"Sur Radio Rock, ici le Conte. Je compte sur vous pour ce compte à rebours vers l'extase !"
"All we need is music. Sweet music, there'll be music everywhere, there'll swingin' and swayin' and records playin', dancin' in the street..."
Carl est ce qu'on pourrait appeler un élève en échec scolaire. Il vient de se faire exclure de son lycée. sa mère décide donc de l'envoyer en Mer du Nord chez son parrain, afin que le "vent marin lui fasse le plus grand bien". Or, ce parrain, Quentin, n'est pas ce qu'on qualifie de "bon parrain". C'est en fait le capitaine d'un bateau émettant des émissions pirates à la radio. Car, en 1966, les radios anglaises ne passaient que quarante-cinq minutes de Pop et de Rock par jour. Les radios-pirates, elles, le font 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Carl va donc découvrir ce formidable équipage, entre fous, drogués, alcooliques, cas social, lesbienne ou beau ténébreux.
Good Morning England (GME) frappe tout d'abord par sa galerie de personnages fort attachants, représentants fidèlement toutes les facettes de la société et des comportements humains. On pourrait citer Dave, cultivé, intelligent, parlant facilement aux filles. A l'opposé de celui-ci, Angus est laid, collant et sans humour. Tout ce petit monde se complète parfaitement bien sur ce bateau où tout est permis. Carl va apprendre à y évoluer et s'y adapter. Il est arrivé timide, réservé et en ressort grandi, ayant gouté aux expériences de la vie.
"Vous faites un truc cochon ? Un truc que vous cachez à vos parents ? Vous violez la loi ?"
GME, en plus d'être un film rassemblant des personnages forts et charismatiques, propose aussi une certaine vision de la vie anglaise à cette époque, soit en 1966. A cette époque, un britannique sur deux écoutait des radios clandestines. Et c'est ce qui frappe : durant toutes les séquences musicales, on retrouve différents personnages, entraperçus entre deux images, qui continuent leur vie anonyme et qui se réveillent grâce au Rock diffusé par Radio Rock. Que cela soit le petit garçon qui emporte avec lui sa radio pour dormir, la secrétaire de bureau qui travaille tard la nuit ou les infirmières d'un hôpital, toute la société y passe, universalisant le mouvement pirate. C'est vraiment ce qui frappe, plus que tout autre chose dans GME : il y a une claire opposition entre le gouvernement britannique et le peuple en général. Là où les premiers apparaissent mornes et noirs, les seconds resplendissent de joie et de gaieté, épanouis grâce au son de Radio Rock. Le réalisateur accentue fort bien ce détail, en mettant en parallèle les différentes scène de Noël, d'un coté chez les Ministres et de l'autre, sur le bateau pirate. Humour garanti pour les deux avec un "emmerdement profond et gêné" chez le gouvernement et une joie totale jouissive chez Quentin et compagnie. C'est donc un portrait certes manichéen que dresse Richard Curtis en représentant ainsi la société, avec d'un côté les raisonnables et les bons (le gouvernement) et de l'autre, les "sauvages" et les mauvais (les pirates). Le film pourrait être résumé comme le dirait le Comte au moment des festivités de Noël, "Qui n'a pas été sage durant l'année ?", avant de voir des mains indénombrables se lever.
"Les filles, Docteur Dave va pratiquer une intervention sur vos magnifiques... oreilles"
GME est aussi, bien que moins visible (et pourtant!), un film musical, où l'essence du Rock et de la Pop est exaltée à son plus haut point. De nombreuses chansons plus ou moins connues parsèment le film et aboutissent aux multiples plans de la société déjà évoqués plus haut. C'est un vrai plaisir, à la fois pour les oreilles que pour les yeux, de voir se trémousser des habitants par dizaines, dans des lieux insolites (de l'étalage de super marché au toilettes) sur un fond de Rock. Et c'est cette impertinence qui fait la force de GME. On pleure de joie à voir les têtes médusées des Ministres lorsque la radio reprend du service, même interdite. On pouffe de rire devant le Conte prononçant le mot F*** à l'antenne sans le savoir, avec un fond musical endiablé pour couvrir sa voix (néanmoins, les auditeurs l'entendent quand même, ce qui exaspère pas mal de gens). GME est donc une ode à cette révolution culturelle qu'est le Rock, avec tout ce qui va avec comme comportement.
"Nous tenons la corde pour les pendre ! Et ça tombe bien, j'adore les cordes !"
A l'opposé de ces joyeux DJ's, le gouvernement parait bien terne dans son costume uniforme. Représenté symboliquement par un seul homme, Dormandy, il va tout faire pour entraver ces radios pirates. C'est cet ennuie et cette capacité à s'immiscer partout qui énerve plus que tout dans le film, faisant passer le gouvernement pour de vrais lâches, avides de domination sur toutes les radios. Durant toute l'histoire, ils vont chercher par tous les moyens une faille dans cette cuirasse que les lois protègent pourtant. Et quelle n'est pas la joie des spectateurs quand le Conte déclare que 92% des anglais préfèrent faire confiance à des rockeurs qu'à des politiciens! Le spectateur passe donc du côté fou de la vie, oubliant les conventions et les lois, pour devenir justement un de ces hors-la-loi qui écument les flots, distribuant leur bonne musique à qui veut l'entendre.
"La fin est proche... On se croyait éternels... Mais c'est la vie... On vous dit adieu avec dignité et fierté. C'est le dernier compte à rebours pour le Comte. Trois... Deux... Un...Le reste n'est que silence..."
Vous aurez compris mon avis sur ce film, que je considère comme un chef d'œuvre. J'ai adoré du début à la fin, pas une seule fois je ne me suis ennuyé. Les musiques dynamiques et entrainantes ne vous laissent pas une chance d'y échapper : vous êtes face à un bijou parfait d'impertinence et de gaieté. Du pur bonheur.
"I'm kidding, let's rock !!!"
