Cela faisait depuis un bien long moment que je voulais vous parler d'un film qui, a priori, n'a pas encore de sujet et qui pourtant en mériterait plus d'un, tellement il est merveilleux. Je veux parler de "Je vais bien, ne t'en fais pas".
Sorti en septembre 2006 (ça date un peu), il a été réalisé par Phillipe Lioret avec notamment Mélanie Laurent (actrice dont je suis tombé limite fan).
Lili (Mélanie Laurent donc) a dix-neuf ans. Elle a un frère jumeau du nom de Loïc. Elle rentre de vacances et son père lui apprend que ce dernier a disparu. Suite à une violente dispute avec lui, parait-il. La jeune fille ne s'inquiète pas outre mesure : il reviendra assurément. Mais il ne donne aucune nouvelle, aucun signe de vie, rien... Lili se persuade qu'il lui est arrivé quelque chose et décide de partir à sa recherche. Que trouvera-t-elle ?
Finalement plusieurs choses dont une qui va dépasser l'entendement. Où est passé son frère ? Il voyage. Il finit par lui envoyer des cartes postales. D'après lui, son père est un "gros con". Peut-on lui en vouloir ? Ils se sont disputés. C'est la plus grande des raisons pour ainsi le traiter. Les lettres ne sont adressées qu'à la jeune fille, ni à la mère et encore moins au père. Une carte, encore. Il a encore bougé, il a changé de ville. San arrêt, sans remords et sans se retourner. Mais il ne changera probablement pas de position : son père l'a toujours détesté, il n'a rien fait pour lui. C'est pourquoi, il a disparu. Sa soeur est son dernier lien, sa dernière connection avec sa famille... Mais petit à petit, Lili sombre dans la dépression : pourquoi ne donne-t-il de ses nouvelles que par à-coups ? Pourquoi ne revient-il pas ? Que s'est-il réellement passé ?
Les jours, les semaines, les mois et même les années défilent. Lili a encore grandi. Cependant, Loïc est toujours si taciturne. Il n'a pas pardonné à son père, sans doute ne le pardonnera-t-il jamais. Il ne rentrera plus, adieu Lili... Avant de disparaitre, Loïc avait fait une partie d'escalade. Puis, le néant. Que s'est-il passé ?
Le moral de Lili chute encore... Sans nouvelle, elle s'imagine le pire... Serait-il mort ? Pourquoi son père ne s'inquiète-t-il pas plus que ce qu'il veut bien laisser paraitre ? Et sa mère ? Sait-elle quelque chose ? Inlassablement, une seule et même question tourbillonne dans sa tête : que s'est-il passé ? Son anniversaire, les évènements importants, les fêtes, tout est devenu dérisoire aux yeux de la jeune fille. Elle désire revoir son jumeau mais il est introuvable, insaisissable. Juste quelques mots gribouillés à la hâte sur une carte provenant de divers endroits de la France.
Serait-il devenu un sans-abri ? Finalement, elle reçoit encore une lettre, quelques mots, l'histoire d'une vie : "je vais bien, ne t'en fais pas". Mais elle s'inquiète néanmoins. Elle s'interroge... Il avait une guitare dont il était inséparable. Retrouvera-t-elle sa trace avec ce maigre indice ? Elle se décide à activement le rechercher. Elle a deux semaines, les vacances scolaires en somme.
Lili ne mange plus. Elle a perdu la raison de vivre. Elle est internée. C'est alors qu'elle reçoit la toute première lettre de Loïc depuis des mois, depuis une éternité plus un jour. Depuis l'infini... Elle espère un appel de sa part, mail, sms, coup de fil, peu importe du moment qu'il se manifeste. Mais il ne se manifeste pas... Elle s'enfonce de plus en plus vers une voie d'une tristesse sans fin. Ses parents l'abandonne à la clinique. Elle n'a plus qu'un ami vers qui se retourner. Il doit la sortir de là mais il échoue. Quelques temps plus tard, Lili finit par retrouver un second souffle.
Son frère est passé par cette ville. Il a logé chez cette dame. Il avait sa guitare... Il n'est pas devenu SDF. Elle a questionné les sans-abris des environs, la description de Loïc leur est inconnue... Soudain, un homme passe. Il poste une lettre sous une pluie battante... Lili le reconnait. Elle se lance à sa poursuite... Est-ce son frère ? Ou bien... La réalité est parfois plus cruelle encore que ce qu'on pense...
Voilà pour la petite présentation du chef d'oeuvre (car on est là en présence d'un chef d'oeuvre, un vrai, comme on en fait plus). J'ai volontairement embrouillé la chronologie des évènements car ils sont ainsi perçus par Lili : elle est totalement perdue, son seul point de salut demeure les nouvelles de son frère...
Pour continuer ma petite description/critique, il faut savoir que la suite va parler du film dans son entière globalité (quelle expression...). En effet, cette oeuvre est des plus fascinantes à plus d'un titre... Tout d'abord, elle nous transporte avec force et subtilité dans l'univers fait de mensonges et d'amour de la pauvre jeune fille, laissée sur le bord de la route du destin. Elle ne sait plus quoi penser : tentent-ils de la protéger ? Ou bien la prennent-ils pour une imbécile ? C'est là, plus que la disparition de son frère, le point de départ de sa descente aux enfers, à mon sens tout du moins. Car son père n'est pas clair : tout ce qui nous est donné à savoir, c'est leur dispute mystérieuse... Dans une famille, on se dispute sans cesse, disparait-on de la sorte pour autant ? Certainement pas. Il s'est donc passé quelque chose de plus grave... Mais quoi ? Son père refuse de tout expliquer à sa fille, provoquant par là même l'écroulement psychologique de cette dernière. Son frère a toujours été proche d'elle, alors pourquoi serait-il ainsi parti quand bien même il serait définitivement en froid avec son père ? Lili ne comprend pas. Et c'est cette incompréhension qui va la précipiter dans les abysses de l'enfer.
Ce chef d'oeuvre en est aussi un par delà sa mise en scène, tout à fait pertinente, efficace et cependant d'une extrême simplicité. Mélanie Laurent, l'actrice principale de ce film est effectivement, la révélation, la lumière qui tamise un peu plus une étoile déjà brillante... Fort crédible dans son rôle, elle est d'une sensibilité incroyable et chacune de ses répliques, chacun des moments passés avec elle est une ode à l'émotion. En effet, émouvante à souhait, elle nous plonge avec une relative facilité dans son monde intérieur, peuplés de doutes, de craintes, de non dits, de désirs et d'amour. La haine se recoupe avec l'espoir et la folie (même si c'est un grand mot) semble s'accaparer d'elle... Perdue à jamais, elle n'a plus qu'un ultime but : Loïc. Tout ce tourbillon de sentiments forts nous est admirablement révélé par une Mélanie Laurent époustouflante !
Enfin, il faut noter un dernier point des plus intéressants et des moins négligeables à la fois. Parce que le film est un chef d'oeuvre mais à mon avis, il nous propose plus que l'appréciation d'un scéma préconçu, d'une histoire déterminée... Pour moi, il nous introduit et nous laisse ensuite seuls juges d'une forme de thérapie. Ainsi, clairement, le père de Lili se présente en quelque sorte en fin psychologue voire psychiatre et immisce dans la vie de sa fille sa conception, sa vision des choses. C'est pourquoi, il refuse de dire la vérité à la jeune fille. La cruelle vérité : Loïc est mort lors de cette partie d'escalade...
Mais il a persisté à lui cacher la vérité car il connait la fragilité de Lili. Celle-ci aurait sombré à la minute où elle aurait appris la terrible réalité. Se portant en victime avisée des attaques d'un fils disparu par imagination, il crée une vérité plus douce aux yeux de Lili... Cruelle certes, mais acceptable. Elle ne s'inquiète pas outre mesure à l'origine. Toutefois, son monde bascule lorsqu'elle apprend qu'il ne donne plus de nouvelles depuis des lunes et des lunes... Elle trébuche. Mais son père décide alors d'agir. Imitant avec délicatesse l'écriture de Loïc, il va donner l'unique raison qui pouvait encore pousser Lili à s'accrocher aux branches chétives de la vie : l'espoir.
Lili croit en le retour de son jumeau. Son espérance ne sera jamais accompli mais au moins, elle a le mérite de la maintenir vivante... Les mois passant, elle finit par mieux accepter l'idée du départ à jamais de son frère... Cette idée lui est dès lors plus supportable. Puis, elle découvre le fait, le seul évènement qui va boulverser sa vie entière : les lettres n'étaient pas de Loïc mais de son père ! En conclusion, elle retrouve une partie de son frère tant aimé en posant la main sur sa guitare chérie... Mais elle est vivante. L'espoir l'a gardé intacte. Elle est prête à prendre un nouveau départ... Son père, en se définissant comme le plus vil des pères, le plus dur et le plus détestable est en fin de compte le plus protecteur... Lili peut continuer sa vie comme elle l'entend.
Voilà, petite analyse (qui peut-être contestée, sachant de plus que j'interprête souvent des faits à ma façon qui est très, très personnelle) qui je l'espère vous donnera l'envie ou la curiosité de jeter un oeil intéressé à ce chef d'oeuvre... Certes, il n'est pas de ces films dont on parle beaucoup mais il est assurément de ces films qui vous marquent. En tout cas, je vais bien, ne t'en fais pas...