Luffy.
EnOd, GT1 a écrit:
On ne m’enlèvera pas une idée qui s’est forgée au fer rouge dans mon esprit, celle que Luffy, ce petit bout de caoutchouc, à l’humeur et à l’humour salvateurs sera toujours une relique à part dans l’univers infini des mangas. Je suis bien d’accord avec chacun de vous, fervents défenseurs ou cyniques détracteurs de ce héros au grand cœur : il est des clichés qui se retrouvent à chaque coin de rues dans la puissante tanière d’un virus nommé Shônen. Je suis bien d’accord pour exprimer avec vous la vision que le héros d’un Shônen sera inlassablement un idiot, empreint d’idiotie, ne comprenant le monde et les autres que par son regard peu clairvoyant et lucide. Ces images qui s’accumulent dans nos têtes telles des lœss qui viennent se déposer, transportés par un vent à la déjection sucrée, sont un fait avéré. Nous devons ici réviser nos classiques, car c’est en cela que consiste un Shônen, règle préétablie qui jamais ne périra. Bien entendu, on peut porter une conception fatidique à ce phototype arriéré, ne voyant ce cliché que comme une tare à ce qui pourrait être le renouveau d’un genre épuisé. Certes, trois fois certes (certes, certes, certes), mais remarquons cependant que le cas de Luffy est bien différent de ce que nos résidus mentaux et préjugés cruels nous laissaient à penser car Oda réussit bel et bien la passe magnifique de tourner des images éteintes de sens et de symboliques pour finalement s’en servir comme révélateur à ce qui peut être qualifié de génie novateur. Oui, Luffy est novateur ; et il est novateur à bien des égards parce qu’il renouvelle justement un genre épuisé, comme je l’ai déjà signifié. Partant de valeurs empreintées à des personnages archi-connus, Luffy se démarque par sa singularité extrême : de ses mimiques inconcevables à sa pensée très libertine, en passant par sa vision très anarchique du monde, il prône la pensée libre, il prône l’absolution des règles, des mœurs ordinaires, il prône enfin une amitié toute entière, sacrifice puisé dans l’essence de ses convictions. Luffy est un personnage plein d’ambigüités. Pirate, il n’hésite pas malgré tout à apporter sa divine aide à ses potentiels ennemis. Pirate, il prêche des paroles dignes du plus grand des plus grands des sages. Alambiqué au possible, il se fera des amis, marines de leur état. Par le reflet même de sa destinée, trajectoire surprenant d’un forban rêveur, sa légende se dessine. Par la quintessence originelle de One Piece, Luffy trouve une identité pleine et entière, manifestant son assise dans l’étude spirituelle d’une pensée croisée entre un nietzschéisme latent et un épicurisme patent. Mélange des goûts et des couleurs, profond et mystérieux, résolument gaffeur, toujours charmeur et exquis, jamais pesant ni crispant, Luffy nous enseigne expressément des valeurs que (très) peu de mangas peuvent se targuer de véhiculer. J’en veux pour seul et unique exemple la succulente scène qu’il nous a offerte lors de son escale délicieuse à Alabasta. Remarquez. Il est bien peu de héros « Shônéiques » qui ont la suprême fortune de pouvoir vanter leurs dires, tranchants et secs, tout autant que vérités obvies. Je veux évidemment parler de son admirable tirade qui prend à témoin une Vivi meurtrie et abattue, à l’automne de l’abandon : il y aura forcément des morts, telle est la fatalité. Voilà la réponse, voilà ce que l’Eden des rubans noueux de banalités ne pourra jamais puiser : une inconsciente conscience face à la cruauté du monde. Derrière ses airs marquants d’un sentiment de déjà-vu, Monkey D Luffy est un souffle nouveau, rafraichissant et pionnier, fondement de ce qui sera assurément une norme future, un mythe s’inscrivant en filigrane dans une histoire qui se révélera historique…
Votez pour Luffy, tout simplement.