Attention médames zé méssieuh ! Après deux longues semaines d'attente, ponctuées d'innombrables coup de fouets et autres réjouissances censées "motiver l'écrivain à satisfaire son pauvre lectorat en manque" (dixit Leto "le mégalo" II), voilà le troisième chapitre de Seekers !
Juste un mot avant de vous laisser en profiter : Enjoy !!!
Chapitre 3 : Le mur invisible
C’était une bien belle journée qui s’annonçait : le ciel était bleu, le soleil inondait la mer de sa lumière, la rendant plus étincelante qu’un diamant, les mouettes ajoutaient leur touche à la musique de l’océan et sur leur bateau, les frères Gora étaient sur le point de se foutre sur la gueule.
« J’ai maaaaal à la têêêêête ! se plaignait Lote, allongé sur le pont.
-Moi aussi, et je fais pas chier le monde ! pestait Cash, la tête entre les mains.
-Vous pouvez pas la mettre en veilleuse, vous deux ? s’énervait leur frère Deeg. Je supporte vos jérémiades depuis le début de la traversée mais là je sature !
-On verrait bien comment tu serais toi si t’avais aussi comme un train qui croirait voir un tunnel à traverser entre tes deux oreilles… répliqua Lote en geignant.
-Oh non, pas ton humour pourri, fit Cash, ça empire les choses… »
Abandonnant ses frères apparemment trop nauséeux pour se battre comme il se doit après une telle provocation, Deeg s’éloigna. Ils étaient tous les deux sous forme humaine pour raison de place. Déjà que leur navire n’était pas bien gros, autant le maintenir en bon état en évitant de faire rentrer un gorille dans la cabine ou d’avoir un homme-singe grimpant en haut du mât… Puisque Cash et Lote avaient fini la réserve de Goliprane©, sans que cela eut le moindre effet sur leur mal de crâne, Deeg décida de s’arrêter sur l’île la plus proche, à savoir l’île Modine, où se concentrait la plus grande force de la Marine dans tout South Blue, étant donné que la plus grande base militaire de cette mer y était située. Il ne jugea pas utile d’informer ses frères. Pas question de subir leurs plaintes incessantes une seconde de plus. Une fois arrivés, ils aviseraient sur la situation…
Le voyage jusqu’à Modine se fit sans encombre, si on excepte la tentative de vomissement de Lote avortée par Cash, sous prétexte qu’il « ferait pareil après, et personne n’apprécierait… » Les Gora trouvèrent facilement un endroit où accoster dans le port. Comme prévu, la plupart des bateaux visibles appartenaient à la Marine, mais on pouvait aussi trouver des bateaux pirates, bien qu’éloignés le plus possible des navires des forces de l’ordre. Deeg sauta le premier à terre pour amarrer le bateau et laissa juste ses frères descendre, bien incapables de faire quoi que ce soit.
« Bon on va essayer de trouver un médecin, un pharmacien, un marabout ou même une sorcière mais on va vous débarrasser de ce mal de tête, leur dit Deeg.
-C’est réconfortant d’entendre ça, commença Cash, mais je doute que ça soit dicté par l’envie d’aider tes frères... »
Deeg ignora la pique et Lote n’en fit même pas, trop occupé à se tenir la tête d’une main sur le front. Comme ils commençaient à marcher, ils firent à peine quelques pas sur le quai que Lote bouscula quelqu’un. Marmonnant une excuse, le jeune garçon continua son chemin.
« Eh mec, tu viens de me bousculer là, j’ai pas rêvé ! »
Lote se retourna, ainsi que ses frère, pour enfin dévisager celui qui lui parlait. C’était un individu à l’air particulièrement hargneux, portant une veste de cuir percée d’un grand nombre de clous. Bien qu’il mesurât une bonne tête de moins que Lote, il n’arrêtait de pas de fixer ce dernier du regard, comme pour le provoquer.
« Ouais, j’ai pas rêvé ! Tu m’as bousculé là ! disait-t-il, tout en s’énervant de plus en plus.
-J’me suis déjà excusé… fit Lote d’une voix faible. Mais je m’excuse encore.
-Ouaaaah mais des excuses ça suffit pas ! continua le nain nerveux. Tu m’as saoulé là, alors on va se battre.
-Ecoutez monsieur, s’interposa Deeg, mon frère est malade, il ne vous a pas vu et il s’est excusé, tout est donc réglé.
-Y’a rien qu’est réglé ouais ! On va s’battre et puis c’est tout ! Allez les gars on pète la gueule à ces nazes ! »
Soudain apparurent de toutes part des types à l’air à peine plus amical que le premier, vêtus à peu près de la même manière. Ils se placèrent derrière le nain, l’entourant d’une manière telle qu’il n’en fallut pas plus aux Gora pour deviner qu’il était le chef.
« Nous sommes l’équipage des Crânes d’argent, et personne il se fout de notre gueule sans le payer vachement cher ! lança le chef.
-Un équipage de pirates qui s’affiche ouvertement sur Modine ? s’étonna Deeg. Ils sont encore plus bêtes qu’ils n’en ont l’air…
-On s’en fout, fit Cash, s’approchant. On leur casse la gueule, je vais leur transférer ma douleur… »
Aussitôt Lote et Cash prirent leur forme respectivement mi-homme mi-bête et animale. Les Crânes d’acier sortirent des chaînes et des clés à molettes puis s’approchèrent des deux Gora en faisant frapper leurs bottes sur le sol à chaque pas pour impressionner leurs adversaires. Bien évidemment cela n’eut aucun effet sur les deux singes hommes. Avant même que les pirates n’eurent lancé la moindre réplique qui tue, ils se prirent des coups de poings, de pieds, de tête et autres parties du corps à divers endroits de leur anatomie. En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, Cash et Lote étaient en train de se chamailler sur leur nombre de victimes.
« Je te dis que j’en ai étalé plus de la moitié ! lança Lote à son frère.
-Mon œil ! rétorqua Cash. Si tu compare mes biceps aux tiens, c’est évident que j’ai fait plus de dégâts chez eux que toi.
-De dégâts sans doute, mais pas forcément de victimes !
-Eh ho ! C’est pas bientôt fini vous deux ? s’énerva Deeg. Plutôt que de vous gueuler dessus, faudrait plutôt se préoccuper de votre mal de tête.
-En parlant de ça, fit Lote, j’ai plus mal du tout…
-Moi non plus… ajouta Cash. Bizarre, non ?
-En effet, fit Deeg, perplexe. Je me demande ce qui a bien pu faire que…
Il fut interrompu par un Lote surexcité.
-Eh, c’est peut-être la baston qui nous a fait nous sentir mieux !
-C’est débile, répliqua Deeg en lui lançant un regard fatigué. Pourquoi un truc pareil vous ferait du bien ?
-Sans doute parce qu’à ce moment on est dans notre élément… proposa Cash.
-Mais ouais ! cria Lote. A tous les coups c’est ça ! On a pas eu des pouvoirs de bourrins sans raison !
Avant même que Deeg ait pu tenter de réfuter une absurdité pareille, Cash enchaîna.
-Pour une fois que tu dis un truc sensé… Allez, on va se fritter des mecs dans la taverne d’à côté histoire d’éviter une rechute !
-Mais arrêtez ! cria Deeg. Vous n’allez pas provoquer une autre bagarre sur cette île sur une simple supposition, complètement absurde qui plus est !
-Parce que toi tu sais mieux comment ça marche un Fruit du démon partagé en trois ? » lâcha Lote.
Deeg ne trouva rien à répondre. Ses frères, visiblement satisfaits d’avoir remballé leur aîné, se dirigèrent donc vers le débit de boisson le plus proche, pompeusement nommé « Le petit cheval bien portant ». Deeg hésita à aller les raisonner. D’une part parce qu’il n’était pas sûr d’y arriver (quand ces deux-là avaient la même idée en tête, impossible de les faire changer d’avis…), et d’autre part une fois qu’ils auraient commencé à taper sur tout ce qui bouge, qu’est-ce qui lui garantirait de ne pas être un « truc qui bouge » pour eux ? Il resta comme ça, indécis encore quelques secondes, puis lorsque le premier type vola à travers la fenêtre du bâtiment, il choisit d’interrompre le massacre.
Ouvrant la porte d’entrée, Deeg découvrit de quoi ses frères étaient capables quand ils avaient vraiment envie de se battre. Il ne restait que très peu de mobilier intact dans la salle. A peine une table, qui se brisa en réceptionnant un marin au moment même où le jeune homme posait ses yeux dessus. Voir une chaise avec ses quatre pieds dans cette salle relevait du miracle et seuls quelques éclats brillants sur le sol, et un peu sur le visage de certains, prouvaient qu’il y avait eu un miroir derrière le bar. La confusion était telle que bien que les deux frères soient les seuls à avoir cherché la bagarre (enfin d’après lui), ils n’étaient pas les seuls à subir le courroux des clients : certains se tapaient dessus entre eux. Le patron était absent, ayant préféré payer des réparations que des frais d’hôpital. Deeg resta à contempler le chaos et la désolation apportée par deux idiots simiesques avant de réagir. Aspirant un grand coup, il hurla de toutes ses forces :
« C’est pas bientôt fini vous deux ??!! »
La scène se figea aussitôt. Tous les regards se tournèrent vers le jeune homme qui avait osé interrompre une si saine distraction comme on n’en voyait plus depuis longtemps sur Modine. Il se tourna vers ses frères, le regard courroucé. Ils ne bronchaient pas, évitant son regard : on sentait qu’ils avaient l’habitudes d’être réprimandés par leur aîné, mais pour des simples clients d’une taverne, même ceux plus ou moins ivres, voir un gorille et un mutant homme-singe se mettre en position d’infériorité face à un garçon même pas encore un homme, la scène avait de quoi surprendre. En ajoutant le fait qu’ils s’étaient fait provoquer gratuitement par les deux phénomènes de foire précédemment cité, les clients avaient gagné leur journée en évènements insolites.
« Je vais finir par croire qu’avec le corps vous avez aussi reçu le cerveau d’un gorille ! cria Deeg. Regardez un peu ce que vous avez fait ! Allez, on se casse d’ici ! »
Sans dire un mot, Cash et Lote se mirent à suivre leur aîné vers la sortie quand réapparu le patron du « petit cheval bien portant ». Au vu de la figure décomposée qu’il affichait, il ne s’attendait pas à un tel carnage.
« Hep minute ! lança-t-il aux frères. Et qui c’est qui va me payer ! ‘Faudrait carrément me construire une nouvelle tav… »
Il n’eut pas le loisir de finir sa complante : Deeg lui avait envoyé son bâton dans le visage, l’étalant net.
« C’est vraiment pas le moment ! » fut le seul commentaire du jeune homme.
Les Gora sortirent enfin de l’établissement puis firent quelques pas avant que Deeg ne laisse libre cours à sa colère de nouveau.
« Vous avez vu ce que NOUS venons de faire ? Sur une île bardée de membres de la Marine, vous avez ravagé l’intérieur d’une taverne et j’ai mis KO le gérant ! »
Une tomate mûre eu l’air pâle à côté de son visage tellement il fulminait.
« Ouais mais ça nous a fait beaucoup de bien… commença Lote.
-Je confirme, poursuivit Cash : j’ai plus du tout mal à la tête.
-Et vous croyez que c’est une raison suffisante pour nous mettre dans la merde jusqu’au cou ? hurla Deeg.
-Parce que t’avais une meilleure solution peut-être ? lâcha Cash.
-Au moment où vous avez eu votre idée stupide non, mais si vous m’aviez laissé un tout petit peu de temps, j’aurais trouvé une solution qui n’aurait pas fait autant de dégâts…
-Sans doute, mais tu n’imagines pas à quel point on souffrait ! Et au moins ça a marché ! se défendit Lote.
-Je me demande bien pourquoi j’argumente encore avec vous… Vous êtes plus bornés qu’un Super Colvert ! J’en ai marre, je me casse et je vous laisse réfléchir sur vos actes tous seuls ! »
Sur ces mots, Deeg tourna les talons et commença à s’éloigner le plus possible de ses deux frères. Ces derniers, loin de l’ignorer, se mirent alors à discuter en médisant le plus possible sur lui. Les adjectifs qui revenaient le plus souvent étaient « insensible », « sans-cœur », « moralisateur », « intello » et « faiblard ». Cash proposa de lui enfoncer son bâton entre les deux oreilles pour lui faire connaître un mal de crâne similaire… Lote, plus modéré, proposa juste d’aller lui casser la gueule, histoire de se venger.
Deeg marcha quelques minutes ainsi, bouillant de rage envers les deux imbéciles qui lui servaient de frères. Tandis qu’il avançait, il réfléchit à leur migraine. D’accord elle avait disparu après leur bagarre, mais était-ce vraiment le remède ? Elle était apparue à la fin de leur combat contre Grey Smoke et ses hommes… Et disparu pendant la baston… Or pendant qu’ils se battaient ils…
BUNK !
Deeg se retrouva étalé par terre, légèrement sonné, comme s’il était rentré dans un mur. Il se releva tenta de reprendre sa marche. Mais à peine eut-il fait un pas qu’il se retrouva bloqué, comme s’il se trouvait effectivement devant un mur. Pourtant, il n’avait rien devant lui, apparemment pas plus d’air que d’habitude… Néanmoins, il lui était impossible d’avancer, peu importe l’effort qu’il fournissait. Il tenta de passer quelques mètres sur le côté, en se baissant, en sautant et même à reculons. Rien n’y fit : il restait bloqué. Ne comprenant pas du tout ce qui lui arrivait, il pensa que ce phénomène pouvait avoir un rapport avec le Fruit : sûrement ses frères qui lui faisait payer ses débordements en utilisant un partie du pouvoir qu’il ne connaissait pas encore. Convaincu par cette explication, il retourna les voir, encore plus exaspéré. Quand il les retrouva, ils étaient toujours en train de médire de lui.
« Bon les mecs, leur fit-il, je sais que je me suis énervé, mais c’est pas une raison pour vous venger à votre tour comme ça.
Cash et Lote restèrent interdits quelques secondes, comme s’ils n’avaient pas compris de quoi il parlait.
-Bah… On a encore rien fait ! lâcha Lote.
-Ah ouais ? Et m’empêcher d’avancer, c’est rien peut-être ? répliqua Deeg, passablement énervé.
-Puisqu’on te dit qu’on a rien fait ! pesta Cash. On est resté ici à t’attendre. On n’a pas bougé d’un pouce !
Mais Deeg était trop hors de lui pour être raisonné.
-J’en ai plus qu’assez de vos gamineries ! Vous pourriez vous montrer un peu plus intelligents parfois !
Cash, qui ne comptait pas se faire sermonner pour rien lui répliqua.
-On va t’en donner des raisons de nous gueuler dessus, tu vas voir ! »
Les trois frères partirent aussitôt dans une mêlée brouillonne où volait des poings, des pieds, des étranglements et des pseudo-clés d’étouffement. Mais bien évidemment, ils étaient trop énervés pour que cela soit bien ordonné : Cash et Lote se tapait entre eux, Deeg frappait dans le vide… Après une petite minute de ridicule, les frères s’arrêtèrent, tous trop fatigués par leurs actions précédentes pour continuer
« Bon si tu nous expliquait pourquoi tu t’es fâché maintenant ? dit Cash à son aîné.
-Je n’ai que moyennement apprécié votre blague…
-Le jour où on a mis un crapaud dans ton tiroir à caleçons ? s’étonna Lote. Ce que tu peux être rancunier !
-C’était vous ?! Enfin, on s’en fout… Je parlais du fait de m’avoir empêché d’avancer tout à l’heure.
-On n’a rien à voir là-dedans, répliqua Cash d’un air très sérieux.
Deeg se tourna vers le plus jeune qui hocha la tête pour appuyer les propos de son frère.
-C’est bizarre… Pourtant en marchant j’ai eu l’impression de heurter un mur invisible…
-Et si tu nous montrais au lieu de nous accuser gratuitement ? » proposa Cash.
Deeg se leva alors et tenta d’amener ses frères à l’endroit où quelques minutes plus tôt il lui avait été impossible d’avancer. Mais quand ils arrivèrent, Cash passa l’endroit sans même sans rendre compte. Les yeux écarquillés, Deeg vit son autre frère faire de même. Il leur fit remarquer.
« C’est qu’il n’y a rien alors. Répondit Cash.
-Ou alors que cela n’affecte que moi… »
Il avança prudemment… Et rejoignit ses frères sans encombre. Il était encore plus perplexe.
« T’es sûr de ne pas avoir profité de ton passage à la taverne pour boire un coup ? demanda Lote.
-Non, je suis sûr de ne pas avoir rêvé. J’étais là pendant que vous…
Il interrompit sa phrase, le regard plongé dans le vague. Puis il s’écria, faisant sursauter ses frères.
-J’ai compris !
-Quoi ? firent Cash et Lote en cœur.
-Il faut que j’aille vérifier quelque chose… Attendez-moi là ! »
Puis il partit en courant, s’éloignant de ses frères qui ne comprenait pas plus que tout à l’heure ce qui se passait. Deeg revint quelques minutes après, boitillant et le visage tuméfié.
« Qu’est-ce que t’as fait ? s’étonna Cash. On dirait que tu t’es payé un mur…
-C’est exactement ça ! répondit Deeg. Je me suis éloigné d’une bonne distance puis j’ai de nouveau rencontré un mur invisible.
-Il a changé d’endroit ? fit Lote, surpris.
-Ce n’est pas vraiment ça… Je crois que j’ai trouvé l’explication de ce phénomène. Et en extrapolant un peu, je crois que j’ai aussi compris d’où viennent vos migraines… »
De plus en plus intéressés, les deux frères s’étaient rapprochés du troisième pour mieux écouter son explication quand une voix les héla dans leur dos.
« Hé vous, les singes ! C’est vous qui avez démoli la taverne du « petit cheval bien portant » ! Ne niez pas, le patron vous a reconnu ! »
Se retournant, les Gora virent un officier de la marine approcher d’eux, suivit par un groupe de soldats et le patron de la taverne. L’air sévère qu’il affichait incita les frères à coopérer.
« Oui, c’est bien nous… fit Deeg.
-On est désolés… continua Cash.
-On le fera plus, promis… conclut Lote.
L’officier agita nerveusement la main devant lui.
-Que m’importe vos excuses ! Ce qui importe c’est que vous remboursiez les dégâts.
Le tavernier, qui se tenait juste à côté de lui, secoua la tête. C’était la chose qu’il pouvait faire pour s’exprimer à cause des bandages entourant son visage.
-D’accord… soupira Deeg. Combien devons-nous payer, monsieur… ?
-Je suis le Colonel Efan ! clama-t-il, l’air très fier de lui. Personne ne trompe la justice !
Cash et Lote durent se forcer pour ne pas rire. Deeg lui resta juste bloqué dans son action à l’écoute d’un nom aussi débile.
-Et il a l’air fier en plus… murmura Lote à Cash, qui se tenait les côtes.
-Quelque chose vous fait rire ? demanda l’intéressé aux rieurs.
Deeg s’empressa d’intervenir.
-Non, ce n’est rien… Nous nous demandions juste si votre grade vous, euh… Convenait ?
Le colonel bomba le torse, ravi de pouvoir parler de ça.
-Et comment ! J’ai commencé comme simple soldat, vous savez, et j’ai dû gravir les échelons un à un ! Cela n’a pas été facile… Imaginez un peu, pendant des années j’ai été le 1ere classe Efan, puis le sergent Efan… Mais après des années d’efforts, j’ai enfin été récompensé par le titre qui me va le mieux ! Enfin je suis le Colonel Efan ! »
Cette fois aucun des Gora ne rit. Ils étaient plutôt stupéfait par l’absurdité des propos que venait de leur tenir l’homme.
« Y’a vraiment des débiles partout… » fut le commentaire silencieux de Cash.
Jugeant qu’il avait mis suffisamment son superbe nom en valeur, le colonel reprit son air sévère et s’adressa aux frères.
« Maintenant, bande de brigands, vous allez payer votre amende !
A contrecœur, Deeg sortit la bourse qu’ils avaient prélevées sur Grey Smoke et la tendit à l’officier.
-Tenez, j’espère qu’il y a le compte, car nous n’avons pas plus… En tout cas sachez que nous ne sommes pas des brigands !
-Ah oui ? fit Efan, d’un air distrait, comptant l’argent.
-Parfaitement ! fit Lote. Nous avons même vaincu un dangereux pirate : le capitaine Grey Smoke !
L’officier de la Marine démarra au quart de tour.
-Mais c’est impardonnable !
-Quoi ? firent en même temps les trois frères.
-Le colonel Smoker est peut-être une tête brûlée, mais il prend son rôle très à cœur ! Il n’y a aucune raison de s’en prendre à lui !
-Mais on ne parle pas de… commença Cash.
-Il suffit ! coupa Efan. Je n’ai pas à écouter les fausses excuses d’un groupe de bandits qui détruisent des tavernes et qui attaquent des officier de la Marine ! Allez les gars, on les embarque ! »
Et avant même que les Gora ne puissent réagir, les soldats les menottèrent et les attachèrent entre eux. Au moment même où Lote et Cash reçurent leurs entraves, ils redevinrent humains, à leur grande surprise.
« Vous semblez étonnés, leur fit le colonel, narquois. Sachez que tout régiment possède des menottes en granit marin, au cas où ! Allez, on embarque : vous ne reverrez la lumière du jour que lorsqu’on arrivera à la prison de Soolay-V’Hérou ! »
Impuissants, les frères montèrent sur le navire, puis rentrèrent dans la cale, où ils furent enchaînés.
« J’en ai vraiment plus qu’assez de rencontrer des abrutis… » fut le dernier commentaire de Cash avant que la trappe ne se referme et qu’ils se retrouvent dans l’obscurité.
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