Ah Gatsby… On dirait qu’ils se sont passés le mot : entre Les Hauts de Hurlevent et Jane Eyre l’année dernière et L’Écume des jours et Gatsby Le Magnifique cette année, ils ont décidé d’adapter tous mes romans fétiches. Et The Great Gatsby, lui, fait partie de mon top 3. Malaimé à sa sortie, Gatsby peine encore à convaincre certains spécialistes de la littérature de son génie (un critique ciné de je ne sais quel magazine américain disait « bon le film est raté, soit, mais bon comme Gatsby n’est pas un chef d’œuvre, on peut pardonner », mais oui mais oui). Mais chez moi, ce nom évoque beaucoup plus. Je ne suis pas frileuse aux adaptations cinématographiques de mes romans favoris, il faut le savoir. Du moment que c’est bien fait. D’autant plus que ce n’est pas un livre dur à réaliser, ça me semble l’un des plus faciles. Là où L’Écume des jours me semble un vrai casse-tête, Gatsby appelle au cinéma.
C’est pourquoi j’avais déjà vu y a quelques années la version de 1974 avec Robert Redford. Monsieur Robert Redford. La version n’était vraiment pas parfaite, un peu plate, pas très osée, le mot « ouais » pourrait la qualifier. En revanche, il y avait un Robert Redford magistral, incarnation parfaite de Gatsby dont l’aura plane pendant tout le film (comme le livre quoi). Des deux personnages secondaires : on oubliera Nick, transparent mis à part lors de la réplique où il lance son unique compliment à Gatsby, et on détestera (ou pas) (paraît qu’il n’y a que moi) Mia Farrow. Je la trouve personnellement insupportable non pas du fait de son personnage mais car elle rend le personnage complètement monotone, toujours plate, sans aucune émotion réelle. Rien que d’y penser ça m’agace. Bref, faire un nouveau The Great Gatsby pouvait être « aisé » dans le sens où il n’y avait pas déjà un monument derrière. Sauf pour la performance de Robert Redford, mais du coup on a pris pas n’importe qui : Léonardo Di Caprio. Il fallait au moins ça. Ainsi, quand je vois ce projet qui ne comptait pas encore de réalisateur et où Gatsby = Di Caprio, j’étais joie. Mais il fallu qu’on nous mette Luhrmann derrière. Choix risqué qui ne m’enthousiasmait guère. Mais je gardais espoir, je vous prie de croire que je gardais espoir. Vraiment.
J’ai patienté. Je le vois. Les premières minutes annoncent le pire, si le film est comme les premières minutes du film, je ne vais pas en sortir vivante, c’est horrible. C’est moche, c’est laid. Il essaie de manier la 3D mais n’y arrive pas. Tu sais pas pourquoi il choisit tel angle (cherche-t-il l’angle le plus laid ?). Il y incruste des images d’époques, ouais bof bof. Fait une tonne d’effets qui se surenchérissant pour nous signifier que tout est opulence, on avait compris, on avait pas besoin de ça (et les gars, c’est pas parce que vous traitez de la superficialité que vous êtes obligés d’être lourdingues et d’oublier la subtilité… Et merde, je deviens comme Pauline Kael moi – le talent en moins –). Ne nous prends pas pour des débiles, Baz, je t’en supplie, on vaut mieux que ça. Nan franchement, j’ai eu TRES peur. Au moins, je ne pouvais être que choquée positivement par la suite, le niveau était tellement bas… Alors parfois il retombera dans cette médiocrité, les scènes de courses sont laides, ses scènes où la caméra plonge des gratte-ciels pour regagner la rue aussi. Je trouve, c’est personnel, cette esthétique horrible. Je ne suis pas à la recherche de l’esthétisme hein, mais parfois quand ça m’agresse les yeux sans raison, j’estime que c’est trop. Cependant, je ne vais pas être de mauvaise foi, quelques scènes (elles ne sont pas nombreuses, j’en dénombre 3) sont bonnes. Certaines très bonnes d’ailleurs, d’autres juste bonnes avec quelques défauts. Il s’agit de : la « fameuse » scène des retrouvailles (celle là a quelques défauts mais j’y reviendrais plus tard car c’est plus dû à l’écriture que la réalisation), la scène du pic à glace et, celle que je trouve la plus étrangement réussie : la découverte de la maison de Gatsby et plus particulièrement la scène des vêtements. Voilà, c’est tout. La « fameuse » scène de la piscine est – je trouve – nulle. Idem pour la scène devant le garage.
Puisque l’on n’est dans la partie « critique », je vais continuer. La BO. J’ai rien contre les BO anachroniques (voire j’aime ça, allez savoir pourquoi) mais là les morceaux sont parfois mal choisis et ne vont pas à la scène qu’elles ‘illustrent’. Ainsi, No Church in Wild que j’aimais et que je trouvais adapté (si si) à la bande annonce ne va pas, selon mes goûts, au film. Quelques chansons arrivent cependant à se détacher (étonnamment celle de Lana Del Rey, comme quoi tout arrive). (Même celle de Florence and the Machine ne claque pas, c’est pour dire mon objectivité tant j’aime ce groupe.) Revenons maintenant aux points « mitigés » du film. Tout d’abord, l’écriture. J’ai été surprise, l’écriture était efficace mais plutôt intelligente. Assez fidèle (y a quand même un « gros » truc – pour moi – qui a été supprimé et ça a un peu de mal à passer, surtout que je devine très bien les motifs de cette suppression d’information et cénul), il a cependant le défaut de rendre le personnage de Gatsby beaucoup plus … « neu neu » qu’il ne l’est. Oui Gatsby est mal à l’aise, oui ça nous fait esquisser un sourire, mais là on rie quand même bien à ses dépends sévèrement. Mais soit, si la réalisation avait suivie, j’aurais pu pardonner tout cela (mais la réalisation n’a hélas pas suivi).
Niveau casting maintenant. Comme je l’ai dit j’étais plus contente que Di Caprio ait le rôle, il avait la carrure pour ce genre de personnage. Le truc c’est que même si Di Caprio est « le meilleur de sa génération » (d’après certains – et d’après moi aussi :p), il a quand même parfois besoin d’être dirigé. Ce n’est pas le cas ici. Du coup, il est bon mais il n’excelle pas. Robert Redford restera donc Gatsby. En revanche, j’ai été surprise plutôt positivement par Maguire qui campe un solide Nick et qui arrive à le rendre attachant. Et c’est con, mais vraiment, c’est vraiment con, si y avait eu un autre réalisateur derrière, ça aurait pu être génial. Car voilà Maguire/DiCaprio ont réussi à faire ce que le 74 avait échoué en partie : rendre l’histoire d’amitié plus forte que celle d’amour, comme dans le roman. Et ça, c’était cool. Enfin, Carey Mulligan, toujours très bonne. Elle efface Mia Farrow en un revers de main. Elle est moins énorme que dans d’autres films (Shame) mais avec ce réal, cette écriture, cette non-direction, elle s’en sort très bien.
Voilà, j’ai vu Gatsby. J’espère revoir une autre adaptation d’ici 40 ans, avec un combo réal-écriture-acteurs-actrices parfaits. J’ai le droit de rêver, non ?
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