La Route est un film que j'ai bien apprécié dans l'ensemble, voire même très bien à de nombreux passages. La première chose qui m'a surpris concernant ce film, c'est son interdiction pour les moins de 12 ans. J'ai été étonné car en allant voir le film, je n'étais pas au courant que ce dernier contenait quelques scènes chocs, m'étant contenté d'être séduit par la promotion du film mettant en avant que ce dernier était l'adaptation d'un bouquin à succès aux USA. Je n'avais pas vu l'adaptation de No Country for Old Men du même auteur, mais l'intérêt qu'avait suscité ce dernier film sur le forum à l'époque m'a fait penser qu'il pourrait y avoir quelque chose de sympa à trouver dans le film dont il est question ici. La seconde chose qui m'a surpris dans ce film, c'est assurément sa narration. À aucun moment on apprend l'identité du père et de son fils, et ce côté « impersonnel », je trouve qu'il marche très bien car on se met à se poser des questions parfois bien tordues par rapport à ce que l'on peut apercevoir à l'écran, du style
Est-ce que je serai capable de tuer mon gosse si je n'avais rien à lui offrir d'autre qu'une mort soudaine plutôt que douloureuse ?
J'ai trouvé une belle écriture des personnages du père et de son fils, bien empreinte de justesse et de dramaturgie. C'est surtout la figure du père qui m'a marqué, Viggo Mortensen habitant son rôle avec conviction et nous offrant ainsi une prestation éclatante. Vu sa position dans l'intrigue, on se prend de beaucoup de sympathie pour ce dernier,
et sa disparition à la fin du film colle bien le bourdon, cette dernière n'étant pas très enjouée par rapport à la lueur d'espoir qu'il a entretenu grâce à son fils. On ne manquera bien évidemment pas de relever que ce duo nous fait beaucoup réfléchir sur la condition humaine sans forcément qu'il y ait une grosse pancarte à l'écran qui nous l'indique de le faire aux moments clés, à l'instar
de la scène de l'arrêt du voleur du chariot. Les flashbacks avec la mère sont aussi bien dérangeants et ajoute à cette impression d'ensemble. Une belle réussite en soi. Mais au delà de cette relation filiale très forte, le film se démarque bien aussi grâce à son univers apocalyptique.
Je ne sais pas si c'est le leitmotiv de cette année dans les salles obscures mais je me suis retrouvé une nouvelle fois en prise avec un univers apocalyptique, qui ici est bien réussi avec un cahier des charges plutôt chargé. On ne sait pas ce qui c'est passé, on nous montre furtivement ce qui peut se passer, on nous explique encore plus furtivement comment les hommes se place par rapport à cet événement. Ce que j'ai trouvé assez audacieux, c'était de voir que dans cet univers, l'homme ne gagne pas une mode vestimentaire post-apocalyptique du plus bel effet mais qu'il fait avec ce qu'il a, ce qui se traduit par des considérations plus crues que d'ordinaire dans le domaine (
comme par exemple la scène de la douche, où les deux regagnent le temps de cette dernière une humanité passée, mais qui se traduit pour le spectateur par un spectacle qu'il jugerait immonde si il se déroulait réellement sous ses yeux). Vient ensuite le sujet du cannibalisme pour parachever le tout et renvoyer aux interrogations sur l'humanité suscitées par le père et son fils. Bien évidemment, c'est là que l'on retrouve les scènes crues qui valent cette classification au film et j'ai trouvé que ces dernières n'étaient pas superflues, donnant un rythme très bien trouvé à l'intrigue générale. Comme une menace très prenante, on se prend à espérer que le père et le fils ne tomberont pas sur ce genre de personnes tout au long du film, car il y a des choses qui retournent bien vite le cœur dans le film à cause de cette thématique (
la découverte du garde-manger des cannibales m'a ainsi tellement marqué que je me suis bien inquiété quand le père s'est aventuré à découvrir se que cachait le père dans la maison suivante).
L'unique chose qui n'a pas réussi à me convaincre dans ce film, c'est son ultime conclusion.
Que le père disparaisse, ça paraît aller de soi à la vue de l'avancée du film, où seule la présence de son fils lui permet de ne pas tomber dans la barbarie vers la fin. Non, ce qui m'a quelque peu déçu, c'est que « comme par hasard », le fils tombe sur une famille altruiste et prête à l'accueillir. Euh, ils ne devaient pas être tous devenus des individualistes en puissance les hommes ? Les ressources ne sont-elles pas tellement limitées que l'on se garde bien de nourrir quelqu'un qui ne nous est pas cher ? Ce point m'a déçu, car que l'on continue de nous montrer que la préservation du semblant d'humanité passe par le fils, pourquoi pas vu que c'est le propos de tout le film, mais que l'on tombe sur des personnes avec une humanité prononcée à la toute fin alors que l'on nous présente durant tout le film pour les survivants la dualité suicide/individualisme dans une telle situation, ça m'a bien scié. J'aurais bien apprécié je pense que le fils trace tout seul son chemin tout en restant d'une innocence à toutes épreuves pour perpétuer l'héritage de son père? Plus irréaliste que la solution proposée par le film mais plus valorisante pour l'héritage de la symbiose existante entre le père et le fils.
La Route m'apparait comme un bon film méritant à l'occasion le détour si l'envie vous prend ces prochains jours d'aller au cinéma, l'ambiance du film mettant très bien en valeur une histoire atypique et faisant fleurir sans que l'on s'en rendre compte une réflexion intéressante.
