Justice League n'est pas le film qui remettra en place mes
a priori sur les
"Comic Cinematic Universe". A quoi bon s'acharner si c'est pour n'en évacuer que des méchancetés ? m'objectera-t-on à raison.
Je pense que le film est un cas d'école et un fascinant objet d'analyse qui n'a pas fini de nous faire travailler. Ne serait-ce que son développement catastrophique, qui mêle chaos industriel avec le rétropédalage de la Warner dans la préproduction du film lors de la débâcle critique de
BvS, reshoot avec correction numérique de la moustache d'un des acteurs (les retouches sont bien faites mais elles n'ont pas su rendre la véritable forme du visage d'Henry Cavill, je me suis candidement demandé pendant toutes ses scènes s'il n'était pas malade avant de me souvenir de cette histoire de moustache) ; et tragédie personnelle avec le décès de la fille de Zack Snyder qui l'a malheureusement amené à quitter le navire avant la fin, devrait alimenter pendant plusieurs années quantités d'analyses et de spéculations quant aux choix qui ont été fait pour aboutir au produit final déséquilibré.
Pour ma part, j'ai eu l'impression d'être remué dans un caisson pendant deux heures par un récit tiraillé, trop gros et désincarné pour m'être sympathique en lui-même.
Gros parce que j'ai l'impression que le film combine deux histoires qui auraient dû être traitées séparément pour l'être correctement : d'une part le montage de la JLA sans Superman, qui aurait nécessité de poser mieux les nouveaux personnages introduits (d'autant plus que Batman et Wonder Woman ont également une scène d'introduction "au cas où vous n'étiez pas là au précédent épisode") et d'autre part la résurrection de Superman qui est très rapidement traitée et avec une facilité incroyable ne permettant pas d'appréhender correctement le deuil des personnages et le bénéfice qu'ils acquièrent en intégrant Superman à leur ensemble.
Désincarné car (1) j'ai déjà oublié la tête du méchant au bout d'une journée de film (avec WW, j'ai l'impression que le DCCU a le don de nous sortir des méchants au chara-design anonyme, j'arrive même à trouver Doomsday réussi en comparaison), (2) la structure de l'histoire de Joss Whedon rappelle trop fortement les deux opus
The Avengers (on a même à nouveau un pays d'Eurasie centrale qui est le théâtre du final), (3) demander à Danny Elfman de composer la BO pour au final utiliser les thèmes du Batman de Burton et du Superman de Donner est une idée aberrante qui concourt à aplatir l'identité du film (d'autant que j'ai toujours trouvé chouettes les thèmes de Zimmer et Holkenbourg sur BvS et MoS) et (4) le personnage le plus logiquement au centre du récit vu les enjeux avec les
infinity cubes de pouvoir devrait être Cyborg alors que sa présence à du mal à être articulée organiquement dans le récit, par instant (j'en prends exemple la première rencontre de la Ligue avec Stephenloup, où celui-ci est prêt à massacrer SON PÈRE, le film préfère s'attarder sur la blague - par ailleurs réussie - de Flash qui n'a jamais combattu).
Warner ayant toujours du mal à gérer le marketing de son univers, les comparaisons fleurissent déjà
tels des poèmes papillonnant dans les chants de ruines. Si je partage un tel lien, ce n'est pas pour la moquerie facile que la comparaison pourrait amener (le bashing quasi-unanime n'a pas l'air d'être plus faible que pour
BvS) mais parce que le film va certainement marquer l'histoire des films de super-héros à sa façon. Il exerce en tout cas déjà sur moi une véritable curiosité quant à décortiquer les problèmes que sa fabrication a pu connaitre et quelles ont été les conséquences sur le résultat final. En ce sens, il m'est effectivement sympathique.
Et si Warner venait de créer par accident le premier film de super-héros véritablement culte ?