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MessagePosté: Mar 8 Déc 2009 23:12 
The old man
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Hier soir je me suis revu « La Guerre des Mondes » car en parler (topic SF Festival) m’a donné envie de m’y replonger pour vérifier mon point de vue. Sans surprise, le film est tel que dans mes souvenirs mais le revoir m’a permis de redécouvrir pas mal de motifs et d’éléments narratifs. Et comme avec « 2001 » et « The Matrix », j’ai déjà évoqué le Darwinisme je me dis que c’est le moment ou jamais de proposer une grille de lecture du film de Stephen Spielberg.



[align=center]La Guerre des Mondes
Allégorie de la Cellule ou Approche Darwiniste d’une Invasion
[/align]




Si « La Guerre des Mondes » tire son inspiration première des recherches effectuées à l’époque sur la découverte de « canaux » sur Mars, de nombreux autres éléments scientifiques étoffent le roman d’HG Wells, dont la fameuse Théorie de l’Evolution des Espèces de Charles Darwin. En effet HG Wells qui fut fasciné par cette théorie l’intégra à son roman (cerveau surdéveloppé des Martiens) et lui consacra explicitement quelques paragraphes lors du dénouement pour expliquer la défaite des Martiens.
Pour son adaptation, Stephen Spielberg a apparemment choisi de mettre au premier plan l’aspect Darwiniste de l’œuvre et le récit se trouve construit autour de l’idée de la Cellule.
En effet le film s’ouvre et se termine sur un zoom cellule/arbre accompagné d’un narrateur qui cite les passages « Darwiniste » du début et de la fin du roman d’HG Wells.


L’ouverture
La première séquence nous montre une cellule et un zoom arrière remonte jusqu’à l’arbre dont la cellule fait partie, puis nous voyons une goûte d’eau dans laquelle apparaît la Planète Terre, puis une Planète Rouge et enfin diverses visions de notre monde. Cette première séquence est accompagnée d’un narrateur citant le roman d’HG Wells et qui nous explique que notre planète a suscité des envies et qu’un plan fut conçu par ces envieux pour la conquérir.
Ainsi dans sa séquence initiale Stephen Spielberg commence par une cellule, nous montre qu’elle fait partie d’un plus grand ensemble et termine par la Terre et une Planète Rouge vues dans une goutte d’eau, ce qui nous renvoie à l’image de la cellule vu en premier, le tout en nous expliquant que notre planète fait elle aussi partie d’un grand ensemble et qu’elle a attiré un envahisseur (venu d'une Planète Rouge).
La métaphore de la Cellule se trouve ensuite déclinée à travers la figure de la Famille dont nous allons suivre le périple durant le film. La Famille est pour la Société l’équivalent d’une Cellule pour un Organisme et d’une Planète pour le Cosmos. Il s’agit donc dans les 3 cas d’éléments unitaires construisant un grand ensemble.
La Guerre des Mondes devient alors une Guerre des Cellules, pour leur survie et leur reproduction.


La réplique annonciatrice de la fin Darwiniste
En effet la fin du film est annoncée dans le premier quart d’heure. Ray Ferrier (le Père) se réveille après une courte sieste et s’aperçoit que Rachel (sa fille) a une écharde dans la main. Il veut la lui retirer mais Rachel refuse. Elle lui explique que son corps va réagir face à ce corps étranger et va le rejeter naturellement. C’est comme ça que marche le corps. Ainsi à travers le jeu des métaphores Rachel nous révèle que La Terre (l’organisme mais également la cellule) va rejeter naturellement les envahisseurs (l’écharde mais également la cellule étrangère à l’organisme) car c’est dans l’ordre des choses.


La cellule familiale
Le jeu de mot ne fonctionne pas en anglais mais il serait dommage de s’en priver ^_^
Ray Ferrier (Le Père) est égoïste et incapable de comprendre son rôle au sein de cette cellule dont il ignore le fonctionnement. Il travaille en tant que pilote de Grue, ce qui renvoie aux tripodes. Comme eux il voit le monde de haut, comme eux il est capable d'englober le monde du regard pour organiser des plans et comme eux il ne comprend pourtant pas ce monde. Au mieux il comprend qu’il en fait parti. Evidemment les événements du film vont lui faire comprendre son rôle en ce monde.
Pour symboliser la prise de conscience de Ray, Spielberg utilise 3 fois le motif d’une vitre brisée par un trou en son milieu. La caméra se place devant cette vitre, avec le trou au milieu de l’écran et nous montre une personne au centre de ce trou (cellule ?).
La première vitre brisée est faite lors d’une partie de base-ball improvisée entre Ray et son fils. Suite à un accès de colère Ray lance la balle trop fort, son fils se penche et la laisse passer. La balle fait un trou parfaitement circulaire dans la vitre et nous voyons Ray à travers ce trou. Il est seul dans ce cercle. Sa cellule ne contient que lui et lui seul.
La seconde vitre brisée est faite lors de l’attaque de réfugiés au Ferry. Il s’agit d’un trou fait dans la vitre de la voiture de Ray et des enfants par un réfugié qui tente d’entrer. Ray dégage le réfugié par un freinage brusque puis accélère. C’est alors que surgit une femme et un enfant que Ray (et le spectateur) voit à travers ce trou. Ray par réflexe renonce à son égoïsme et plante la voiture dans un poteau pour éviter la figure familiale. Ainsi Après un cercle où on ne voyait que lui, Ray voit au milieu du film un cercle contenant une famille et il agit pour la sauver. Il s’agit symboliquement de la première prise de conscience de ce que doit être sa cellule : une famille.
Enfin la troisième vitre brisée par un trou est faite lors de l'attaque d'une tentacule de tripode, lorsque Ray s’empare d’une voiture pour retrouver Rachel qui a disparu. Ray (et le spectateur) la voit alors à travers le trou de la vitre. C’est la révélation de la nature de la cellule de Ray : elle contient sa fille et c’est donc sa fille qu’il doit protéger et cela même s’il doit mourir.
Ainsi à travers 3 figures placées dans un cercle au milieu de l’écran, nous voyons le chemin du concept de cellule pour Ray :
- Lui tout seul (Pas de famille)
- Une femme et son enfant (Une famille)
- Sa fille (Sa famille)


Autre symbole de la cellule familiale (1) : L’espace de Rachel
Lors de la fuite initiale en voiture, sur l’autoroute, Rachel fait une crise de claustrophobie et son frère intervient pour la calmer en construisant un espace « sauf » symbolique pour Rachel. Spielberg opère alors un mouvement parfaitement circulaire autour de la voiture (symbolisme qui nous renvoie à la cellule comme pour les trous de vitres). Or ce mouvement circulaire a une particularité : lorsque Ray est visible, la caméra est extérieure à la voiture et donc extérieure à l’Espace de Rachel, mais lorsque la caméra est placée derrière la voiture et que Ray est caché, la caméra rentre à l’intérieur de la voiture (la banquette arrière) et donc à l’intérieur de l’Espace de Rachel.
A travers ce plan complexe, Spielberg nous montre qu’à ce moment de l’histoire, Ray est totalement exclu de la cellule familiale : il l’a voit uniquement de l’extérieur.


Autre symbole de la cellule familiale (2) : La cave
Le lieu de la cave apparaît à deux reprises dans le film. La première fois il s’agit de celle de la Maison de l’ex-femme de Ray et la seconde fois, il s’agit de la cave qui sert de cachette au personnage de Tim Robbin et dans lequel Ray et Rachel s’abritent.
Ce lieu me semble important car les deux caves ont exactement la même dimension et la même configuration (entrée au centre via un escalier, formes des fenêtres identiques et salle secondaire dans un coin). Personnellement je pense qu’il s‘agit du même décor qui a été relooké pour symboliser la sécurité à travers le familier et le connu. De plus en anglais, Cave se dit « Cellar », ce qui est quasi similaire au mot « Cell », Cellule en anglais.
La cellule devient ainsi un lieu physique et la cave est le seul type de lieu dans lequel Ray et sa famille s’abritent durant tout le film. En effet aucun autre lieu n’est associé à un espace « sauf » dans le film.


Le corps comme engrais : l’appropriation de l’environnement selon Darwin
Dans le dernier tiers du film, nous voyons les Envahisseurs utiliser les être humains comme engrais pour fertiliser l’environnement Rouge qu’ils tentent de reconstituer. Dans une scène particulièrement explicite (mais dont l’effet gore est caché), nous voyons un tripode déposer un corps humain par terre, enfoncer un tube en lui, pomper le contenu de son corps et ensuite pulvériser ce contenu sur l’environnement Rouge naissant.
D’un point de vue Darwiniste, les êtres vivants évoluent en fonction de l’environnement de la Planète et sont donc théoriquement en harmonie avec elle (idée qui sera reprise à la fin). De ce fait, pour conquérir la Planète et s’approprier son environnement (et le remodeler), les Envahisseurs utilisent logiquement le corps des Humains comme engrais car par nature ce corps est en harmonie avec l’environnement.


La Guerre de l’intérieur de l’organisme, de la cellule
Dans sa Guerre des Mondes, Spielberg transforme les habitants des USA en Réfugiés d'une Guerre incompréhensible et sans cohérence. Optant pour le point de vue d'un individu égoïste (et donc d'un parfait survivant), le film montre avec une précision redoutable le renferment sur soi et l'errance de foules gigantesques livrées à la violence et à l'absurdité de la Guerre, sans espoir d'aide extérieure et de solution apparente à leur situation.
L'épilogue à Boston (surnommé aux USA le Berceau de la Liberté et cœur symbolique de l'esprit américain) pose la question de savoir ce qu'il reste des USA après cette guerre qui a surgi de ses propres entrailles et dont la fin n'a pas plus de sens que son début (Qui ? Pourquoi ?). Tout ce qu'il reste c'est la cellule (épilogues) et c'est à partir de la cellule (Composante des organismes, Famille dans une société et Planète dans le Cosmos) que la vie se construit, c'est l'unité élémentaire de toute chose dans l'univers, la seule vérité à notre portée.


La fin en 3 épilogues
Le film se termine tout d’abord sur la mort inexplicable des Envahisseurs. Une défaite qui laisse les foules dans une profonde indifférence. Le dernier moment d’action du film est une action militaire : des soldats abattent un tripode affaibli qui en s’écrasant sur le sol provoque l’ouverture de son cockpit. Aucun cri de joie ou de victoire lors de cette action victorieuse. Les seuls sons de cette séquence sont celui des l’explosion, des gravas et des hurlements de terreur de Rachel.
Lorsque la foule et les militaires s’approchent du cockpit, ils découvrent le cadavre du Pilote. Là aussi grand silence et aucune allégresse. De plus la caméra montre en premier plan et longuement le cadavre de l’envahisseur. La seule image de ce moment finale de l’échec de l’invasion est la mort, et rien d’autre. Rien d’autre ?
La scène de la défaite des Envahisseurs laisse alors sa place à celle de Ray et Rachel arrivant enfin à la demeure familiale. S’ensuit des retrouvailles familles et enfin un moment de joie et de soulagement. Ces deux épilogues nous indiquent donc que la Guerre conduit inévitablement à la mort et qu’il n’y a aucune joie à en tirer, même lorsqu’on la gagne, mais par contre la Famille (les gens qu’on aime) est l’élément central et qu’il faut se réjouir de la retrouver, car c’est elle qui est importante et qui donne un sens à la vie.
Enfin le film se finit en revenant sur l’image initiale de l’arbre, puis un zoom nous conduit jusqu’à la cellule mais ne s’arrête pas et continue dans l’infiniment petit pour finir sur une vision de l’espace avec des étoiles. Symbolisme classique de l’univers en tant que poupée russe. Comme pour le début, ce zoom final est accompagné d’un narrateur qui cite le roman d’HG Wells.
Il s’agit d’une synthèse de l’explication Darwiniste de la défaite des Martiens (Chapitre VIII) : La Terre est constituée d’un environnement où il y a des bactéries. Les millions de morts humaines que se sont succédées au travers des âges ont permis à l’Humanité d'acquérir l'harmonie avec elles et lui a donné le droit de vivre sur la Terre (Sélection Naturelle). Le droit de vie d’un peuple sur un monde avec lequel il est en harmonie et évolue constitue un droit Divin, et tout envahisseur qui veut conquérir un monde sans tenir compte de son équilibre est un pêcheur. Les Envahisseurs ont été rejeté de l'Organisme comme le veut l'ordre des choses.


« La Guerre des Mondes » est au final un pur film de Spielberg où on retrouve ses thèmes de prédilection : la famille, le respect de l’autre et l’absurdité de la Guerre.

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