Attention il va falloir s'accrocher parce que ça va dépoter sévère et dur, vous êtes prêts ? Mon avis se trouve être assez identique à celui de Bullzor (mais en plus radical, faut pas déconner). Si on m'avait dit qu'un jour ça arriverait, moi, ersatz d'élitiste (c'est mon statut, bonjour), je ne l'aurais pas cru. Et pourtant, et pourtant.
Le côté radical se trouve être que je n'ai pas trouvé le résultat « pas mal » mais plutôt carrément faible pour accoucher d'un film de la sorte, voire que le long-métrage loupe totalement le coche, comme si Gilbert Montagné conduisait une voiture dans le lipdub de l'UMP [cette comparaison a pour intérêt de montrer qu'à l'instar de Paul Greengrass, je peux faire des messages politiques qui droppent des bombes de folie].
D'un côté, le fond du film me parait bien maigre, si ce n'est désuet, pour en être l'intérêt principal. Sérieusement, baser tout GREEN ZONE sur le fait qu'il n'y avait pas d'ADM en Irak et qu'un soldat américain va déjouer ce terrible complot, ce n'est à la base pas très engageant. Alors lorsqu'on couple cela avec le manichéisme des personnages qui n'ont aucune ambiguïté de montrée (seul celui joué par Brendan Gleeson tire son épingle du jeu en proposant un protagoniste aux aspérités nombreuses, le plus intéressant - voire le seul d'intéressant, mais il disparait au bout d'un moment et sans explication !!), qui sont dans un camp ou un autre, l'intérêt décroit encore d'un niveau. Matt Damon, malgré tout le respect que je lui dois, n'arrive pas à faire autre chose que trois expressions (et encore) ; sans doute que son personnage de chevalier blanc est trop limité pour qu'il puisse en faire quelque chose. Concernant Freddy l'irakien, je lui ai trouvé un minimum d'effort mais sans grande saveur parce que j'ai plus eu l'impression de voir une idée et un outil scénaristique qu'un véritable être humain (son côté "je pense à toute ma Nation dans son entier, du chien malade à la ménagère sur son tricot" est trop rempli de bons sentiments pour sonner juste).
Surtout que dans le fond, l'histoire a la prétention de proposer une relecture du déjouement des véritables intentions américaines sur le sol irakien, et pour cela elle emploie... Quatre ? cinq personnages ? Un vaste conflit qui se résume à si peu de gens ? Ca torpille tout de suite le côté prétendument réaliste du film.
Tout le côté "c'est d'la faute à Voltaire si j'suis tombé par terre" a bien été exposé par Bullzor et sur ce point je ne peux que lui faire un : +1. En revanche, je trouve que GREEN ZONE survole beaucoup trop certains aspects intéressants du conflit qui auraient apporté un peu d'ambiguïté au récit, notamment sur les prisons, desquels on n'aura qu'une triste séquence.
Je raille beaucoup, mais il faut y reconnaître une grande qualité : une histoire bien ficelée (si on excepte ses prétentions ridicules comparées au nombre de protagonistes, ça tient la route), c'est le minimum syndical néanmoins c'est bien là. On salut l'effort et on passe au deuxième point.
De l'autre, GREEN ZONE me parait tout autant raté dans sa forme. Raté, le mot est fort, je le concède, mais la réalisation m'a paru très triste et terne : photographie mise à part (très jolie, parce que sale, j'me comprends), le film se résume à une succession de gros plans en caméra au poing. Je n'ai rien contre ce procédé, c'est toujours intéressant de le voir être mis en application, mais lorsqu'il s'étale sur tout un film et que la caméra au poing veut forcément dire ne jamais se poser même une seconde, toujours branlotter ou tanguer, alors là je dis non. Je suis persuadé que le film aurait pu gagner en intensité en alternant plans calmes avec caméra au poing, histoire de créer une rupture dans la forme (la Green Zone aurait pris plus de sens !) ; ça aurait pu être jolie tout en ne perdant rien de sa nervosité.
Dans le même temps, le rythme m'a paru trop coulant, quasiment trop fluide. Ce n'est pas forcément un défaut, mais là encore Greengrass aurait pu faire quelque chose de plus intéressant en récréant le côté chaotique de cette guerre (côté bien retranscrit visuellement, mais pas formellement) par des faux pas ou des scènes qui plombent l'avancée de l'histoire. Ca c'est le petit plus élitiste, donc pas trop grave.
Par contre, les gros plans m'insupportent parce qu'ils tuent à petit feu l'un des aspects que j'ai préféré du film : la reconstitution de Bagdad en ruine, avec le passage par des lieux historiques [et magnifiques !], ce qui place définitivement GREEN ZONE à l'opposée de THE HURT LOCKER (les films n'ont strictement RIEN à voir, c'en est presque beau). Comme on ne voit que les visages des personnages pendant tout le film (visages qui tanguent... ah non c'est la caméra), on ne peut pas profiter du paysage ou de ce qui les entoure et c'est bien dommage. Ce qui fait que la reconstitution de Bagdad doit prendre, mis bout à bout, 50 secondes dans tout le film ? C'est maigre. Par contre, malgré tout, les scènes d'action bénéficient d'une très bonne spacialisation et c'est un bon point du film, si si.
J'en arrive finalement au fait que GREEN ZONE rate le coche : on sent que le réalisateur a voulu faire une oeuvre coup de poing, quelque chose dont on se souviendra, mais il n'est arrivé qu'à faire une thèse sur laquelle il dit que le Gouvernement américain était le fautif, les soldats n'y étant pour rien. Bref, le côté politique à notre époque est déjà poussièreux. Au lieu de cela, il fait un film qui formellement est un peu laid, mais se révèle être un divertissement qui peut être vu pour ses scènes d'action (très rares pourtant !). Il loupe sa cible parce que GREEN ZONE c'est de l'entertainement, et rien d'autre. Ou alors si on s'intéresse aux autres aspects, on risque d'être un chouïa déçu. Ce qui a été mon cas, même si je ne m'attendais pas à quelque chose d'immense.
A croire que les films de guerre ne sont vraiment bien que quand ils ne parlent pas de la guerre, rigolo non ?
|