Top 5 ? Bon, je pense que ça suffira étant donné que je ne suis pas un grand consommateur de film.
Alors tout d'abord, il y en a trois que je place au-dessus de tout (oui, de TOUT !!)
2001, L'Odyssée de l'espace – Stanley Kubrick – 1968.
Un pur chef-d'œuvre à la hauteur de son auteur (S.Kubrick et non pas A.C Clarke, auteur des nouvelles dont s’inspire le film.) C’est pour moi une véritable leçon sur l’importance de l’esthétisme cinématographique. Ici, pas de scénario alambiqué. Certes, il se peut qu’on ne comprenne rien au premier visionnage, mais on "ressent" l’idée. On est ici dans un rapport sensible avec le film. Kubrick réussit à dégager son œuvre de toute "fioriture" grâce à une utilisation épurée du langage cinématographique, réduit à son minimum, ne laissant place à aucun plan inutile. La simplicité du film n’a d’égale que la complexité de sa conception (pas facile de faire simple.) Prenons l’exemple du raccord le plus célèbre du cinéma (Os-Vaisseau spatial.) Dans ce seul raccord, Kubrick utilise les formes/mouvements semblables des deux objets pour traduire une ellipse narrative (et quelle ellipse) tout en émettant un commentaire sur le statut de l’Outil, à savoir que sa nature ne change pas. Même après des millions d’années, un outil reste un outil dans son rapport à l’Humanité, qu’il soit archaïque ou à la pointe de la technologie. En un seul raccord s’il vous plaît !! Voilà le genre de film dont il s’agit, un film profondément réfléchit et qui s’interroge sur les différentes étapes de l’évolution humaine. De ses débuts au dépassement de l’Humanité elle-même (qui peut être considérée comme une renaissance), l’homme se démarque de son statut animal (découverte de l’outil, conscience du temps, peur de la mort, etc.) puis de son statut en tant qu’Etre humain. Chaque étape étant ponctuée par l’apparition du monolithe (artéfact extraterrestre, "clairon cosmique" selon Kubrick.) Il est vraiment difficile d’en parler car ce film est avant tout une expérience qu’il faut vivre (oui, Vivre !!) Petite anecdote : la première fois que j’ai "vu" ce film, il devait être entre 3 et 4 heures du matin, j’étais crevé mais impatient de le voir, alors j’ai tenté… et j’ai échoué. Ceux qui ont vu le film peuvent comprendre. Le fait est que 2001 nous marque physiquement (je n’exagère pas) de part son rapport à l’espace et au temps. Kubrick s’applique à étirer ce dernier et à jouer sur des raccords improbables (champs/contre-champs dont les plans successifs montrent le même personnage, etc.) jusqu’à exclure toute notion d’espace-temps (la séquence de la chambre est incroyablement audacieuse.) Par conséquent, étant donné mon état semi-comateux, j’oscillais entre le sommeil et le film. Vous connaissez tous cette sensation de confusion lorsqu’on se réveille et qu’on se rend compte qu’on a piqué du nez devant le film qu’on regardait. On se demande s’il s’est passé 1 heure ou 10 secondes. Avec 2001, j’avais l’impression d’être dans un rêve, même lorsque j’étais éveillé. Je ne distinguais plus ce qui appartenait au film de ce qui venait de mon subconscient (le voyage de Bowman à travers la galaxie m’a vraiment mis à mal.) Du coup, je n’ai absolument pas pu apprécier le film. La deuxième tentative (le lendemain) fut aussi un échec et c’est seulement au troisième visionnage que j’ai véritablement appréhendé ce film. Bizarrement, il paraissait bien moins long. Quoiqu’il en soit, c’est un film qui m’a profondément marqué de part son caractère réfléchit et travaillé au moyen d’une mise en scène simple (loin d’être simple en réalité) et maîtrisée. Du pur génie !! Pour finir, je citerais Kubrick lui-même : "(...) 2001 est fondamentalement une expérience visuelle, non verbale. Le film évite la formulation verbale en termes conceptuels, et atteint le subconscient du spectateur de manière poétique et philosophique. Il devient ainsi une expérience subjective qui touche le spectateur sur un mode de conscience interne, comme la musique ou la peinture." (p.s : à tout ceux qui prétendent que Orange Mécanique est son plus grand chef-d’œuvre, je vous le dis, c’est FAUX !! Argh !!)
Il était une fois dans l’Ouest – Sergio Leone – 1968.
Tout simplement magnifique, vous en conviendrez. A chaque fois, je prends un réel plaisirs à le revoir (mais pas trop, faut laisser un peu de temps entre chaque visionnage.) Leone est un cinéaste que j’apprécie tout particulièrement et c’est la raison pour laquelle j’ai une préférence pour le "Spaghetti" plutôt que pour le western "classique." Attention, je ne dénigre pas ce-dernier, loin de là, mais mes goûts personnels sont plus en accord avec le renouveau apporté par le souffle italien, avec Leone en tête. Il faut dire que les westerns classiques utilisent des codes qui m’agacent sérieusement. Les personnages sont stéréotypés à l’extrême, nous servant ainsi un manichéisme excessif (c’est probablement ce qui m’insupporte le plus au cinéma), etc. Et Leone alors ?? Et bien c’est là que ça devient intéressant (pour moi), car plutôt que de casser tous ces codes vus et revus, le bon vieux Sergio nous les ressert sans s’en cacher, bien au contraire. Il joue avec ces même codes et surenchérie, allant jusqu’à plonger dans la caricature. Que ce soit les lieux (gares, saloon, etc.), les personnages (le porte-flingue, etc.) les situations archi-connues (duels, etc.), on a le droit à toute la panoplie du parfait petit western. Mais on est loin du western "made in Hollywood." Leone construit des personnages bien plus complexes, qui font la part belle à la violence et l’amoralité. Dans ce film en particulier, la femme (fragile et niaise dans le western classique), à même droit à sa part de vices et nous montre qu’elle n’est pas la pour se faire marcher dessus (aaaah, Claudiaaaaa !!) Les personnages secondaires se retrouvent presque déshumanisés pour ne laisser que la caricature d’eux même, surlignant du même coup la figure mythique de l’aventurier de l’ouest. Les personnages principaux, eux, sont tout de même assez travaillez sans pour autant les mettre à nus (des personnages mystérieux propres au genre). On est loin des clichés manichéens ici (pas de bon Shérif et de méchants indiens.) Que ce soit "l’homme à l’harmonica", le hors-la-loi recherché ou le principal antagoniste, ils se montrent différemment selon les situations. Le "héros" (si tant est qu’il y en ait un) se montre froid et distant mais a un côté bon samaritain, le bandit introduit comme un fou dangereux se révèle être un chic type et même le "méchant" (le "bad guy" implacable) attire notre sympathie. Toutefois, ces trois là (particulièrement ces trois là) savent se montrer impitoyable quand il faut (et quand il en a envie pour le troisième) laissant aucun doute sur leurs caractères et la nature violente de l’Ouest. D’un point de vue technique, ce film peut être un vrai plaisir pour ceux qui aiment les plans longs et vident de sens scénaristique. Parodiant les westerns classiques, le film suit des schémas bien connus. Sachant pertinemment ce qui va se produire (bon, on ne devine pas à tous les coups hein), Leone joue avec l’attente du spectateur et nous fais languir pendant des plombes (l’introduction dure une dizaine de minutes et ne raconte… rien, si ce n’est des mecs qui attendent… et attendent.) C’est particulièrement jouissif !! Aussi, comme dans 2001, la dilatation du temps prend une place importante dans ce film (et dans le Spaghetti de manière générale) et participe non seulement à suggérer une ironie sous-jacente tout en créant un contraste avec ce qui s’en suit (violence expéditive.) Enfin, comment passer à côté du travail d’Ennio Morricone dans ce film (dans tous les films sur lesquels il a travaillé en fait.) Ses compositions ont autant d’incidence sur le film que celles de Yoko Kanno sur Cowboy Bebop (fallait forcément que je la ramène là dessus.) La bande son sert admirablement l’image et vice-versa. Pour moi, la musique est fondamentale au cinéma et se doit d’être à la hauteur. C’est toujours un plaisir d’entendre une musique qui puisse se soustraire au film et être considérer comme une œuvre à part entière. Morricone n’est pas du genre à me décevoir et parler de Il était une fois dans l’Ouest sans mentionner ce grand compositeur est tout bonnement inconcevable !!
Apocalypse Now – Francis Ford Coppola – 1979.
Forcément, je me devais d’en parler. Ce film est loin d’être un simple film sur la guerre du Viêtnam. C’est avant tout une vision de l’horreur barbare véhiculée par la guerre. Dans ce film, Coppola va au-delà du conflit vietnamien puisqu’il s’agit d’une transposition de "Heart of Darkness" de Joseph Conrad, qui traitait du colonialisme au Congo à la fin du 19e siècle, s’interrogeant sur le caractère barbare de l’occupation belge. Le cinéaste va donc au-delà de la critique politique sur "l’impérialisme" américain (et Occidental par extension), livrant ainsi un discours profondément pessimiste sur l’horreur, la vraie !! C’est un voyage (au sens littéral) qui transporte le personnage du Capitaine Willard toujours plus profondément dans ses doutes sur la nature du conflit, sur sa mission (assassiner un officier U.S.), sur le comportement au sein de l’armée américaine, etc. Celui-ci se trouve être un narrateur-personnage, ce qui fait qu’on l’accompagne dans son introspection. Ajoutez à cela la passivité du personnage qui le place dans un rapport spectatoriel avec l’environnement dans lequel il évolue. Ce caractère passif est d’ailleurs très bien rendu dans la séquence de la plantation française (bien évidemment, je parle ici de la version "Redux" que je recommande à tous.) Dans cette séquence, le personnage se retrouve chez une famille française, vestige de la colonisation, défendant leurs terres. Cette séquence est très importante car il s’agit d’un commentaire sur l’absurdité de la présence américaine au Vietnam. Contrairement aux français, qui sont installés sur leurs terres depuis des générations, les Etats-Unis ne se battent pour rien, comme le dit explicitement une des réplique du film : "We want to stay here because it's ours - it belongs to us. It keeps our family together. I mean, we fought for that. While you Americans... you are fighting for the biggest nothing in history." L’importance politique du conflit (s’inscrivant dans un conflit plus vaste –> Guerre Froide) est donc évacuée. Le film porte aussi un caractère presque mystique ou psychédélique, allant flirter avec le genre fantastique vers la fin du film. Entre l’alcool, la drogue et les vapeurs de Napalm, il n’y a qu’un pas vers une perception plus… plus… enfin différente quoi !! Aussi, à travers les personnages on entre dans une atmosphère de moins en moins terre à terre, de plus en plus étrange et inquiétante. Ironiquement, ces "procédés" qui ont généralement pour but de "libérer" l’esprit, les enfoncent encore plus dans l’obscurité, transformant peu à peu leurs personnalités (l’utilisation de peintures de guerre et autres artifices montrent ce changement –> symbolique du masque.) Aussi, on peut s’interroger sur la narration elle-même, puisque le narrateur-personnage est lui aussi soumis tout au long de son voyage à une perception (potentiellement) altérée. Le caractère subjectif (et déformée ?) de cette narration peut alors changer notre façon d’appréhender le film (multiples possibilités narratives suggérées par le fleuve –> miroitement.) Il y a évidemment énormément de choses à dire sur ce film (je commence un peu à saturer en fait là), mais je vais finir en saluant les performances de Sheen, Brando, Hopper et Duvall qui m’ont particulièrement scotché (bien que tous les acteurs soit très bons.) Un film que je recommande donc à toutes et à tous évidemment.
Donc, ces trois films sont ceux qui m’ont le plus marqué ("impressionné" est le mot juste) et j’avoue que je me suis un peu emporté, mais ce qui est plaisant dans un film, c’est aussi de creusé et découvrir jusqu’à quel point il peut être génial.
Hey mais… ? C’est pas un top 5 ??
Oui, alors, ces trois là mis à part, j’ajouterais à ce top 5 (mais très vite alors) :
L’Armée des 12 singes – Terry Gilliam – 1995. / La jetée – Chris Marker – 1962.
Le premier film qui m’ait profondément touché étant gamin (même en ne pigeant rien.) Le voyage temporelle au cinéma (et toute les possibilités scénaristiques/analytiques qu’il offre) m’ont toujours intéressé, et Gilliam s’en sort admirablement. La dernière séquence est juste incroyable et tout le parcours de Willis à travers le film est rondement mené. Simplement incroyable !! J’ajoute La jetée car de par son statut de court-métrage et le fait que 12 monkeys s’en inspire, je ne vais pas le compter à part. Toutefois, il faut bien distinguer les deux œuvres, le traitement de la base scénaristique étant très différent.
Les sept samouraïs – Akira Kurosawa – 1954.
Là encore, j’ai pris une claque. Je l’ai très peu vu et il m’est assez difficile d’en parler, mais le sentiment qu’il m’a laissé est très positif. Une fois de plus, un film que je conseille.
Après, il y a tous les autres (en dehors du top, mais pas loin) :
Le Parrain (1, 2 & 3) (Coppola), Métropolis (Lang), Le mépris (Godard), Scarface (Hawks/De Palma), Shinnig (Kubrick), L’Aurore (Murnau), Aguirre, la colère de Dieu (Herzog) et plein d’autres que moi trop fatigué pour moi toi te dire, alors…
P.S. Pour les cas Hitchcock et Tarantino, il se trouve que les films que j’ai vu d’eux m’ont tous très impressionné. J’imagine que ça tient autant du style de l’auteur que du film lui-même. Voilà, juste une précision pour éviter de citer plusieurs de leurs films.
_________________ "A few people laughed, a few people cried. Most people were silent."
See you, space cowboy...
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