J'ai vu qu'on en a déjà parlé dans les topics sur le rap et dans l'Instant découverte, alors je viens en rajouter dans la désorganisation de cette partie du forum : j'ai enfin eu le temps de me poser pour écouter le dernier album d'Eminem.
Eh ben c'est confirmé, Eminem a enterré Slim Shady.
D'abord, par nécessité artistique de se renouveler : il a fait le tour - et nous aussi ? - du double maléfique et de ses turpitudes, il a tiré tout ce qu'il pouvait du concept.
Ensuite par "choix existentiel" : considérant la période de trouble qu'il a traversé ces dernières années, le salut passait à ses yeux par un coup de balai sur cette période n'importe-quoi-esque, caractérisée par ce personnage auto-fictif dont la démence avait fini par rejaillir sur des pans entiers de la vie de son auteur.
Ce constat fait (avec tristesse, étant donné que le bonhomme ne sera certainement plus capable de sortir un album comme
The Marshall Mathers LP, formidable concentré de folie made in Slim Shady), reste à se trouver une nouvelle veine, et si possible pas à son bras cette fois.
A cet égard, le disque précédent,
Relapse, me paraît assez particulier. C'était, pour moi, plus un truc pour annoncer "youhouuu, me revoilà" que le fruit d'une vraie maturation artistique. Au final, ça donnait un résultat assez indigeste, entre resucées de lui-même, ou pire, d'autres rappeurs ; flow fainéant parfois collé à la super-glue pendant cinq minutes ; et fulgurances (
Crack a bottle,
Underground...) pas assez nombreuses pour réhausser le tout.
Après ce come-back bizarre, voire douteux, et en soi plutôt anecdotique donc,
Recovery se pose, lui, comme le "vrai" album de la mue de par sa qualité bien supérieure.
La première plus-value de cet opus par rapport au précédent, c'est le flow. On retrouve, comme au bon vieux temps, des punchlines efficaces à souhait, des montées en puissance balèzes, des variations de rythme incontrôlables... en somme, c'est plus énergique, plus "motivé" oserais-je dire, plus mieux quoi.
Du côté des morceaux, je retiendrai avant tout
So Bad, unique prod de Dr. Dre je crois, et seul titre à clairement concéder du terrain à Shady avec
Here we go ; l'agressif (au bon sens du terme, comme on dit dans le foutchebol)
Almost Famous ; voire
Not Afraid - m'enfin lui c'est surtout qu'il me reste dans la tête.
Néanmoins, il faut noter que l'écoute révèle une nouvelle fois certains choix de production déconcertants, voyageant entre sons old school (par exemple
On Fire, bon titre au demeurant) et sortes d'electro-house, sans oublier les incursions de R'n'b de minet soupeux : les consécutifs
Seduction et
No Love sont directement à jeter pour moi, sauf si on veut démontrer la classe d'écart, au niveau du flow, entre Eminem - pourtant même pas en grande forme là-dessus - et Lil Wayne.
Voilà voilà, je dirais que l'on a affaire à un album de transition concernant l'évolution artistique de Marshall Mathers, avec pas mal de tâtonnements mais une qualité globale franchement satisfaisante. Et je suis surtout toujours curieux de voir quelle tournure ça va prendre finalement.