Je continue de rattraper le petit retard pris sur les sorties VF avec deux les deux plus récents comics de Jason Aaron parus chez Urban.
A noter lors de la dernière Image Expo et son habituelle avalanche de nouvelles séries et équipes artistiques prestigieuses, le retour du génial tandem Aaron / R.M. Guera sur
The Goddamned, un titre qui revient dans les temps anciens, avant le Déluge et la mystification de l'Arche de Noé, un temps où la violence et la cruauté de l'humanité avait atteint son paroxysme :
"Imagine if Quentin Tarantino was hired to direct the movie version of the book of Genesis. That's pretty much what we're aiming for," Aaron said. "If there is a Hell, this is definitely the book that will make sure I go there."Ca promet !
Southern Bastards - tome 2 : Sang et sueurJ'avais bien aimé le premier tome même s'il manquait un petit quelque chose pour atteindre l'excellence de
Scalped. Ben là, on y est carrément : c'est excellent !
Je pensais qu'à l'issue explosive du volume précédent, on enchaînerait directement sur le passage de flambeau de la famille Tubb, Aaron prend le lecteur à contre-pied en abordant la chose de manière inattendue. En effet, l'ensemble du livre est consacré à l'ordure en chef de la petite ville de Crow County, le Coach Boss. Au pays des pouilleux, il est le roi et cette nouvelle histoire va nous permettre de nous concentrer exclusivement sur son parcours.
Comment Euless Boss en est-il arrivé à asseoir sa volonté sur l'ensemble du comté en tant que simple coach de l'équipe de foot locale ? D'où tire-t-il cette volonté implacable qui en effraie plus d'un ? Aaron nous livre ces réponses en dressant le portrait d'un personnage passionnant qui arrive sans peine à faire jeu égal avec Red Crow. Assurément un vilain d'envergure qui nous offre quelques moments mémorables qui font froid dans le dos, à l'image de son premier meurtre exécuté avec un sang froid assez terrifiant, et qui embrasse à la perfection le sujet de prédilection du scénariste. Dans la divulgation de la jeunesse de Boss, on apprend à redécouvrir le visage d'un vieil homme austère avec beaucoup plus de nuances. A l'image du vieux chef indien de
Scalped, on arrive à s'attacher au salopard qu'on a appris à détester et à comprendre ses motivations, un simple désir de reconnaissance qui, à travers un environnement cruel et impitoyable, s'est mué en un sentiment de frustration, de colère et de domination.
Ca promet pour la suite !
En bonus, le scénariste prend le temps de nous présenter une galerie de personnages secondaires prometteurs et j'ai assez hâte de voir de quelle manière ils vont bien pouvoir s'intégrer et complexifier cette histoire de vengeance et de violence. Nul doute qu'ils sauront également, à travers leur interaction, révéler de nouveaux aspects de la personnalité du Coach Boss.
Passionnant !
Men of WrathMini-série de Jason Aaron dans la même veine que
Scalped et
Southern Bastards, nous suivons cette fois-ci l'histoire de Ira Rath (j'ai compris le jeu de mots bien tardivement...), vieux tueur à gages aigri et solitaire. Se découvrant un cancer des poumons, le vieil homme est confronté à un dernier contrat : assassiner son propre fils.
Ce récit revient une énième fois sur le sujet favori de l'auteur, cet espèce de cycle de violence intergénérationnel et de portraits de famille désunis. Dans son dernier témoignage, Ira Rath nous livre l'histoire sanglante de sa famille depuis le jour où son arrière-arrière grand père, simple paysan, tua accidentellement un autre homme sous les yeux de son fils suite à un simple conflit de propriété. Dès lors, telle une malédiction macabre, les hommes de la famille Rath se sont toujours transmis ce péché et cette colère, souillant leur être dans le sang et interdisant toute relation père-fils hormis celle basée sur la haine.
On passe de drame en drame à mesure que nous remontons le temps jusqu'à la fatidique confrontation entre Ira et son fils, jeune homme qui s'est attiré la colère des caïds d'un bled paumé de l'Amérique profonde.
Cette nouvelle histoire partait vraiment bien et Aaron pousse le bouchon beaucoup plus loin que dans ces précédentes séries lors de certaines scènes. Si j'ai plus qu'adoré
Scalped et que
Southern Bastards prend le chemin du même succès, le scénariste parvient à me faire ressentir quelque chose d'assez inédit dans la violence représentée dans ce livre que je n'ai jamais éprouvé à la lecture des titres précédemment cités. Un sentiment de malaise. Selon mon ressenti, j'ai particulièrement été révulsé par deux scènes, l'une de violence gratuite lors du massacre de l'élevage de chevaux d'un paysan lambda, l'autre, bien plus choquante, lors de la scène d'ouverture du comics et d'un triple meurtre des mains du personnage principal du récit. L'exécution d'un nouveau-né, la manière suggestive et extrêmement détachée dont s'est amené : absolument effroyable !
Je suis parti très confiant avec cette entrée en matière qui met directement dans le bain et qui accroche l'attention du lecteur, le développement sur la durée s'avère moins convainquant et beaucoup trop classique. Au vu du résultat, je ne pense pas que la mini-série soit le meilleur support pour l'auteur et qu'au contraire, il ait besoin de bien plus d'espace pour s'exprimer et développer son propos et ses personnages charismatiques.
J'avoue être au final un peu déçu par
Men of Wrath.