Parce que seleniel m’a cité dans son avant-dernier message, je vais intervenir rapidement moi aussi.
[Mais avant ça, et comme le dirait Isuzu : J’ai été cité par seleniel, j’ai été cité par seleniel ! Youpi ! J’ai enfin été cité par seleniel !]
A vrai dire, ce n’est pas tant que Bleach m’horripile à ce point que je ne viens presque plus poster sur ce topic. Plus généralement, je me contente des chroniques de la haine ordinaire, condensées dans les joutes passionnées de Gharde, raziel et Isuzu en tête. En réalité, puisqu’on parle des anciens défenseurs de ce manga, je rappelle quand même que je faisais partie du lot à une certaine époque. Et ma sortie la plus marquante aura sans doute été celle m’ayant directement opposé à Nator, il y a de ça pratiquement deux ans maintenant. Chose étrange, ça concernait déjà la discussion sur arnaque or not to be impliquant l’arc Soul Society.
Il me semble avoir défendu la cause de Bleach en affirmant que si le twist final dans l’intrigue imaginée par Kubo ne résidait en définitive que dans une illusion plutôt primaire et finalement assez douteuse car tombant comme un cheveu dans la soupe, il n’en demeurait pas moins que chaque renversement, aussi puissant soit-il, est toujours basé sur quelque simple assise, décorée pour l’occasion afin de servir de substrat à la supercherie.
Personnellement, je ne reviendrai pas sur mes propos d’avant parce que ce serait ne pas être cohérent avec moi-même. Néanmoins, si j’ai radicalement changé la vision que j’avais de Bleach, c’est forcément qu’il y a une ou plusieurs raisons. A mon sens, la première tare de cette série est qu’elle ne se renouvelle pas assez pour se suffire à elle-même. On met souvent le doigt sur une chose unanimement considérée comme une qualité indéniable de Bleach : la mise en scène et le style graphique. Si je suis plutôt d’accord sur le deuxième point, puisqu’il est vrai que les dessins de Kubo se prêtent merveilleusement bien aux combats qu’il décrit, je suis déjà plus sceptique sur le premier. Bien entendu, l’agencement des cases ou la description de l’action dans Bleach relève, a priori, d’une certaine recherche esthétique. Mais pourtant, j’y vois, personnellement s’entend, toujours les mêmes schémas, épuisés ad libitum, toujours les mêmes poses (classes soi-disant), toujours les mêmes trames, répétés à l’infini, etc. J’ai vraiment l’impression que Kubo possède dans ses petits cahiers un algorithme de mise en scène qu’il applique à tout va, en veux-tu en voilà. C’est souvent très mécanique, très schématique. A ce titre, si l’on part du principe qu’il ne se renouvelle jamais vraiment et qu’il applique, ad vitam aeternam, un masque automatisé, atrocement identique à ses prédécesseurs, à chacune des phases d’action qu’il dessine, peut-on encore dire que sa mise en scène est recherchée ? La répétition ne peut pas être considérée comme une recherche à mes yeux, car la recherche se caractérise par l’inédit, toujours.
Rien que ça, ça explique déjà en partie le pourquoi de mon détachement progressif à cette œuvre. Parce que si la qualité première de Bleach, jamais contestée ni de ses adorateurs ni de ses détracteurs, n’en est pas une pour moi, on est irrémédiablement mal parti. En fin de compte, Bleach c’est un peu le successeur de Saint Seiya dans la forme : un héros stéréotypé plus que de raison, voulant sauver ses amis d’un côté, le monde de l’autre, n’hésitant pas à aller jusqu’au bout pour l’emporter, prêt à brûler son cosmos, le tout en envoyant inlassablement une seule et unique attaque, jouée en boucle, Getsuga d’un côté, les Météores de l’autre. Evidemment, ce sont des images très classiques, et par ailleurs résolument efficaces, qui sont développées dans les deux cas. Mais il faut tout de même avouer que les limites de ce modèle sont pour le moins explicites. Dès lors, on ne suit plus les séries estampillées Saint-Seiya-like que pour la joie, toute relative, de découvrir le design de la mort qui tue des prochains ennemis ainsi que leurs particularités. On ne peut pas être déçu du scénario parce que dans l’inconscient des gens, on sait d’office que ce ne sera pas un critère déterminant quant au plaisir de lecture. On aime Bleach car on aime son univers, car on adore les personnages stylisés inventés par son auteur, car on aime les pouvoirs établis, car on apprécie enfin le schéma employé, tout simplement.
Je tiens à préciser que je ne juge absolument pas de la valeur d’un tel modèle, et après tout, je me moque un peu de savoir si ce procédé est bon ou non. Cela, c’est à chacun de décider. Si je peux paraitre assez ironique dans ce que j’ai écrit ci-dessus, c’est parce que clairement, moi, ce n’est pas un schéma que je porte en haute estime (sans pour autant le condamner de manière systématique). Dans tous les cas, une fois encore, ça ne relève que de mon point de vue seul, il ne faut donc y voir ni attaque, ni facétie.
Je vais m’arrêter là pour ce qui est de ma dépréciation de Bleach. De toute façon, nombre d’horizons ont d’ores et déjà été discutés au fil de ces pages, et je sens bien que rien n’y fera : dans les faits, personne ne sera jamais d’accord avec personne. Malgré tout, j’aimerais quand même revenir vite fait sur le cas de One Piece. Gharde, le fait de dire qu’il n’y a guère de différence entre Bleach et One Piece dans leur genre respectif est, d’après moi, une erreur de sémantique. Parce que le genre c’est ce qui sous-tend l’œuvre, lui donne un sens, la justifie. Il serait complètement aberrant de dire que One Piece est un manga de baston dans la mesure où le postulat de sa mise en route retourne essentiellement d’un aspect autre, à savoir la découverte, le rêve, et l’aventure justement. Bref, si les combats s’immiscent bien entendu dans l’univers de One Piece, ils ne se posent non en tant que moteur mais en tant que ressort.
Et comme je suis là, j’en profite pour dire que ce n’est pas parce qu’on est fan d’un manga que chaque critique le concernant doit être pris comme une torture, au contraire, s’il y a des critiques, c’est que le manga visé parvient à intéresser quoi qu’on en dise, à se frayer une place dans l’océan surpeuplé de cette branche de la BD, en d’autres termes, c’est qu’il vit intensément. Et je crois que c’est là l’important. Après, je peux comprendre tout à fait qu’on veuille défendre une chose qui nous est chère bec et ongle. D’ailleurs, Isuzu parvient même à me titiller par instants quand il parle de One Piece en mal, c’est dire. ^^
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