Puisque je suis en pleine phase "Vietnam" en ce moment, j'avoue ne pas avoir résisté à jeter un coup d'œil à cette série. Rassuré par le fait qu'elle était finie et intrigué par cette construction à la "Maus", qui tranche par sa loufoquerie et permet de ne pas trop être lourd sur un sujet qui l'est naturellement.
Eh bah ça dépote sec ce truc !!!
Alors déjà, les dessins claquent bien, l'aspect vieillot permet encore plus de s'immerger dans l'univers de la bande Cat Shit One et ils sont mine de rien, maitrisés de bout en bout. Une belle petite réussite de ce point de vue là.
Côté scénario, le parti pris de raconter un ensemble de petites chroniques et très malin et permet de ne pas allez jouer vers une histoire résolument chronologique, canon principal dans le manga, qui ici aurait été certainement très ennuyante. De plus, cette structure permet de toucher plein de points différents, en prenant son temps. La plupart des chapitres sont donc très prenants, c'est toujours assez sympa de retrouver les personnages principaux et secondaires récurrents dans divers aventures. Le côté thématique s'avère au final un choix excellent, qui permet de voir plein de choses, de relativiser de plus en plus et au final, on fait un petit tour du Vietnam en peu de temps.
La partie historique est par contre méchamment au point, je n'ai pas relevé grand chose de très choquant. Les termes militaires pleuvent comme ils le devraient et montrent bien que l'armée est réellement un monde à part. Les différentes données techniques sont très bien dispersées et les quelques anecdotes tous ce qu'il y a de plus véridiques (des techniques anti-filatures en jungle au fait que les américains préféraient l'AK-47 à la M-16 lors de mission spéciales). Chose plus importante, on rappelle que la guerre du Vietnam fut beaucoup plus une guerre civile qu'autre chose et qu'à part le matériel particulier (bombardiers, escouades spéciales), les américains étaient surtout fournisseurs de L'ARVN contre l'ANV. A cet égard, le rôle des vietnamiens dans les deux camp est fort bien retranscrit, entre autres par le rôle de "chico", le vietnamien membre temporaire de Cat Shit One. D'un point de vue historique, le tome 3 fait bien mal, avec les histoires de réseaux de drogues, mais tout du long, le rôle de la CIA, des anciens français, des différents pays impliqués (Russie, Chine, Angleterre), du rôle des japonais qui utilisent cette guerre pour se réentrainer et autres, c'est franchement pas joli, mais c'est du véridique...
Pour les persos ensuite, les trois sont fort sympa. Perky, le militaire de carrière, qui n'aime pas forcément ce qu'il fait, mais qui le fait sans hésitation; tiraillé par son passé de prolo, qui finit par se faire bouffer par la guerre. Rats, le linguiste sniper qui se rend compte à quel point sa guerre est injuste, mais qui ne veut pas en sortir sans ses potes. Bota, le raciste, machiste, grande gueule, peureux mais cinglé qui rappelle que les américains s'imaginait beaucoup de choses sur le Vietnam sans comprendre le moins du monde la situation réelle du pays dans lequel ils étaient. On a un trio, agrémenté de Chico, le gars de l'ARVN qui fait habilement la transition entre un monde imaginaire américain (d'un point de vue géopolitique) et le monde tel qu'il est : des innombrables pauvres jetés dans les guerres, qui ne choisissent pas forcément leur camp... On a des héros pas forcément jolis, qui essaient juste de s'en tirer et de faire le boulot qu'on attend d'eux, mais qui n'arrivent pas franchement à oublier qu'ils sont américains.
Le seul problème du manga est certainement le fait qu'il passe la majeure partie de son temps du côté de l'ARVN et des GI's et que certains points de vue sont occultés, mais je pense que quand on touche à se sujet, on peut attendre du lecteur qu'il sache faire la part des choses et ne tiennent pas tout pour argent comptant. Certes, le manga prend parfois part pour les GI's, mais la plupart du temps, c'est plutôt objectif : au final, c'est la grosse merde et seule les grosses huiles russes, chinoises et américaines semblent être de réelles pourritures, les soldats, sont tous les mêmes, mais il y a quand même deux camps...
Bref, une franche bonne petite réussite, qui tire son épingle du jeu par un réalisme tranché par l'aspect farfelu du bestiaire, par un humour bien efficace et par un climat de lassitude, d'égarement parmi les protagonistes, qui chez moi à fait mouche, du bon boulot, à n'en pas douter !!!
PS : à mon avis, c'est beaucoup plus un seinen qu'un shonen. La guerre surtout décrite comme cela, même avec des lapins et des chats tous mignons, ça pas guère être décrit comme un shonen...
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 « Si durant l'intégralité d'une rotation terrestre, l'utilisation d'un fusil d'assaut modèle kalashnikov n'a pas été jugé nécessaire, alors on peut dire que, d'une manière platonicienne, cette journée était ''bonne'' ».
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