Nous y sommes. Pas en finale, mais presque. Affronter Luffy, le grand favori du Tournoi, n’est pas une tâche aisée pour Gally, et je ne crains que ce soit le dernier tour de la Cyborg. Sans être pessimiste, nullement. N’allez pas croire que la flamme qui m’anime lorsque je parle d’elle s’est éteinte. Au contraire, elle est plus vive que jamais. Pour le fait que Kishiro m’a fait devenir un fan-boy accompli en créant ce personnage, elle tient déjà du génie.
Luffy est excellent, c’est un fait. Outre le fait qu’il est le héros du manga qui nous a tous réuni sur ce forum, il n’a tout de même pas usurpé sa place en demi-finale. Pour la finale ça reste à voir. Car Luffy a beau être nanti d’une myriade de qualités méritées, de mon point de vue Gally est mieux.
Mille fois mieux.
[Mode Fan Ultime On]
Premier Acte : Quand la détermination aveugle ne fait pas tout
Luffy a un trait de caractère qui ressort tout au long du manga, il est déterminé, obstiné, à la limite de l’entêtement. Ne déviant jamais de son but, il ne se laisse dicter sa conduite par personne, et peu de gens peuvent se targuer de l’avoir remis à sa place. En un mot comme en cent, il peut être défini comme un électron libre. Exactement comme son adversaire.
Car Gally est, elle aussi, une faille à son système. Un personnage qui ne fait rien comme les autres, pense par soi-même et va à contre-courant de la tendance. Mais là où Luffy l’est parce qu’il doit l’être, puisque son statut de Héros lui imposerait presque cette détermination sans faille qui lui donne ce rêve insensé de devenir Seigneur des Pirates, Gally l’est logiquement. Même une personne ne connaissant le manga que par son synopsis serait à même de comprendre cela : Gally est une étrangère à son monde, non seulement elle ne le connaissait pas avant d’atterrir dans la Décharge, mais en plus elle n’a plus de mémoire. Une conscience adulte avec un esprit enfantin : tel est l’attirail avec lequel elle part dans un univers totalement hostile à son innocence. Une innocence, non feinte, rapidement rattrapée par une effroyable réalité. Malgré elle, elle y fait face ; De son propre chef, elle la combat. Insoumise, rebelle dans l’âme, elle n’en reste pas moins cohérente avec ses idéaux, affrontant ce que Zalem a fait de pire, mais aussi s’y associant pour se tourner vers son anti-karma, comme il plairait sans doute se nommer : Desty Nova. Les mille visages de la folie réincarnés dans un seul être, rien de moins.
Cependant, malgré cet humanisme et cette volonté de rendre son monde meilleur, Gally est comme son adversaire de caoutchouc : elle ne fait rien si cela n’a pas d’intérêt à ses yeux. Lui protége son équipage, ses amis ; Elle est à la recherche de ceux qu’elle aime, dans une lutte désespérée pour les retrouver. Ainsi, elle part affronter Zapan non pas parce que la Décharge l’implore, mais parce que l’ex Hunter-Warrior a détruit les personnes et les lieux qui lui étaient chers ; de même, son alliance impromptue avec les racines maléfiques et aseptisées gangrenant son monde est, d’une part expliquée par le fait que Nova est un savant abject et bien trop dangereux, mais avant tout par sa volonté de revoir celui qui fut un père pour elle, Daisuke Ido. Mais là où la détermination de Gally me parait beaucoup plus exemplaire, c’est parce que tout ce qu’elle chérit est irrémédiablement détruit, mais qu’elle se relève toujours. Souvent acculée, jamais vaincue, les péripéties qu’elle affronte sont sans doute beaucoup plus graves que celle de Monkey D, mais elle ne désespère jamais.
Deuxième Acte : Tragédienne Kuzutestsuienne
Aucune comparaison potentielle avec Luffy. D’une part parce que ce serait presque du spoil, et puis parce que de ce côté, personne ne peut remettre en doute le fait que Gally gagne haut la main. La seule chose est qu’il faut aimer la tragédie. Et même si vous aimez les comiques dans le genre de son adversaire (se reporter pour cela au Quatrième Acte), la tragédie ça surpasse tout. D’une part parce que c’est l’un des mécanismes qui montre à quel point la détermination de Gally est immensément plus grande et plus respectable que celle de Luffy. Cette tragédie se compose de deux facteurs : la décadence de son héroïne et le psychisme ultra-charismatique de ces ennemis/adversaires composé d’évènements douloureux et rarement d’enfances sympathiques. Certes, je m’écarte du sujet en parlant de Makaku, Jashugan, Zapan, Den et Nova, mais ces derniers contribuent à renforcer la tragédie gunnmienne, dans le sens où ils sont le mal qui pétrifie la Décharge et la Terre, mais ils donnent un sens à la vie de Gally. En effet, à quoi une force surhumaine peut bien servir s’il n’y a personne pour l’exploiter ?
Toutefois, ne nous y trompons pas, l’Héroïne n’est pas pour autant enchaînée et aux mains de ses ennemis, ils lui donnent une raison -tragique- de vivre sans pour autant la soumettre. La preuve en est qu’il y a quelques moments de battement dans l’histoire de Gunnm où elle vie sans combattre, tel l’intermède avant la Vengeance de Zapan.
Mais tout de même, Gally a une vie tragique dans son ensemble, une décadence quasi-perpétuel qui ne peut que nous toucher lorsqu’on voit la force avec laquelle elle endure tout cela.
Troisième Acte : Le Panzer Kunst contre les Chewing Technique
Une panoplie assez hallucinante et une maîtrise quasi-divine de son Fruit du Démon confère à Luffy le privilège de se battre : d’un, avec une classe non dissimulable ; de deux, avec une inventivité sans borne ; de trois, sans oublier l’efficacité, destructrice. Ne nous leurrons pas, Monkey est un combattant excellent, sinon les lecteurs de One Piece auraient déserté depuis longtemps le bord. Mais cela ne suffit pas pour faire le poids face à l’Ange de la Mort.
En effet, de ce point de vue, la Cyborg est gagnante à tous les étages. De toutes les qualités qui viennent d’être énumérées pour le porteur de la Volonté du D sur sa façon de distribuer des pains, pas une n’est retrouvable en mieux chez elle. Sans exagération ni hyperbole.
D’une part, la classe. Gally le surclasse de bien loin, sans doute que son physique gracieux accentue sa façon de combattre, mais lorsqu’elle entame un duel, ce n’est pas un combat mais une danse de la mort qu’elle débute. Svelte, agile, ces mouvements sont fluides, sans fioriture, à la limite de la perfection. Deux sortes de classes se rencontrent en fait : d’un côté les attaques qui en mettent plein les mirettes et qui vous étourdissent, de l’autre des déplacements et des arcanes ne devant rien au hasard, dans une chorégraphie mortuaire sublimée par le passage où elle affronte les forces du Barjack dans une robe de mariée brodée à la main par Kaos. Simplement divin.
D’autre part, l’inventivité. Lui s’amuse à créer de nouvelles techniques plus loufoques les unes que les autres, alliant les deux autres points, classe et efficacité ; Elle manie une diversité d’arts létales non exhaustif. Annonçons la couleur pour ceux qui ne connaîtraient absolument rien : le Panzer Kunst est l’art martial et martien mythique étant le fondement de toutes les techniques utilisées dans son Univers. C’est une Titan du combat. Comme tous les autres adeptes de sa discipline, sauf que Gally a quelque chose en plus. Ces souvenirs de l’art qu’elle maîtrise à la perfection ne sont que partiels, et ne peuvent pas lui assurer la victoire face aux innombrables combattants de génie qu’elle rencontre. Elle doit alors créer de nouveaux moyens de se défendre, en parallèle du Panzer Kunst, et au final devient maîtresse des attaques à main armée et du Plasma (notion quelque peu scientifique qui en rebute certains).
Pour finir, l’efficacité. Etre la digne héritière de l’art martial le plus puissant et étendu au monde fait déjà d’elle un ennemi redoutable, mais il n’y a pas que ça. Ô que non. Explosant des légions de mercenaires barjackien, une trentaine de buggies tendant une embuscade à un train des Usines, des Monstres d’Acier de plusieurs dizaine de mètre de hauteur, des budokas aux pouvoirs inimaginables... Elle fait preuve d’une rare finesse et d’une destruction massive assez incroyable.
Sans trop en dire, l’apogée de cet art dont elle fait preuve est atteint sublimement lors du tome six de Last Order, dans une quintessence de l’hémoglobine et de la beauté à l’état pur. Simple, parfait, efficace : sans reproche et sans faille.
Quatrième Acte : La dérision plus forte que le comique
Certes, s’il y a bien un domaine où Luffy D Monkey excelle, c’est celui de l’humour. Gentiment stupide, parfois assez boulet, la personne à qui il n’a pas réussi à arracher le moindre sourire est une espèce rare. Mais même sous la couche très sérieuse du label Seinen de Gunnm, il existe une forme d’humour dévastatrice, presque plus que celui de Luffy : la dérision.
Dans le sens où une très grande partie du manga ne fait pas de place à l’humour, ou alors par très petites touches (notamment le coup des papillons ou le lancer de casses burne à deux roues), le fait que l’auteur puisse se moquer de son héroïne de façon si ouverte et soudaine est une véritable surprise dévastatrice à bien des points de vue. Prenant en compte les sarcasmes circulant sur Gally et ses lèvres prenant des proportions effarantes, Gally se fait bientôt un deuxième nom dans Gunnm : Bouche de Poulpe. Cela n’a l’air de rien, mais Kishiro brode autour de ce caractère physique de son héroïne si visible, l’utilise parfois à outrance, nous faisant ainsi entrer dans un « running-gag » perpétuel et nous fait au final passer un excellent moment.
Ce sont certes deux styles d’humour bien distincts, et l’un est immensément plus discret que l’autre, mais néanmoins c’est parce qu’il était imprévisible que Gunnm se voit teinté de dérision que l’impact est beaucoup plus importante.
« Bouche de poulpeuh, saute sur une mineuh » diront Elf et Zwolf, se moquant alors non seulement de Gally, mais aussi par la même occasion d’elles. Une forme d’autodérision particulièrement agréable, presque essentielle.
Cinquième Acte : Lorsque le sexisme s’en mêle
Impossible de ne pas passer par ce point. Déloyal je vous l’accorde, mais impossible d’y faire l’impasse. Luffy est une incarnation de l’homme ambitieux, nanti d’une volonté très forte comme nous l’avons déjà vu. Presque obligatoire pour un héros de toute façon.
Alors que de son côté, Gally est une femme. Cyborg certes, mais féminine avant tout. Et féministe surtout, mais pas excessivement tout de même. Faire d’une femme un héros particulièrement déterminé et fort, que ce soit au niveau de la psychique ou physique, n’est pas une tâche aisée et courante. Heureusement pour nous, c’était un facteur essentiel pour que l’univers de Gunnm ne s’écroule pas : il lui fallait une héroïne, et pas une pleurnicharde clichéique. L’Ange de la Mort est certainement l’incarnation d’un idéal féminin révolu dans les shonens modernes –et peu importe si elle provient d’un seinen-, une femme, une vraie, qui n’a pas besoin d’hommes bien virils ou de parfaits boulets pour lui venir en aide. L’illustration la plus flagrante est bien évidement sa rencontre avec Fogia. On aurait presque honte d’être un mâle en comparant les deux tellement ils ne sont pas du même niveau, mais qu’importe. Non seulement elle a une multitude de qualités qui la mettent au niveau, si ce n’est au dessus, de son adversaire, mais en plus son rôle de femme aurait pu être un obstacle à cela. Au contraire, c’est un tremplin nécessaire pour en faire le mythe qu’elle est. Mon mythe. Ma Muse. Ma Déesse.
Comme la
Marche de Den sur Zalem, venez tous, assistons à la bataille décisive de Gally :
Sors salutis
et virtutis
mihi nunc contraria
est affectus
et defectus
semper in angaria
hac in hora
sine mora
cordis pulsum tangite,
quod per sortem
sternit fortem
mecum omnes plangite