Eh non jeune pré-pubère en surcharge hormonale, à ce stade du topic tu l’auras certainement déjà compris : Lulu femme nue ça n’est pas la biographie d’une strip-teaseuse. Si donc tu es en manque de sensations fortes adresse toi plutôt à LetoII, ici on parle d’histoires de cul, mais avec pudeur.
Cela étant dit une question demeure : comment faire sa pub à la Bd d'Étienne Daveaudo sans compter sur son titre racoleur ? Eh bien mesdames et messieurs c’est compliqué.
« C’est vachement bien » Lulu femme nue, voila tout ce que j’ai pu dire moi en finissant la lecture de ces deux tomes tout en douceur. Seulement il parait que ça ne suffit pas, alors je vais devoir faire un effort.
Commençons donc par les personnages… ou par l’histoire… ou par les deux !
Lulu donc est une héroïne des temps moderne, sorte de superwoman des années 2000. Mais comme l’émancipation féminine est, parait-il, acquise depuis longtemps elle reste coincée derrière sa cuisinière, ne recourant à sa résistance surhumaine que pour supporter toutes les taches ménagères, l'éducation de ses trois bambins et l'humeur très aléatoire de son mari. Ayant quitté depuis trop longtemps ce qu'on appelle la « vie active » elle ne parvient pas à retrouver un boulot, les finances de la famille ne sont pas au beau fixe, les relations conjugales se résument à peu de choses et elle-même, lulu, semble peu à peu s'assortir à sa vie : terne, étriquée, déprimée et déprimante.
Et puis un jour, par ce que la pression est trop forte, par ce qu'on lui en donne l'occasion, par ce que quelqu'un d'autre ose formuler l'idée pour elle, elle « volte », elle s'échappe, comme une bagnarde de la vie quotidienne et va vivre une aventure au bord de la mer. Quelques heures, quelques jours, quelques semaine loin de tout où elle redécouvre les plaisirs simples de la vie, des rencontres, de l'oisiveté, où elle se redécouvre elle-même, sa joie de vivre et son culot.
Cette femme qui laisse tout derrière elle, qui abandonne ses amis, son mari, ses enfants, ses responsabilité c'est quelqu'un qu'on connait : une mère pour certains, une voisine pour d'autres, soi-même peut-être aussi, ou celle qu'on ne voudrait pas devenir. Mais dans sa vie où la précarité matérielle est inexorablement devenue tout autant émotionnelle elle parvient en s'évadant à créer un changement, à ramener un peu de vie, un peu de joie, un peu d'irresponsabilité salvatrice.
En dessinant les aventures de Lulu à la troisième personne, en choisissant pour narrateurs des amis et des proches de son héroïne, en faisant de son récit un puzzle auquel chaque personnage ajoute sa petite pièce, Etienne Daveaudo parvient à nous faire pénétrer dans l'intimité de la jeune femme avec une douceur infinie. On contemple avec elle les aléas de la vie mais sans briser sa bulle, sans céder au voyeurisme et, surtout, sans être tentés de la juger.
Si Lulu ressemble un peu à ces femmes dépassées par la vie sur lesquelles certains JT font leur beurre son histoire est à milles lieues des gros titres racoleurs que l’on connait trop bien. Elle nous montre que parfois les choses peuvent être simples, que les hommes ne sont jamais tout blancs ou tout noirs et qu’un grand courant d’air dans un grenier moisi suffit parfois à rendre l’atmosphère plus supportable
L’histoire est touchante, les personnages sont justes, ce qu’il faut de bête, ce qu’il faut d’attachant, « ce qu’il faut de sanglots pour un air de guitare ».
Servie par un graphisme simple et très agréable, par une mise en couleur extrêmement réussie, par des dialogues bien écrits et une narration intimiste, cette Bd est un petit plaisir sans fioriture mais plein de sincérité.
_________________ "N'acceptez pas que l'on fixe, ni qui vous êtes, ni où rester. Ma couche est à l'air libre, je choisis mon vin, mes lèvres sont ma vigne. Soyez complices du crime de vivre et fuyez !" ¿’
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