Qui dit Oliver Stone dit film controversé, quand en plus on parle de la suite de WALL STREET et que l'action se passe pendant la crise des subprimes de 2008, alors là on mouille sa culotte devant ce qui devrait être une montagne de cynisme. Ô, conditionnel malheureux.
Money Never Sleeps...
2008, Wall Street. Jacob Moore (Shia LaBeouf) est un jeune trader qui mise beaucoup sur les énergies alternatives, lesquelles sont selon lui l'avenir de la planète et de la finance. Un jour, son mentor qu'il considère comme un père, Lewis Zabel (On S'en Fout), se suicide, suite à une machination visant à discréditer la banque qu'il a fondé. Jacob décide alors de se lancer dans une vengeance contre l'homme qui est la cause de tous ses maux : Bretton James (Josh Brolin, sans la moustache). Pour cela, il se rapproche du père de sa fiancée, Gordon Gekko (Michael Douglas), sorti de prison il y a 8 ans et en guerre contre le système boursier. Une association dévastatrice, mais qui risque de faire des mots de chaque côté...
... But Care Bears Do.
D'un matériau de base intéressant, Oliver Stone brode une histoire de vengeance lambda, pas très originale, sans doute efficace, mais qui manque terriblement sa cible. A moins que j'ai cru à un objectif autre que celui du réalisateur, dans lequel il aurait mis dos à dos et envoyé bouler toutes les parties pour dire qu'affronter la Bourse, c'est Don Quichotte contre les Moulins. Quelque chose de cet acabit.
En tout cas, WALL STREET : MONEY NEVER SLEEPS ne révèle dans son écriture aucune ambition particulière. Du moins, la première demi-heure se déroule, tranquillou, sans que rien de bien croustillant n'apparaisse, même si ça se tient et ça se regarde sans déplaisir. Sauf qu'au bout d'un moment, on sent que ça devrait mettre les bouchées double, foncer droit dans le mur pour faire tout éclater ; là où Stone fait un virage à 30 à l'heure pour éviter le-dit mur.
Tout le film sera du vu, revu, rerevu, dans lequel Shia LaBeouf est un brave trader pigeon pleins de bons sentiments, avec une fiancée gauchiste qui travaille sur un site d'information en vivant dans un loft new-yorkais de 200m², Bretton James une ordure finie sans sentiment mais avec de vrais tableaux sataniques et Michael Douglas qui est le seul à avoir du mordant, de l'ambigüité... à être fascinant quoi (du moins avant les deux dernières minutes). Par contre, mention spéciale à Charlie Sheen qui fait une apparition absolument éblouissante où Stone éjecte le côté bien-pensant un peu lourdingue que le personnage avait dans le premier WALL STREET pour en faire un monstre de cynique qui, après avoir protégé l'entreprise de son papa, l'a vendue pour se faire de la thune.
Et le problème de ce schéma, c'est que s'il est relativement efficace, l'utiliser quand on dispose d'un sujet explosif, c'est faire de la guimauve surfant sur une vague dénonciatrice. D'autant plus qu'on apprendra rien de très subversif, mais on est pas chez Michael Moore.
Mais là où ça devient intéressant, c'est que finalement, Stone fait du film bien pensant avec des problèmes familiaux, de couple etc., donc des sujets qui devraient émouvoir le public sauf que... les personnages sont tellement en dehors de la réalité que même si c'est filmé genre séquence émotion, le spectateur se heurtera au mur de l'incompréhension : comprenez, les pauvres qui vendent leur loft pour 4,5 millions au lieu de 6, la ménagère elle s'en tape un peu. De ce point de vue là donc, c'est presque bien vu de la part de Stone, qui déconnecte totalement son film d'un quelconque processus émotif. Presque, parce que je ne sais pas si c'était voulu. En tout cas c'était assez réussit, donc on va lui accorder cela.
Par contre, là où je trouve que ça se casse vraiment la gueule, c'est la réalisation. On peut lui accorder d'être relativement recherchée par moment, sauf que 1/ soit c'est laid (j'ai décroché à chaque séquence où les boursiers se téléphonent tellement c'était incompréhensible et vain) 2/ soit c'est de l'esthétique façon pub SFR/GDF Suez (mais vraiment), sans compter toutes les courbes joliment intégrées qui donnent l'impression de voir un film de Michael Moore, c'est vous dire le niveau. Les schémas n'ont aucune signification en fait, ce qui donne l'impression que Stone les utilise plus comme un objet bling-bling qu'un véritable matériau pour appuyer son propos. Pourquoi pas, ceci dit.
C'est pas constamment fait avec les pieds, mais rien de bien marquant le reste du temps.
Puis bon, le déroulement est certes assez convenu, mais la fin enfonce le clou en tombant dans le bien-pensant total, limite chaque personnage faisant se BA et le grrrrand méchant tombant sous les griffes des autorités, tout ça grâce à un papier publié sans source (Gekko n'en donnant jamais à Moore) sur un site gauchiste et une échographie.
Que c'était provocateur.