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Depuis que le film avait été annoncé, lors du Festival de Cannes de cette année, j'étais assez curieux de découvrir le nouveau film de Park Chan-Wook, le réalisateur coréen contemporain le plus connu de la planète pour son énorme succès critique avec OLD BOY (primé à Cannes, à croire que la Croisette en est fan), d'autant plus que le thème fantastique de THRIST semblait beaucoup s'éloigner de l'ambiance de sa fameuse Trilogie de la Vengeance ; il n'en fallait pas plus pour m'attirer dans les salles.
Sang-hyun est un jeune prêtre coréen, aimé et respecté. Contre l'avis de sa hiérarchie, il se porte volontaire pour tester en Afrique un vaccin expérimental contre un nouveau virus mortel. Comme les autres cobayes, il succombe à la maladie mais une transfusion sanguine d'origine inconnue le ramène à la vie. De retour en Corée, il commence à subir d'étranges mutations physiques et psychologiques : le prêtre est devenu vampire.
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J'allais voir le film intrigué, j'en suis ressorti tout autant confus. Non pas que je n'ai pas apprécié la séance, au contraire, le film tient en haleine de bout en bout et a un rythme convaincant ; mais je pense que son rôle principal est de décontenancer le spectateur, ce qu'il a brillamment réussi avec moi.
Autant prévenir tout de suite, d'ailleurs, ceux qui n'aiment pas l'érotisme et le gore en abondance ont tout intérêt à ne jamais le voir, puisque le film en est un concentré assez étrange. Z'êtes avertis.
Ben oui, la première chose qui rend le film difficile à appréhender, c'est sa capacité à se donner aucun tabou et à aller aussi loin qu'il le peut. Les longs plans érotiques entre Sang-Hyun et Tae sont assez crus, limite fascinants, même si l'on a du mal à voir où Park Chan-Wook veut en venir. De même pour les giclées de sang qui éclatent à l'écran, les blessures dérangeantes (aah, le passage où Sang - oh le nom approprié - met la main du prêtre SUR son coeur, littéralement), qui n'épargnent rien et tendent à déséquilibrer le spectateur.
Aussi, le réalisateur s'amuse à reprendre tout le mythe romanesque des vampires pour le plonger dans sa sauce : il n'en garde que les caractéristiques surhumaines (aïe, les sauts de dix mètres ont du mal à être convaincants mais bon) et l'aversion pour le soleil. Fini les gousses d'ail, le crucifix (c'eût été le comble pour un prêtre !) et le pieux dans le coeur. D'ailleurs, pour rebondir sur mon paragraphe précédent, il est en revanche intéressant de voir que le côté romanesque des vampires est pulvérisé par l'érotisme, et l'histoire d'amour entre les deux personnages principaux ne se limite pas à l'amour parfait.
Mais surtout, ce qui frappe le plus avec THIRST, c'est son ambiance qui joue un tout petit peu sur le côté sombre mais excessivement sur une lumière blanche aveuglante, à l'inverse de tout ce qu'on peut voir dans le genre. Encore une fois, le rendu est très déroutant, mais il est original et bien utilisé car le blanc immaculé présent dans beaucoup de plans est tâché (symbolisme, symbolisme) et toujours froid.
La dernière scène tranche énormement avec tout le reste du film, se teintant enfin de couleurs chaudes qui font immédiatement penser à l'enfer (ouah, que de symboles !), avec en prime un lever de soleil magnifique.
L'ambiance glauque est parfois attenuée par une mise en scène qui rend des plans (in ? *)volontairement drôles, comme lorsque Tae découvre la véritable nature de Sang (héhé, le voir le tuyau dans la bouche et les yeux grands ouverts à sa réaction, j'ai souri) ou que Tae essaye de se protéger dans la dernière scène (le coup de la voir sous la voiture m'a bien fait rire aussi).
On peut aussi noter que malgré la crédibilité de l'atmosphère, le réalisateur met une bonne dose de fantastique et de folie avec le personnage de Kang-Woo et les remords qu'il suscite aux deux "héros" par le biais de scènes fort dérangeantes. Encore une fois, on oscille de l'un à l'autre de manière très étrange.
Par contre, le point éminement fort du film (à mon goût), c'est son actrice principale Kim Ok-vin (un nom coréen qui se retient facilement, je ne sais pas pourquoi :P) est absolument énorme et mériterait à elle-seule d'aller voir le film pour sa prestation. On peut voir ça comme du cabotinage, mais assister à la descente dans la folie de cette fille, grise au début, maléfique à la fin, est un véritable régal. Son jeu sur les expressions, à la fin, est bluffant tant un simple rictus peut donner des frissons dans le dos. Pour le reste du casting, c'est tout à fait correct mais rien de bien transcendant hormis elle qui explose à l'écran alors qu'on ne s'y attendrait pas à la vue de la première heure du film.
En définitif, je remarque qu'en en parlant, j'ai beaucoup aimé le film, même s'il est très difficile à appréhender. Sans doute parce qu'il joue sur les styles avec aisance, mais qu'on ne voit pas forcément où ça nous mène ; et que même si c'est au final réussi, on peut ne pas apprécier pour autant. Une nouvelle bizarrerie coréenne à voir si on est préparé à ce qu'on va voir dedans et au cinéma coréen ; pour les autres il faut mieux passer son chemin.
Même si ce n'est pas l'un des films que je retiendrai cette année, Park Chan-Wook démontre une nouvelle fois que c'est l'un des réalisateurs contemporains les plus talentueux, si si !
* Bien évidemment, je serais de ceux qui pensent que Park Chan-Wook n'a rien laissé au hasard, mais je laisse ça à l'appréciation de chacun tant ça me parait secondaire et difficile à cerner. Comme le reste, d'ailleurs.