They are creeps, they are weirdos. What's the hell are they doing here ? They don't belong here.
Avant de commencer ma critique sur ce Dark Knight, revenons un peu en arrière avec son prédécesseur, Begins, qui ne parait maintenant être plus une introduction qu'un vrai film. Ce renouveau de la licence Batman après une longue perdition avec Kilmer et Clooney possèdait l'ambiance, une ambiance autrement plus attirante que celle de Burton et beaucoup plus proche de l'esprit du comic, mais le scénario était... pourri ? Exactement. La faute à un manque de personnages charismatiques, qui faisait que tout reposait sur les épaules d'un Christian Bale inspiré, mais trop seul pour tout tenir.
Sans doute prenant conscience de ce défaut, Nolan avait rajouté à la fin une scène qui ne pouvait présager que du bon : le Joker, ennemis juré de cette putain de Chauve-Souris, serait de la partie. De quoi laisser rêveur, assurément. En plus d'avoir un film à l'ambiance sombre, nous allions avoir droit à un gros scénario.
Arrive maintenant le visionnage complet de ce Chevalier Noir, qui avait tout pour nous convaincre : ambiance, personnages, acteurs, critiques. Autant dire que je m'attendais à prendre une claque assez énorme. A trop espérer, il semblerait bien que j'ai été un chouïa déçu par le film.
Sans pour autant vous haïr, je suis énervé de voir que même en m'étant protégé contre les spoils, je m'en suis pris plein la tronche avant même d'avoir vu le film. C'est pour cela que le Joker ne m'a pas tant impressionné, malgré l'interprétation magistrale de Ledger, parce que, bordel, toutes les répliques cultes du personnage ont au moins une fois fait l'objet d'une signature. A croire que la campagne publicitaire de Deu$ (heureusement d'ailleurs pour lui qu'ils ont sorti le film dans le sens original, sinon, quelque soit son niveau de fanattitude, il n'aurait JAMAIS été le voir =D) a été trop porteuse, et que perdre la découverte en live des répliques du Joker, c'est honteusement frustrant. Petite parenthèse qui avait besoin de sortir, reprenons.
Si les couleurs dominantes du Begins étaient dans les tons orangés, rappelant facilement le crépuscule, celles de cet opus viraient carrément dans le bleu profond, symbole de la nuit. Il n'est pas sûr que nous voyons un jour l'aube se lever, mais nous ne nous en plaindrons pas.
Nous voici donc avec un film à la violence crue, gratuite et choquante. Et encore, on m'en avait tellement parlé avec emphase que je m'attendais à voir encore plus d'immoralité dans les scènes. A ce propos, j'ai été un peu déçu par la morale bienveillante qui recouvre une partie de la fin du film (pour l'autre, j'y reviendrai), avec les personnes dans les ferry et un Double-Face qui ne va pas au bout de la chose avant que Batman n'intervienne. Ceci dit, je me fais moi-même peur devant le peu de sensibilité à la violence que je peux avoir parfois, ne trouvant plus rien de réellement choquant. Ouais, j'suis un psycho et alors ? Vous qui aimez le Joker, pourquoi me lancer la pierre !?
Puisque je l'ai évoqué, parlons en un peu plus et plus en détail de ce Bad Guy. L'interprétation de Ledger laisse sans aucun doute patois, tellement il réussit à créer un personnage dingue, cruel et psychologiquement plus que dérangé, dans sa bulle de folie alors que l'ambiance du film est résolumment réaliste. Une de mes déceptions sur la scène des ferry repose en partie là-dessus, puisque cette bulle dans laquelle il est enfermé n'explose pas, le rendant encore plus unique certes, mais ne permettant pas de le déifier comme il se doit. Après tout, le Joker reste le meilleur méchant de tous les comics confondus, il est donc dommage de voir une fin presque niaise alors qu'il a le charisme pour bousculer les genre et créer une oeuvre vraiment politiquement incorrect.
L'acteur en a fait un être potentiellement capable de devenir l'un des méchants les plus emblématiques du cinéma (et pour le cinéma moderne, c'est sans doute LE), mais ça laisse un sentiment d'inachevé, notamment avec la dernière scène où il apparait, bien qu'ayant un contenu très intéressant (le combat éternel entre les deux personnages qui ne pourront ni l'un ni l'autre se détruire), n'a été à mon sens pas digne de ce que méritait le personnage. Surtout lorsqu'on voit son idéologie fantastique et divine.
Par contre, j'ai carrément adoré la politique des scénaristes qui a été de faire en sorte de brouiller les origines du Joker, donnant pleins de versions, mais n'aboutissant pas, tel qu'il est : insaisissable. Ca renforce encore une fois le caractère culte du personnage, ce qui n'est pas pour nous déplaire. La première scène du film est sans doute le moment que j'ai préféré avec le personnage, tant tout son esprit démoniaque y est superbement représenté.
Il convient enfin de faire ce que chaque personne n'ayant pas d'imagination doit faire : qui est meilleur, Ledger ou Nicholson ? Difficile de les départager, tant chacun a réussi à se fondre dans l'ambiance du film dans lequel il est, donnant deux façons de voir le méchant, deux façons toutes deux interprétées avec brio et ingéniosité. Reste tout de même que, comme je l'ai déjà dit il y a longtemps, Nicholson posséde la réplique la plus mythique pour le Joker : "Est-ce que j'ai l'air de plaisanter ?". De même, le personnage avait un côté aussi voire plus barré que celui de Ledge, dans les scènes où il utilise un pistolet factice alors que sa vie est en jeu, affirmant un côté cartoonesque diablement prenant. Il est vrai aussi que de ce point de vue le Joker Ledgien est inscrit dans un contexte beaucoup plus réaliste ; et donc l'utilisation d'armes à feu réelles s'impose (ainsi que la capacité à envoyer de vrais balles sur l'ennemi en se poilant est une façon assez monstrueuse de symboliser sa folie). Enfin, j'ai une petite préférence personnelle pour le rire de Jack Nicholson, un rire qui n'a pas fini de nous hanter.
Parlons maintenant des autres personnages, qui ne seront pas aussi développé que l'a été celui de Heath Ledger, car le film est centré sur son humble personnage.
Tout d'abord, contrairement à beaucoup, j'ai été déçu par le personnage de Double-Face. Harvey Dent était un bon protagoniste de l'histoire, créant une autre entité à la ville que celle de Batman, mais la suite ne m'a pas convaincu. Encore une fois, on peut voir toute la magnifiscence du Joker dans sa manipulation, mais Double-Face est vraiment chiant à ne chercher qu'à venger la mort de Rachel (au passage : bon choix scénaristique de la butter une fois pour toute) en allant voir les gens qui n'y sont pour rien. Même si son design est réussi (au point que j'appréhendais de voir la partie brûlée de son visage, même si ce n'est au final pas si impressionnant [n'empêche qu'il est costaud pour se relever aussi vite après une telle blessure Oo]), il m'a paru vraiment plat. Le jeu de l'acteur a beau être impec', il ne m'a pas tant ému.
Pour le commissaire Gordon, je ne dirai juste que j'ai été un peu déçu de le voir revenir d'entre les morts dans un retournement de situation qu'on ne pouvait tout simplement PAS ignorer si l'on avait vu la bande-annonce. A croire qu'il faut vivre comme un moine shaolin, coupé du monde, avant la sortie d'un film qu'on veut voir.
Ensuite, Alfred garde son côté impartial et moralisateur qui le caractèrise tant. Ce n'est pas une surprise, mais on s'en accomode fort bien.
Enfin (oui oui, je fais abstraction de beaucoup de gens), il y a le personnage qui m'a le plus convaincu de l'épisode (avant même le Joker, oui oui), Batman, qui est beaucoup plus développé psychologiquement que par le passé (même comparé au Begins). Ce film est en quelque sorte un passage au Batman que l'on connait tant, celui qui sauve la veuve et l'orphelin mais qui ne joue pas les super-héros et qui lutte seul. Nolan a réussit dans son scénario à ne pas le laisser de côté, et la dernière scène reste ma préférée, lorsque le commissaire Gordon explique la métamorphose du Batman qu'on aime. Un discours vibrant, pas niais et passionnant, donnant au personnage toute sa profondeur.
Le scénario est bien construit, bien que j'espérais que le Joker concocterait un plan encore plus diabolique (mon côté rêveur, il en a fait un assez bon comme cela), mais il manque ce que je voulais pour cet opus : un affrontement plus axé sur la psychologie des personnages que sur le physique. Certes, le fait que le Joker s'enfuit de la prison alors que les policiers pensaient en avoir finit avec lui, est la preuve que rien ne peut atteindre physiquement le méchant, mais ça aurait pu être à mon sens plus développé. C'est en partie pour cela que je suis déçu par l'affrontement final, où l'aspect psychique n'arrive que lorsque tout est finit. Une petite déception qui n'enlève rien à l'intelligence de la construction du scénario, mais bon. On se retrouve plus avec un film d'action que le thriller annonçé par certains, un chouïa dommage.
Au final, le film n'est pas la bombe universelle qu'on pouvait attendre, mais il reste néanmoins extrèmement efficace, parmi les meilleurs films d'action de tous les temps (pour les films sur les comics, je garde une petite préférence -mais petite- pour Returns :P), à la bande-son survoltée et aux jeux d'acteurs impeccables, nous plongeant dans un rythme soutenu et pas lassant pour un sou.
We are creeps, we are weirdos. What's the hell are we doing here ? We don't belong here.
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