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 Sujet du message: La Belle Personne. Un peu de culture ne nuit décidément pas…
MessagePosté: Ven 26 Sep 2008 16:18 
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Si vous n’aimez pas ce film de Christophe Honoré, plaignez-vous à votre président. Le réalisateur affirme l’avoir produit en réaction à un commentaire un poil sarcastique de N. S. qui expliquait que savoir faire une explication de texte de l’œuvre de madame de Lafayette n’était d’aucune utilité aux membres de l’administration.

Du, coup, la Belle Personne est la pour rappeler que la littérature est intemporelle et toujours aussi apte à véhiculer des émotions, que les amours d’hier sont aussi ceux de demain, et que ce n’est parce que le président de la république s’est emmerdé en cours de français que la culture est quelques chose de superficiel et de facultatif.

Il s'agit donc d'une transposition de « La Princesse de Clèves » en milieux lycéen.
Junie, une jeune fille entière et intacte, va se retrouver confronter à l’amour et a ses conséquences, parmi lesquelles la jalousie et la culpabilité. Anticipant sur la mort des sentiments et la souffrance, elle le fuira.

La cours royale est devenue un lycée huppé, la jeune fille qui fait ses débuts en société est devenue Junie, une élève récemment transférée suite au décès de sa mère, le prince de Clèves est devenu son premier petit copain, le séducteur monsieur de Nemours a vus son statut de prédateur renforcé en devenant professeur d’Italien, le portrait est devenu une photo de classe, etc. etc. …les péripéties du livre sont donc pleinement exploitées, même si je l’ai lu il y un certains temps et ne peux donc pas le certifier sur l’honneur.

Honoré a également fait le parti pris d’un lycée chic ou les élèves seraient cultivés et discuteraient d’égal à égal avec leurs professeurs, ce qui transcende plutôt agréablement les clichés sur les lycéens. Cela donne des moments inégalement justes, comme cette scène de lavabos ou on entend une lycéenne annoncer de but en blanc à Junie « j’ai des relations sexuelles avec ton cousin » ou encor l’absence totale d’imbécile de service. Aussi classes, aisés, matures et favorisés que soient les lycéens qu’il a choisit de dépeindre il y a toujours des élèves plus immatures ou moins populaires que les autres dans une classe de 25 élèves et tout ne peut pas être aussi dénué de frictions et de mesquineries. A noter aussi que Nemours sort avec professeurs et élèves sans distinction et sans réelle coupure temporelle. Ce parti prit de représenter des échanges d'égal à égal entre élèves et professeur étant poussé un peu loin, le film sonne parfois un peu faux.

Malgré ça la transposition lycéenne m’a convaincue. (Scène des petits mots très marrante)
J'ai surtout apprécié L’importance donnée au regard des autres, à l’image que l’on véhicule, qui est très bien rendue. La caméra saisit les regards au vol, scrute les mouvements des uns et des autres, rend avec justesse le ballet des apparences, le parcours des rumeurs.

Le film est beau, et distille sont ambiance hivernale avec mélancolie. Les acteurs sont bons à conditions d’adhérer au festival de « Fils De »(Louis Garrel, Léa Seydoux, Agathe Bonitzer déjà vu dans Le Grand Alibi, le film de papa), et également au fait que l’on retrouve Louis Garrel et Grégoire Leprince-Ringuet dans une même distribution. Brun facétieux mais grave versus blond doux et franc. En gros si vous leur trouviez des charismes de courgette bouillie dans « Les Chansons d’Amour » ça ne devrait pas beaucoup changer, mais pour ma part j’ai été convaincue.

Quant à Léa Seydoux, qui interprète Junie, elle est très convaincante, et possède une belle présence. Bien sûr, au bout d’un moment, la voir camper la même moue pendant tout le film finit par donner des envie de carabine à plombs, mais ayant eue exactement le même sentiment avec le personnage original de Mme de Lafayette je prends ça pour un une volonté délibérée.

Malgré quelques maladresses (la scène ou quelque chose tombe du deuxième étage est un poil précipitée, hum hum…), et une vision un peu trop fantasmée du lycée; La Belle Personne est un film beau et sensible que je vous recommande.

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Dernière édition par Namienator le Ven 26 Sep 2008 19:49, édité 1 fois.

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MessagePosté: Ven 26 Sep 2008 18:41 
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Ouaip. On prend les mêmes et on recommence. Et pareil que précédemment: j'ai adoré d'un bout à l'autre. Et que ce soit adapté de la Princesse de Clèves, la hantise de tout lycéen, rajoute bien à la fois la dimension polémique (on peut faire du neuf beau et pertinent avec du vieux perçu comme chiant et dépassé) et celle "poétique" (comment marche cette reprise/adaptation).

Sur le film, j'ai en gros aimé les mêmes éléments que Namienator, et mes réserves portent sur les mêmes objets. Alors je vais juste en rajouter une couche sur l'idéalisation du lycée qui est présentée dans La Belle personne, parce qu'elle m'a touché directement. Bref je vais parler de moi, de toute façon c'est mon sujet de conversation préféré.

Parce que ma Tendre et moi sommes allés voir ce film après avoir lâchement confié Orphée, bouffé par une conjonctivite en train de muter en bronchiolite, à ses grands-parents, pour nous octroyer deux heures de relache (bon il nous l'a bien fait payer par une fièvre de cheval la nuit suivante, et l'obligation d'appeler SOS médecin...). Et donc, La Belle Personne, ça aura pu être simplement quelques grammes de finesse cinématographiques dans un monde de brutes bactériologiques. Mais non, La Belle Personne nous a scotchés parce dès les premiers plans nous avons reconnus le lycée Molière où nous avons fait notre prépa. Le choc! Les salles encore pires qu'on les avait laissées, la roseraie, la salle des profs, les vagues terrains de derrière, etc. Mais surtout, l'atmosphère fantasmée d'échanges culturels profs/élèves, c'est ce que nous avons eu l'impression de vivre ces deux années-là, parce qu'on est bien tombé, que les profs nous ont eu à la bonne, et parce que nous étions à fond dedans.

Déjà, dans Les Chansons d'amour, je m'étais dit que ça racontait l'histoire de ma vie (métaphoriquement s'entend, pas littéralement), et là, c'est mon fantasme de l'enseignement. C'est vrai que là, avec Entre les murs, ça va être le grand écart. Mais bon on peut essayer d'éviter le cliché de l'écart entre le rêve et la réalité. J'ai essayé de vendre La Belle Personne à mes élèves, je pense que j'aurai plus de succès avec Entre les murs. Je me demande dans lequel des deux films ils se reconnaîtront plutôt...

Pour revenir au film lui-même, je l'ai trouvé globalement très juste, même dans son décallage de départ. Il y a des scènes très étonnantes, très famille d'Honoré, avec des femmes quasi muettes, comme avec la documentaliste Clothilde Hesme, la prof de russe déjà dans les précédents films, et surtout Chiara Mastroiani dans le Café. Très joli.

L'impression de flottement, l'impression d'impression presque est omniprésente. Ca s'imprime juste sur la surface, on est bien là, dans ce lieu qui fait qu'on se dit qu'est-ce qu'il y a sous la surface, et où, tout simplement, on se demande si ca vaut pas tout simplement le coup de s'attarder sur cette surface. Namienator a parlé des regards. C'est très juste. J'y rajouterai le toucher et la peau. Sous les manteaux, c'est ça qu'on attend tout le temps. Précisément cette surface à découvrir, à tous les sens du termes. Et là dedans, Léa Seydoux est bel et bien impressionnante. Et là dedans, la photo, c'est une bonne idée. Et de même, l'insupportable Princesse me paraît bien adaptée dans cette tête à claque de scène de dialogue final avec Nemours.

Et puis effectivement, il y a ce qui ne flotte plus, et qui tombe. Le passage par la musique de Beaupin juste avant me l'avait annoncé. Mais là, ça plombe méchamment. (heu, "précipité", c'est fait exprès ou pas, parce que bon, littéralement, c'est vraiment ça). Mais bon, là aussi c'est un des grands fantasmes pas si fantasme du lycée version prépa littéraire je trouve (plusieurs exemples directement liés à mes années de prépa).

Bref, si vous voulez bien vous laissez surprendre tout simplement par un beau film, avec de belles personnes à l'écran, et l'impression d'être finalement vous aussi une belle personne dans la salle, je vous recommande aussi d'y aller. Et pour le côté parfois étoilé du film, très juxtaposition de moments (le reproche que je ferais personnellement), ce n'est vraiment pas lourd dans la balance.

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Dernière édition par seleniel le Ven 26 Sep 2008 20:02, édité 2 fois.

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MessagePosté: Ven 26 Sep 2008 19:47 
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Lagomorphe a écrit:
heu, "précipité", c'est fait exprès ou pas, parce que bon, littéralement, c'est vraiment ça


Hem, ILOO

I Laugh Only Once

SPOILER

Tout ça pour dire, qu’effectivement c’est mauvais comme calembours quoiqu’involontaire.

Je voulais qu’elle soit lisible par ceux qui n’ont pas vu le filme sans le leur raconter, mais signaler aux autres que le suicide d’Otto, prince de Clèves transposé du 16e siècle au 16e arrondissement, m’a paru carrément mal amené. Même avec toute la soif d’absolu et tous les affects lycéens du monde, se foutre en l’air de cette manière et pour cette raison ne me convainc, pas du tout. Sinon le pic de mortalité des jeunes gens entre 13 et 17 ans serait tel que les romans d’amour seraient interdits aux moins de 20 ans car susceptible de contrarier toute les politiques d’incitation à la maternité du monde.

Même en tant que péripétie enpruntée au roman, ça ne m'a pas plu. Effectivement, le mari meure, effectivement au moment de sa mort ’il savait qu’elle en aimait un autre. Mais même si il me semble qu’il est sous-entendu que ça a pu lui couper ses dernières forces, s’il est mort c’est parce qu’il appartenait à une autre temporalité. En clair il était vieux et malade, pas jeune et inexorablement attiré par les fenêtres.

Mais, ok, ils sont bien nés et lycéens, et très inspirés par des héros romantiques bien nés et suicidaires, et apparemment ça les rends complètement emos et dépressifs.
Si c’est Honoré qui le dit, ça doit être vrai, après tout si personne ne lit Les souffrances du jeune Werther, c’est bien parce qu’on en connait les effets secondaires.


EDIT: Hum, mais que ne suis-je allée en prépa, ça à l'air absolument fa-bu-leux.

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Dernière édition par Namienator le Ven 26 Sep 2008 20:06, édité 1 fois.

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MessagePosté: Ven 26 Sep 2008 21:01 
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Personnellement, ce qui m'a géné, c'est que ça arrive vite, de manière abrupte. Pas de montée, sinon physique, on gagne l'étage et puis basta. C'est vrai que c'est too much.

Mais deux circonstances atténuantes à mes yeux:
1) livre et film: fallait bien une mort, et à part un accident, pour un lycéen, y avait pas trop le choix. La culpabilité, et ce qu'on peut en faire ou pas, ça marche mieux avec le suicide. Et s'il fallait l'introduire, ce n'était pas trop la peine non plus d'en faire un élément central, de le faire monter trop. C'est une chute, au sens strict et au sens narratif.

2) socio: là ça tient moins. C'est nettement plus romanesque et romantique à la fois. J'ai relu Au Chateau d'Argol cet été, qui reprend les Amants de Montmorency, et c'est toujours un thème compliqué à traiter. Mais bon, comme sous-entendu plus haut, lorsque j'ai fait ma propre prépa, une fille a fait un TS en hypo, et une autre de mes camarades a fait la même chose après avoir réussi son concours. Ca fait toujours bizarre, mais si ce n'est pas systématiquement spectaculaire, et pas toujours si "réussi", c'est presque "banal". Et le mythe de celui qui se "précipite", ben précisément on vivait excité par le récit qu'à Fénelon ça s'était produit l'annnée précédente... Les mythes ont la peau dure...

Reste que je suis d'accord: Honoré pouvait s'en passer. Il a cédé à ce qui peut passer pour une facilité. C'est son côté trash qui remonte, et qu'il semble vouloir absolument caser dans tous ses films. Personnellement quand ça se cantonne à ça, ça me va, parce que Ma Mère m'avait assez dégoûté. Et puis là il a quelques prétextes/excuses qui légitiment sa démarche, et ça commence à faire motifs structurels de son "oeuvre" à lui.


EDIT: Bah moi j'ai a-do-ré mes années de prépa. J'en aurais presque fait plus si j'avais pu. Mais bon, paraît que c'est rare. En tout cas je l'ai plutôt vécu comme les élèves du film leur lycée: grosse découverte, grosse émulation, et grosse autonomie. C'est la partie de ma scolarité qui compte le plus pour moi (enfin surtout à Molière, parce que à Condorcet, je me suis moins amusé).

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MessagePosté: Dim 28 Sep 2008 10:11 
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Bon je me suis laissé tenté grâce à vos commentaires et puis on m'a plus ou moins défendu d'aller voir "Entre les Murs" (ami dont la mère est prof et qui en a marre... enfin bref là n'est pas le sujet^^).

Donc "La Belle Personne" est vraiment un beau film, sensible et touchant. Au début j'avais quelques réserves car l'univers décrit dans les premières scènes est très éloigné de ce que j'ai vécu de mes années lycées (le côté lycée huppé et bobo certainement^^;) et j'avais peur de rester un simple observateur extérieur découvrant une tribu éloignée et exotique^^
Finalement ce ne fut pas le cas et je suis doucement entré dans le film au fur et à mesure, et je me suis surpris à me soucier de ces belles personnes et de leurs premiers émois amoureux.

C'est certainement du à la grande justesse des acteurs couplé à une mise en scène à fleur de peau qui fait éclater leur sentiment, même les plus intérieurs. Et Léa Seydoux est impressionnante en "Princesse de Clèves" faisant cohabiter fragilité et une certaine hypocrisie avec grand talent.

Certains éléments sont certes forcés (rapport profs/élèves poussé à l'extrême ou encore la scène finale d'Otto), mais si on prend le parti de "vie fantasmée" - ce qui est un peu la nature même de la Princesse de Clèves je pense - ça passe assez bien. L'atmosphère du film est quand même assez lyrique.

Enfin bref un film touchant et empreint d'une grande mélancolie que j'ai assez aimé ^_^


PS : sinon encore un HS qui n'a rien à voir (quoique^^) mais en allant voir "La Belle Personne", a été diffusé une bande annonce qui m'a fait ouvrir les grands yeux car au bout de quelques dizaines de secondes j'ai reconnu "L'aveugement" de José Saramago!!! Oui je sais tu m'en avais déjà parlé seleniel mais ça m'a quand même bien surpris (le côté inattendu de la chose) et puis j'ai appris comme ça qu'il sortait le 8 octobre. Non parce que je suis un peu nul car j'avais vu des affiches du film "Blindness" mais je n'avais pas fait le rapprochement avec le livre de Saramago... Des fois je me désespère...

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