EVA suit finalement trait pour trait la situation personnelle de Hideaki Anno et notamment ses nombreux sauts d'humeur devenus légendaires au fil du temps. Lorsqu'il propose ce projet à la GAINAX, on voit apparaître dès les premières pages du dossier (pour les intéressés, à retrouver dans
Le Grand livre de Neon Genesis Evangelion, édité par Glénat chez nous) une envie évidente de tendre vers une série proche de l'idée qu'ont les enfants du genre Mecha : après ses troubles importants suite à l'arrêt de la série
Nadia et le Secret de l'Eau bleue, on peut voir de nos jours qu'il aspirait à prendre en main quelque chose qui correspondait à ses goûts issus de l'enfance. Avec l'avancée de la série, on a pu voir aussi qu'il y collait allègrement des éléments qui provenaient de ses séries fétiches d'adolescents et de jeune adulte (ou « (d')Otaku », mais j'associe mal ce terme avec Anno même si il est presque à la base du phénomène avec ses compagnons d'arme de la GAINAX après les conventions Daicon III et IV).
L'année 1996 écoulée et la série terminée, Anno se retrouve devant un plus grand vide existentiel qu'à l'arrêt du
Secret de l'Eau bleue : EVA avait été une telle catharsis pour lui suite à ses premiers troubles qu'il ne savait plus quoi faire devant l'ampleur des évènements, notamment les menaces de mort pour les épisodes 0.25 et 0.26 ainsi que les graffitis sur les locaux de la GAINAX appelant à faire des choses plus que condamnables aux femmes de sa famille. Je ne suis pas spécialement l'hypothèse du manque de moyens imposé par la GAINAX pour aboutir aux épisodes 0.25 et 0.26 (même si les restrictions budgétaires étaient réelles et confirmées), je pense que Anno tendait dès le départ à une telle chute, qui correspond à l'acception qu'un changement de situation devenait inévitable dans sa vie. Après tout, en 1995, il avait déclaré « Si quelqu'un aime les robots géants et les filles animées sexy, est-ce que cette personne peut rester heureuse passé son vingtième anniversaire ? Peut-être, si cette personne ignore qu'il existe un plus ample bonheur là-bas, dans le monde réel. Je crois que je commence à douter de certaines choses. ».
The End of Evangelion en 1997 est donc un feu d'artifice de contradictions pour Anno : même si il se convainc de ne pas en avoir envie, il est pressé par ses camarades de la GAINAX de faire un film pour récolter rapidement le plus de monnaie possible pour contenter un public de fans qui ont dédié depuis quelques années toute leur passion pour sa série, quitte à développer des formes d'attachement sévères auxquelles Anno n'adhère plus du tout. La trentaine bien tassée, ça ne l'intéresse plus d'être le génie de cette frange de la population (quoique, vu l'impact transgénérationnel que ça a eu de l'époque jusqu'à nos jours, c'est réducteur comme formule), ça l'intéresserait de n'être plus seul dans la vie. À partir de là, outre développer des points et des idées supplémentaires, Anno va réaliser le temps d'un film ce que l'on connait tous, à savoir la martyrisation à l'extrême du casting féminin de EVA histoire de faire passer l'envie à une frange du public d'y revenir.
Le tournant positiviste dans sa carrière se situe en 2002, année marquée par son mariage avec Mayoco Anno. Ayant retrouver une raison de vivre auprès de la mangaka, il se remet peu à peu à côtoyer sa sphère d'influence traditionnelle (comme participer en invité pour le doublage de
Abenobashi - Magical Street de Yamaga du côté de la GAINAX voire carrément produire son film live de
Cutey Honey), et donc retrouve progressivement une envie de retourner au charbon. Catharsis oblige, il va retrouver ce qui lui colle le plus à la peau : EVA. À partir de là, on vit l'histoire en marche et on attend de voir ce qui se passe. Pour se convaincre de ces fluctuations chez Anno, on peut se pencher sur l'évolution dans l'écriture de son personnage-miroir par excellence, Shinji : l'adolescent qui découvre le bonheur de la vie de 1996 a laissé place en 1997 à un adolescent totalement désabusé et déconnecté de la réalité, et là, la tétralogie désormais nous dresse significativement le portrait, notamment depuis 2009, d'un adolescent qui se décarcasse pour garantir le bonheur de ceux qu'il aime. De même, là où Asuka était en 1996 et 1997 presque l'idéal-type de la femme pour Anno, irascible et inaccessible mais présente à la fin quoi qu'il arrive, il y a une évolution sensible dans la tétralogie vers le modèle de Reï dans les premiers temps, plus apaisé. Peut-être est-ce là une marque de la sérénité qu'a trouvé Anno depuis qu'il a une vie de couple.
En tout cas, c'est avec une vision comme celle-là que l'œuvre de Hideaki Anno a une qualité inimitable à mon esprit.
le-colombien a écrit:
Autre chose: Qui saurait ou trouver des BRD de 1.11??? Je suis en belgique et je n'en trouve nulle part :s
Je conseillerais à ce propos Amazon, mais du côté de la Grande-Bretagne : certes le packaging de Funanimation n'est pas celui auquel ont eu droit les Japonais (et les détenteurs de l'édition collecteur chez Dybex), mais leur tarif me semble beaucoup moins élevé que ce qui se fait par ici.
Ange Bleu a écrit:
Le titre anglais de RoE 3 n’est pas encore connu.
Même si Misato lâche seulement « Q » avec son accent anglais dans le générique, on voit fréquemment depuis la sortie du film l'annotation « Quickening » pour
RoE : 3.0 sur le net.